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Le président Macky Sall a l’épreuve de la vérité politique

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Photo : Seneweb.com

«  La réduction de la durée du mandat par voie référendaire ou parlementaire violerait forcément la Constitution»

Depuis l’adresse à la Nation faite par le Chef de l’État, pour informer de sa volonté de se conformer à la décision n° 1/C 2016 rendue par le Conseil Constitutionnel à propos entre autres, de la réduction du mandat présidentiel en cours, une vive controverse est née dans laquelle deux camps se dessinent. Ceux qui soutiennent que l’acte rendu par le Conseil Constitutionnel a force exécutoire, et ceux qui estiment qu’il s’agit d’un simple avis que le Président Macky SALL doit méconnaître au nom de la morale.

Nous estimons que ces querelles doctrinales et les disputes politiciennes sur le caractère contraignant ou non de l’acte en cause sont sans objet. Car, il serait curieux voire inconvenant que le législateur, par les dispositions de l’article 51 de la Constitution rende obligatoire, l’appel préalable à la compétence consultative du Conseil Constitutionnel par le Président de la République, en sachant que celui-ci pourrait avoir le loisir de ne tenir aucun compte de l’avis que pourrait émettre la haute juridiction. À moins qu’il y ait asymétrie dans le ratio régis c’est-à-dire une non-concordance entre la volonté du législateur et la lettre de la loi. Il est patent que dans ce cas, le législateur en aurait fait une faculté et non une obligation.

Donc, il peut être dit qu’en l’occurrence, c’est la pertinence de l’argumentaire du juge constitutionnel qui doit conditionner la décision du Président de la République, et pas le caractère obligatoire ou non de l’avis en question.

Les quelques indications ci-après permettent de vérifier cette assertion. Dans l’État républicain,  la Constitution est l’élément fédérateur. C’est le pacte par lequel une nation manifeste sa souveraineté en définissant librement les modalités de dévolution et d’exercice du pouvoir politique.

Faisant suite à l’article 42 et par un serment solennel fait devant Dieu et devant la Nation (article 36) le Président de la République a scellé son engagement d’observer et de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution, et de consacrer toutes ses forces à défendre les institutions.

C’est nous semble-t-il, sous l’éclairage de ce qui précède qu’il conviendrait d’examiner le bien-fondé de la décision du Président de la République, tant au regard de la légalité qu’à celui de la morale.

Le juge constitutionnel a opposé une non recevabilité à la volonté du Chef de l’État au motif qu’il s’agit d’un projet qui est non conforme à l’esprit de la Constitution et à la pratique Constitutionnelle.

De plus, la durée du mandat dont la réduction est proposée a été fixée préalablement à son élection. Si le Président élu avait la possibilité de modifier le mandat en cours, l’ordre juridique serait dérangé et les institutions déstabilisées.

A travers l’argumentaire développé par le juge Constitutionnel, l’on aperçoit clairement le souci de protéger à la fois la souveraineté du Peuple et l’intangibilité de la forme républicaine de l’État.

Si le Constituant a énuméré expressément les causes de cessation du mandat en cours (art 39), il n’a nulle part édicté sur une possibilité de modification de celui-ci dans un sens ou dans l’autre « ubi lex voluit dixit, ubi noluit tacuit  » (quand la loi a voulu quelque chose elle l’a dit, quand elle ne l’a pas voulu elle s’est tue). Par ailleurs, selon un principe fondamental du droit constitutionnel, c’est uniquement lorsque les modifications sont opérées dans le cadre et selon les modalités que la Constitution définit, que le Peuple conserve sa souveraineté dans une démocratie équilibrée. Concernant la protection de l’intangibilité de la forme républicaine de l’Etat, il nous faut revisiter la doctrine française, pour constater que le constituant de ce pays pour barrer la route à toute forme de pouvoir monarchique ou tyrannique, avait proclamé la forme républicaine de l’État. Mais, inspiré par de grands penseurs politiques comme Aristote, Hobbes, Kant, Montesquieu, il avait estimé que pour en assurer l’intangibilité, il ne suffisait pas de se contenter d’une simple proclamation en se fiant aux seules dispositions des hommes à l’éthique, mais qu’il fallait concevoir un dispositif extérieur pour servir de verrou inexpugnable. La technique juridique utilisée par le constituant français pour arriver à cette fin, a été de rendre le mandat présidentiel impersonnel en préfixant unilatéralement et souverainement sa durée afin que l’élu ne puisse en aucun cas, par son seul bon vouloir, initier un projet dont l’objet serait d’en modifier la durée dans un sens ou dans l’autre (article 2 de la loi constitutionnelle française du 26 février 1875. Tout comme l’article 27 de la constitution sénégalaise qui est une disposition impersonnelle de portée générale, parce qu’au moment de son adoption, personne ne savait qui serait le futur Président de la République).

