L'Arabie saoudite et ses alliés du Golfe pèsent de tout leur poids financier et diplomatique pour soutenir les militaires au pouvoir en Egypte, confirmant leur hostilité aux Frères musulmans perçus comme un facteur de déstabilisation régionale, estiment des analystes.Dans un message fort à l'Union européenne, qui se réunit mercredi pour envisager éventuellement une suspension de l'aide à l'Egypte, Ryad a assuré que les pays arabes étaient prêts à compenser tout arrêt de l'aide occidentale.
"Ceux qui ont annoncé l'arrêt de leur aide à l'Egypte ou menacent de le faire doivent réaliser que la nation arabe et islamique, avec les ressources dont elle dispose, n'hésitera pas à apporter son aide à l'Égypte", a déclaré le chef de la diplomatie saoudienne, le prince Saoud al-Fayçal, à son retour lundi de Paris où il avait rencontré le président François Hollande. Mercredi, le ministre saoudien a exprimé le souhait de voir la communauté internationale "soutenir les efforts du gouvernement égyptien" et "s'abstenir de toute mesure ou politique de nature à empêcher ces efforts".
L'Arabie saoudite, le Koweït et les Emirats arabes unis ont déjà annoncé des aides cumulées de 12 milliards à l'Egypte dans les jours qui ont suivi la mise à l'écart par l'armée du président islamiste Mohamed Morsi et son arrestation le 3 juillet. Ryad a également envoyé trois hôpitaux de campagne. "Les pays du Golfe ont une profonde animosité à l'égard des islamistes et en particulier à l'égard des Frères musulmans, et l'affaiblissement de la confrérie en Egypte va dans leur intérêt puisqu'il signifie que le modèle islamiste égyptien ne pourra pas s'exporter dans le Golfe et dans les autres pays arabes", relève l'analyste koweïtien Ayed al-Manaa.
Pour Neil Partrick, spécialiste du Moyen-Orient, "la menace confirmée d'une volonté des Frères musulmans de prendre le pouvoir dans le Golfe après le Printemps arabe", a conduit l'Arabie saoudite à mettre en place une "alliance de facto des régimes héréditaires de la péninsule arabique contre eux". Traditionnellement, ces pays ont entretenu des liens étroits avec l'armée égyptienne depuis l'époque du président Anouar al-Sadate et avec le régime du président déchu Hosni Moubarak.
Ces relations n'ont pas été interrompues après l'élection de Mohamed Morsi mais "l'impopularité des Frères musulmans et leur incompétence ont fourni une occasion à l'Arabie saoudite et aux Emirats pour encourager à un retour au statu quo ante au Caire", souligne M. Partrick. Quant aux Frères musulmans qui ont pourtant trouvé refuge dans le Golfe lorsqu'ils ont été réprimés par le président Gamal Abdel Nasser, ils ont perdu la confiance des dirigeants de la région lors de l'invasion du Koweït par le régime de Saddam Hussein en 1990 qu'ils n'ont pas clairement dénoncée.
Aux Emirats, les Frères musulmans sont accusés d'avoir comploté pour se saisir du pouvoir et des dizaines d'entre eux ont été condamnés à la prison cette année. Pour l'analyste saoudien Khalid Al-Dakhil, le souci principal de Ryad est "la stabilité de l'Egypte". "Ryad est terrorisée par l'idée d'un effondrement de l'Egypte", souligne-t-il. "L'Arabie saoudite se verrait dans ce cas comme le dernier des quatre piliers du système politique arabe classique, étant donné que l'Irak est passé sous influence iranienne et que la Syrie est en proie à une guerre civile destructrice", explique-t-il. L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont allés jusqu'à "former un lobby" pour tenter de peser sur les positions occidentales hésitantes sur l'Egypte, selon l'analyste libanais établi à Londres Abdel Wahab Badrakhan.
"L'Arabie saoudite est déjà très déçue de l'abandon par l'Occident de la question syrienne (...) et les pays du Golfe s'inquiètent du manque de clarté des Américains sur l'Iran", estime-t-il. Le seul pays du Golfe qui navigue à contre-courant est le Qatar, qui était le principal soutien des Frères musulmans en Egypte et qui a déploré le départ de M. Morsi. "Le Qatar va maintenant souffrir d'un isolement au sein du Conseil de coopération du Golfe", le regroupement des monarchies arabes de la région, affirme M. Dakhil. "Ce pays se doit de rééquilibrer sa position après avoir mis tous ses oeufs dans le panier des Frères musulmans", selon lui.
5 Commentaires
Dp
En Août, 2013 (11:44 AM)Com
En Août, 2013 (11:54 AM)Abu Muhammad
En Août, 2013 (12:19 PM)Cette position de l'Arabie Saoudite devrait amener certains à distinguer le pouvoir politique saoudien des guides et savants religieux saoudiens qui, pour rien au monde ne soutiendraient un tel massacre!!!
Al Fulani
En Août, 2013 (17:24 PM)Pauvres Ignards
En Août, 2013 (18:58 PM)Participer à la Discussion