L'annonce de la mort du Premier ministre éthiopien Meles Zenawi a donné lieu à un concert de commentaires élogieux de la part de la communauté internationale. Sont-ils justifiés ?
- Il a replacé au premier plan de la scène internationale en jouant un rôle clé à la fois dans la Corne de l'Afrique (vis-à-vis de la poussée islamiste en Somalie ou du conflit entre le Nord et le Sud Soudan) – et à l'échelle du continent (dans les négociations sur le climat et à l'Union africaine). De ce point de vue, les éloges sont justifiés. Mais Meles Zenawi, c'était Dr Jekyll et M. Hyde. Et cette autre face du personnage est passée sous silence. D'une intelligence inouïe, il était d'une habileté diabolique : il savait charmer ses interlocuteurs, faire croire aux Occidentaux qu'il était sur la même longueur d'onde qu'eux, alors qu'il s'était en réalité coulé dans les habits des empereurs traditionnels de l'Ethiopie. Sa conception et son exercice du pouvoir étaient absolument autoritaires.
On lui tresse aussi des lauriers pour son rôle dans le redressement économique de son pays. Le mérite-il vraiment ?
- Depuis qu'il est arrivé au pouvoir, l'Ethiopie a incontestablement enregistré des progrès économiques considérables, qui sont largement dus à l'action de la puissance publique. Mais la croissance de ces dernières années n'a pas été de 11%, comme le régime le prétend, mais autour de 7 ou 8% au grand maximum, et elle a été très inégalitaire : l'Ethiopie souffre toujours de l'extrême pauvreté et de la malnutrition.
L'Ethiopie qu'il a façonnée peut-elle lui survivre ?
- Le gouvernement éthiopien l'a dit : il compte conduire la même politique sur le plan intérieur comme extérieur. Mais il y a une accumulation de facteurs de crise qui font que l'Ethiopie entre dans une ère d'imprévisibilité la plus totale.
D'une part, étant donné l'emprise que Meles Zenawi exerçait sur tous les domaines de la vie éthiopienne, sa disparition crée un vide immense. Il avait bâti un édifice politique, économique, militaire, sécuritaire, dont il était le seul et unique chef. Sa succession risque donc de poser un réel problème. L'un de ses anciens compagnons d'armes, aujourd'hui dans l'opposition, a eu cette phrase très juste pour résumer la situation : "Il chaussait des bottes trop grandes pour que quelqu'un puisse les chausser à son tour." Il est donc fort probable que dans un premier temps, ce soit une direction collégiale qui se mette en place.
D'autre part, ce régime autoritaire reposait sur un socle en réalité extrêmement instable sur le moyen ou long terme, puisqu'il avait concentré tous les pouvoirs entre les mains d'une petite minorité ethnique, les Tigréens, qui représentent 6% de la population. La succession de Meles Zenawi va-t-elle donner lieu à un meilleur partage du pouvoir sur le plan ethnique, avec les deux ethnies majoritaires du pays, les Oromos et les Amharas ? La direction qui va se mettre en place va-t-elle avoir le courage et la possibilité de corriger ce déséquilibre ethnique ? C'est là l'enjeu réel de la succession de Meles. La question du partage du pouvoir est d'autant plus complexe que si elle se pose, ce sera forcément non seulement en termes politiques mais aussi économiques. Car l'élite au pouvoir détient non seulement les pouvoirs politiques et sécuritaires mais aussi économiques.
A ces questions cruciales viennent se greffer plusieurs facteurs d'instabilité, qui ne sont pas directement liés à la disparition de Meles Zenawi. Les musulmans, qui, officiellement, représentent un tiers de la population mais sont probablement plus nombreux, sont entrés en dissidence. Ils manifestent, semaine après semaine, contre le régime qui refuse de les laisser gérer leurs affaires religieuses comme ils l'entendent. Simultanément, on apprend que le chef d'état-major de l'armée est parti se faire soigner à l'étranger et que le chef de l'Eglise chrétienne orthodoxe est mort ! La succession de ce dernier va aussi ouvrir une crise à l'intérieur de cette institution religieuse d'autant qu'il était contesté en raison de sa proximité jugée excessive avec Meles Zenawi.
Dernier facteur aggravant, l'inflation qui monte en flèche. Les paysans éthiopiens y sont très exposés : ne produisant pas assez pour subvenir à leurs propres besoins alimentaires, la moitié d'entre eux sont acheteurs net de nourriture. L'Ethiopie n'est pas à l'abri de nouvelles émeutes de la faim.