L’argumentaire du juge constitutionnel laisse apparaître que si une telle possibilité existait, la forme républicaine de l’État serait gravement menacée, dans la mesure où, la durée du mandat présidentiel ne dépendrait plus de la souveraineté du Peuple, mais de la seule volonté de l’élu.

Dans cette hypothèse, le calendrier républicain disparaitrait, parce que l’élu pourrait en toute liberté choisir le moment qui lui est le plus favorable pour organiser les élections. Le Peuple irait vers une tyrannie, tandis que l’État républicain se désintégrerait inéluctablement de l’intérieur.

Devant une telle perspective pour la Patrie et la Nation, quelle devrait être l’altitude d’un Président de la République, eu égard aux obligations rattachées à son statut  ?

Faisant abstraction de ce qui est dit ci-dessus, les tenants de la prééminence de la morale, ont choisi de déplacer la question du domaine du droit, vers le champ émotionnel de l’éthique pour soutenir que le Président de la République s’est dédit d’une promesse, d’un engagement (wakh-wakheet) donc, il a violé la morale.

A considérer la nature même du sujet, la position que ceux-ci ont adoptée mérite d’être examinée tant au regard de la morale politique qu’à celui de la morale individuelle.

Pour Montesquieu, la morale politique consiste à avoir l’amour des lois et des institutions. Cette définition de la morale politique concorde avec la conception qui est affichée par le Président Macky SALL.

Quant à Machiavel, il parle de « morale de la politique  » et propose une théorie de l’action qu’il bâtit à partir de la dialectique de l’objectif et du subjectif, pour montrer que des circonstances indépendantes de notre volonté seraient l’arbitre de la moitié de nos actions. Ces circonstances que nous ne maîtrisons pas, tendraient toujours à déplacer nos intentions initiales.

Selon Merleau-Ponty, le cours de la dialectique de l’objectif et du subjectif n’est pas prévisible et peut transformer les intentions de l’homme en son contraire. Inspiré par la théorie de l’action de Machiavel, Max Weber a écrit dans son ouvrage « Le Savant et le Politique  » que « le résultat de l’activité politique répond rarement à l’intention primitive de l’auteur  ».

Donc, selon Machiavel, Merleau-Ponty et Max Weber, la morale de la politique n’est pas violée, lorsque l’engagement fait dans une intention sincère par le politique est contrariée par des circonstances indépendantes de sa volonté.

C’est cela que le Président Giscard D’Estaing appelle dans l’un de ses ouvrages « la vérité politique  ».

Au Sénégal nous avons eu un bel exemple de « vérité politique  » avec le Président Wade. Quand il était dans l’opposition, le Président WADE qui avait à plusieurs reprises subi les aspérités de l’article 80 du Code pénal, dénonçait avec véhémence cette disposition qu’il jugeait peu respectueuse des droits de l’homme. Mais, une fois élu, les réalités de ses responsabilités lui ont rappelé que le propre des incriminations est d’être fluctuantes selon l’évolution de chaque société, et qu’à ce propos, il n’y a pas une loi générale qui gouverne l’humanité. Il était sincère et souhaitait réellement la suppression de l’article 80, mais pour des raisons d’État, donc des circonstances indépendantes de sa volonté, il a laissé survivre ces dispositions qui sont décriées par tout le monde.

Etant un démocrate libéral, le Président WADE n’avait pas maintenu l’article 80 dans le but de tenir le Peuple en respect, mais ne l’a pas supprimé parce qu’il a été confronté au phénomène irrésistible de « la vérité politique  ».

