José Mourinho, qui aime se plaindre autant que bomber le torse, racontait, ces dernières semaines, que son club de Chelsea manquait d'attaquants de haut niveau. Il faisait référence, d'abord, à Samuel Eto'o, le vieux lion, et à Fernando Torres, le "Kid" si décevant. A peine pensait-il à ce grand maousse qui suit les matches en bout de banc, Demba Ba, 1,90 m pour 82 kg. Attaquant sparadrap titularisé trois fois cette saison, et habitué à ne se mettre en short que pour jouer les arrêts de jeu.

Pourtant, mardi soir, c'est bien vers Ba, écrasé par un amas de coéquipiers extatiques, que Mourinho a piqué un sprint, pour participer, à sa manière, à l'étreinte collective. C'est bien ce "super-sub", joker de luxe, qui a fait chavirer Stamford Bridge. C'est bien ce fan du Paris-Saint-Germain, natif des Hauts-de-Seine, qui a éliminé le club de son cœur, en quart de finale de la Ligue des Champions. "C'est la première fois que je souhaitais que Paris perde" confessera le géant une fois la partie terminée.

De La Frileuse à la Premier League

Parisien de cœur, Demba Ba - aujourd'hui 28 ans - jamais n'aura foulé les pelouses du camp des Loges. C'est par des chemins de traverse, entre coups de tête et coups du sort, que le Sénégalais aura construit une carrière atypique, jusqu'à devenir l'un des attaquants chouchou de la Premier League.

Né à Sèvres – parmi six frères et sœurs – Demba s'initie au football en Normandie, où sa famille s'installe. Milieu défensif en catégories jeunes, il traîne ses crampons au club du Port autonome du Havre, puis à La Frileuse, avant un retour en région parisienne, à Montrouge. A 19 ans, il tente sa chance, sans réussite, à l'OL et à l'AJ Auxerre. Il ne convainc pas non plus les quelques clubs anglais de seconde zone dont il pousse la porte. Il fera finalement ses débuts à Rouen, en CFA. Profil bas. Il marque 7 buts en 32 matches et attire l'attention du club belge de l'Excelsior Mouscron. Après des débuts prometteurs, une fracture tibia-péroné l'éloigne huit mois des terrains. Ba est un homme patient. Il saura signer son retour : sept buts en sept matches.

Assez pour taper dans l'œil des ambitieux dirigeants d'Hoffenheim, alors en 2e division allemande, qui misent 3 millions d'euros sur le jeune sénégalais. Là encore, promu en Bundesliga, son style bulldozer ne laisse pas indifférents les spécialistes en la matière : les Anglais de West Ham le recrutent illico. Puis c'est Newcastle qui récupère le Lion de la Teranga. Protection de balle cadenassée, frappe surpuissante, facilités à faire le ménage dans la surface, Demba Ba talonne Rooney et Van Persie au palmarès des buteurs les plus prolifiques d'Angleterre (36 buts en 65 matches).

Le prémonition d'Eden Hazard

Sa clause libératoire, fixée à 8,6 millions d'euros au mercato 2013, n'a pas découragé Chelsea, qui voyait en lui, au mieux le successeur de Drogba, au pire un remplaçant robuste. Avec le "Special One" aux manettes, c'est la seconde option qui est préférée. Mais Demba Ba, aussi travailleur qu'ambitieux, fait parler ses muscles au moindre bout de match. Comme ce mardi soir, quand le "Mou" lui demande d'enlever sa chasuble à la 66e minutes. Ba y verra une récompense, voire un don du ciel, tant le buteur est un sportif dévot. "Depuis la mi-temps, Hazard [sorti du terrain sur blessure à la 18e minute, ndlr] n'arrêtait pas de me répéter : c'est pour toi, c'est pour toi... Dieu merci, il m'a fait marquer" appréciait le géant, encore un brin gêné d'avoir ainsi terrassé son PSG.


Source : MetroNews