L'opposition peut-elle mettre à profit cette période de transition ?
- Qu'elle le tente, c'est plus que probable. Qu'elle réussisse, c'est plus qu'improbable. Car elle a été totalement muselée, laminée par le régime. Il y a, certes, une diaspora enragée contre Meles Zenawi, mais sur le plan intérieur, l'opposition n'a qu'un seul député sur 537 parlementaires. Il existe par ailleurs deux grands mouvements d'opposition armée – une guérilla chronique dans l'Ogaden, au sud-est du pays, et le Front de libération de l'Oromo, qui piétine sur le plan militaire depuis des années. Bref, il est difficile d'imaginer une opposition qui puisse aujourd'hui peser dans le processus de succession. D'autant que je ne vois pas de figure charismatique qui pourrait rallier derrière elle les opposants au régime.
Ceci dit, mieux vaut se méfier des apparences. En 2005, le pouvoir l'a appris à ses dépens. Il s'était cru suffisamment fort pour lever le couvercle du chaudron en préparant des élections de façon relativement démocratique. Résultat, l'opposition et une grande partie de la population s'y sont engouffrées. Le régime a pris une telle gifle sur le plan électoral qu'il a répondu par la fraude et la répression. A l'époque, le feu couvait sous la cendre ; est-ce le cas aujourd'hui, après 7 ans supplémentaires d'autoritarisme ? Difficile à dire.
Peut-on imaginer que le régime choisisse la voie de l'ouverture démocratique ?
- Je pense qu'au contraire il va se raidir encore un peu plus, paniqué par toutes ces difficultés qui se présentent à lui.
Parmi ces difficultés, l'Ethiopie doit-elle craindre une menace extérieure ?
- S'il devait y avoir une telle menace, elle viendrait soit des shebabs de Somalie, soit de l'Erythrée, avec laquelle l'Ethiopie est en situation de ni guerre ni paix depuis 12 ans. Mais je ne crois pas qu'ils se risqueraient à défier l'armée éthiopienne. En revanche, la Corne de l'Afrique va, elle, probablement pâtir de l'absence de Meles. Il avait une telle personnalité, un tel poids personnel que sa disparition risque de rendre plus difficile la résolution des différents conflits qui traversent la région.
*René Lefort est journaliste et chercheur, spécialiste de la Corne de l'Afrique.
5 Commentaires
Bikal
En Août, 2012 (03:12 AM)Ras Shabaka Neferka
En Août, 2012 (15:31 PM)CE ZENAWI FRANC-MAÇON A MODIFIER LE DRAPEAU ÉTHIOPIEN AVEC UNE ÉTOILE DES ILLUMINÉS, A FAIT EXILER LE VRAIS PATRIARCHE AUX USA, MIT EN PRISON DES MOINES ERMITES ET IMPOSER AUX ÉTHIOPIENS FAUX ABOUNA DU NOM DE PAULOS. CE PAULOS QUI VIENT JUSTE DE MOURIR POUR ACCOMPAGNER ZENAWI DANS LA GEHEENE. ABOUNA PAULOS AVAIT FERMÉ LES YEUX SUR LE MONASTÈRE DE SAINT GABRIEL BRULER POUR LA LOCATION DES TERRES CULTIVABLES LOUÉES AUX ÉTRANGERS POUR BAYE DE 90 ANS. LE MONASTÈRE SAINT GABRIEL VIEUX DE 1500 ANS ÉTAIT VÉNÉRÉ PAR TOUS LES ÉTHIOPIENS ORTHODOXES ET MUSULMANS CONFONDUS. CE BANDIT DE PAOULOS SOUS L'INFLUENCE ET LA CURIOSITÉ DES MAÇONS A VOULU EXHIBER L'ARCHE DE L'ALLIANCE QUE SIPORA AVAIT DEMANDE A MOSHÉ (MOISE). LE TOUT PUISSANT EZIABERTH VIENT ENCORE ET ENCORE DE PROUVER AUX ÉTHIOPIENS QU'IL ENTEND LEURS PRIÈRES, LES CHOQUES DE LEURS SISTRES ET LEUR TAM-TAM KABARO, LES MÉTROPOLITES, LES MOINES, LES PRÊTRES, LES CHANTRES ET LES DIACRES CHANTANT TOUTE LES NUITS POUR LE SALUT ET SALEM DANS LE MONDE.
Kodjo
En Août, 2012 (16:06 PM)Rastakouér
En Août, 2012 (16:22 PM)Désta
En Août, 2012 (11:01 AM)Participer à la Discussion