S’agissant de la morale individuelle, il a été observé que reconnaître à la morale la transcendance et l’absolu est chose délicate et périlleuse. C’est pourquoi, l’appréciation qu’on en fait doit toujours être affectée d’une certaine relativité.

La philosophe Aristote a écrit dans l’éthique à Nicomaque, qu’il faut faire la différence entre la « nécessité  » (c’est-à-dire ce qui ne peut être autrement), et le « contingent  » (c’est-à-dire ce qui pourrait être autrement).

Le sociologue E. Banfield a, quant à lui montré par une formule qu’il nomme « familialisme amoral  » que tout individu agit en fonction des intérêts de sa famille, sans tenir compte des exigences de la morale  ; or le sujet qui nous préoccupe (mise en danger de la forme républicaine de l’Etat et de la stabilité des institutions), concerne      au-delà de la famille, la Nation dont le Président de la République est le principal responsable.

Considérée sous cet éclairage, la décision prise par le Président Macky SALL à propos de la réduction de la durée du mandat ne devrait susciter aucune divergence. Tenter d’en tirer un mobile éthique pour alimenter la discorde au niveau national serait confirmer Voltaire selon qui « la discorde est le plus grand mal du genre humain  ». 

En ces circonstances, les leaders politiques devraient refuser de se perdre dans les miroirs que leur tendent les laudateurs et autres activistes. Ils devraient éviter de tendre l’oreille à ces conseillers qui ne sont mus que par leurs intérêts personnels, et qui ont le génie d’embrumer la lucidité de ceux qui les écoutent, en éveillant et avivant le désir et l’espérance qui falsifient souvent la vérité par le mirage de perspectives imaginaires.

En considérant la vérité des faits, on se rend compte facilement qu’il n’y a dans cette affaire ni ruse, ni manœuvres politiciennes, ni incompétence, mais simplement « une impossibilité absolue  ».

A preuve, lorsque dans l’avis qu’il a émis, le juge constitutionnel fait remarquer que les dispositions concernant la réduction du mandat en cours ont « un caractère personnel  ; un caractère individuel très marqué  », il veut rappeler que tout projet de loi ayant ces caractéristiques, qu’il soit soumis au référendum ou directement à l’Assemblée nationale, violerait la Constitution, parce qu’une disposition de portée générale comme l’article 27 ne peut pas être modifiée par une disposition qui a un objectif personnel « generalia specialibus non derogant  », c’est-à-dire les lois de portée générale ne dérogent pas à celles qui ont un objectif spécial.

Au total, et eu égard à ce qui précède, il peut être dit que non seulement la controverse et les disputes entretenues sont inopportunes, mais demander au Président Macky SALL de ne tenir aucun compte de l’éclairage apporté par le juge constitutionnel, c’est l’inviter à aller volontairement au-devant de l’infamie de la haute trahison.

Souleymane NDIAYE,

Docteur en droit et en                     

Sciences Criminelles

Diplômé de l’Institut d’études  

politiques de Montpellier



6 Commentaires

  1. Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (15:37 PM)
    MACKY MENTEUR IL N'EST PLUS CRU MEME S'IL DIT LA VERITE.
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  2. Auteur

    Non

    En Mars, 2016 (15:43 PM)


    "Nous estimons que ces querelles doctrinales et les disputes politiciennes sur le caractère contraignant ou non de l’acte en cause sont sans objet" je vous cite.

    le president est un guide. il se doit de respecter sa parole. Comment pouvons nous adherer a sa vision s'il n a aucune credibilite? il n y aucune difference entre le president et ceux qui profanent nos cimetiere. ils agissent tous pour le pouvoir ou l'argent.
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    Auteur

    Licenciers Anej Ajeb Anama Fnp

    En Mars, 2016 (16:11 PM)
    les licenciers des agences nous allons voter oui pour cette fois ci donnes au président maky

    Cette chance car ils nous a promis de nous insérer a la fonction publique et de nous payer nos

    Bonus pour réparer les préjudice commis a nos familles a nous même 3ans de chômage une souffrance attroce si vraiment il tien pas a ces promeses 2019 non seulement yaura vote sanction contre lui mais on battra campagne cintre lui dans toute les regions du senegal et surtout dans la banlieue dakaroise

    ANEJ

    FNPJ

    AJEB

    ANAMA: :sunugaal:  :sunugaal:  :sunugaal:  :sunugaal:  :sunugaal: :emo
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    Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (16:13 PM)
    Je voterai OUI et PUIS oui et OUI encore
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    Auteur

    Anonyme

    En Mars, 2016 (16:13 PM)
    Copie bien ton analyse et colle en Word, le 21 mars 2016 tu vera que ceux qui fond du brouie dans les Rue et pateau des medias sont meme pas 2% de la population votant
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    Auteur

    Manasawali Walimansa Refer 201

    En Mars, 2016 (16:35 PM)
     :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/danse.gif" alt=":danse:">  

     :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/danse.gif" alt=":danse:">  



    OUI LE «OUI» L’EMPORTERA SUR LE «NON» AVEC PLUS DE 65%



    Ce n’est ni un bourrage des urnes ni notre sondage de suffrages

    A Mansawali Walimansa nous savons bien que ce 20 Mars 2016

    Le suffrage exprimé du «Oui» franchira la barre de plus des 65%





    15 bonnes raisons pour voter « OUI » pour les 15 bons points de la révision constitutionnelle



    Votons en Paix-Jamma-Salam



    Votons tous en toute liberté



    Votons en toute démocratie



    Amul xulo wala «xulowaat»



    Amul xeex fi wala xeexaat fale



    Amul wax wala «waxwaxaat»



    Amul wax wala «waxwaxeet»



    Wotelen Waw ! Wax ji jeex tak



    Au total la révision constitutionnelle proposée à la sanction du suffrage universel de notre peuple sénégalais de ce 20 mars 2016 se fixe pour objectif de faire apporter ces 15 innovations que voilà



    Premièrement : « la modernisation du rôle des partis politiques dans le système démocratique »



    Deuxièmement : « la participation des candidats indépendants à tous les types d’élection » à venir



    Troisièmement : « la promotion de la gouvernance locale et du développement territorial par la création du haut conseil des collectivités territoriales » dans la cadre général de la décentralisation

    Quatrièmement : « la reconnaissance de nouveaux droits aux citoyens : droits à un environnement sain, sur leurs ressources naturelles et leur patrimoine foncier » au regard de nos valeurs d’ensemble



    Cinquièmement : « le renforcement de la citoyenneté par la consécration de devoirs du citoyen »



    Sixièmement : «la restauration du quinquennat pour le mandat présidentiel» face à l’enjeu du futur



    Septièmement: « le renforcement des droits de l’opposition et de son chef » avec droits et devoirs



    Huitièmement : « la représentation des sénégalais de l’extérieur par des députés à eux dédiés »…..



    Neuvièmement : « l’élargissement des pouvoirs de l’assemblée nationale en matière de contrôle de l’action gouvernementale et d’évaluation des politiques publiques» dans le cadre d’État de Droit



    Dixièmement : « la soumission au conseil constitutionnel des lois organiques pour contrôle de constitutionnalité avant leur promulgation » dans le cadre général de la mouvance d’État de droit



    Onzièmement : «l’augmentation du nombre des membres du conseil constitutionnel de 5 à 7 »….



    Douzièmement : « la proposition par le président de l’assemblée nationale de 2 des 7 membres du conseil constitutionnel » dans un cadre en tout général de la séparation démocratique des pouvoirs

    Treizièmement : « l’élargissement des compétences du conseil constitutionnel pour donner des avis et connaître des exceptions d’inconstitutionnalité soulevées devant la cour d’appel » en État de droit



    Quatorzièmement : « la constitutionnalisation des principes de la décentralisation et de la déconcentration » dans le cadre de la mouvance générale et nationale de notre etat de droit



    Quinzièmement : « l’intangibilité des dispositions relatives au mode d’élection, à la durée et au nombre de mandats consécutifs du président de la république»... aux élections présidentielles à venir



    oui, telle est l’Économie du projet de révision de la constitution du 22 janvier 2001 qui sera soumis a la sanction du suffrage universel du referendum du 20 mars 2016. Sénégalais Electeurs à nos cartes !





     :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/danse.gif" alt=":danse:">  

     :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:  :emoshoot:   <img src="https://images.seneweb.com/content/seneweb/generic/images/smileys/danse.gif" alt=":danse:">  
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