Tidjane Thiam est prêt à un retour dans le monde de la finance. Selon le Financial Times (FT), quotidien de référence de la place de Londres, le dirigeant franco-ivoirien, ancien DG de l’assureur britannique Prudential et du colosse helvétique Credit Suisse, a été approché par la banque américaine JPMorgan Chase afin de lancer ensemble un « special purpose acquisition vehicle » (SPAC), une « société d’acquisition à vocation spécifique ».
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Selon les informations du quotidien britannique – qui n’ont pas pu être confirmées immédiatement auprès de l’entourage de Tidjane Thiam – ce projet a reçu l’aval et l’intervention personnelle de Jamie Dimon, patron de JPMorgan Chase et figure incontournable du Forum de Davos, où Tidjane Thiam s’est rendu à plusieurs reprises, notamment durant son passage à la tête de Credit Suisse, entre 2015 et début 2020.
La future société d’acquisition devrait cibler une levée de 250 millions de dollars pour des acquisitions dans le secteur des services financiers autant en Occident que dans les marchés émergents, rapporte le FT. Elle devrait être cotée à la Bourse de New York.
Objets financiers exotiques longtemps relégués au second plan, les SPAC sont « des sociétés constituées par des particuliers afin de faciliter l’investissement via une première offre publique de vente (IPO) », expliquait en 2017 un rapport de Africa Investor, consacré à la mobilisation de l’épargne des fonds de retraite africains.
Les SPACs permettent de mobiliser des ressources en amont et de coter en bourse une société d’investissement dont l’objectif est d’acquérir ensuite divers actifs.
Le poste exact de Tidjane Thiam dans ce futur véhicule d’acquisition n’a pas été indiqué, même si, selon le média britannique, des pourparlers sont en cours avec des fonds souverains et plusieurs membres potentiels du futur conseil d’administration de l’entreprise.
La réussite du lancement de ces véhicules d’acquisition repose en grande partie sur l’expertise des promoteurs de ces projets et sur leur capacité à convaincre des investisseurs, avant même l’identification formelle des futures « cibles », d’où leur surnom de « chèques en blanc ».
Outre sa longue expérience dans la finance européenne, le financier franco-ivoirien a développé un important carnet d’adresses auprès d’investisseurs et de grandes fortunes (ultra high net worth individuals – (HNWI), dans le jargon du métier) durant son passage à Credit Suisse, où il a mis l’accent sur la gestion de fortunes. Ses équipes, à l’époque, mettaient en avant l’engouement des HNWI, en Asie notamment, à rencontrer le polytechnicien franco-ivoirien.
Par ailleurs, durant son passage à Prudential, il a pressé – sans succès – pour une expansion en Asie et réalisé la première incursion de l’assureur britannique sur le marché africain, avec le rachat en 2013 du ghanéen Express Life Insurance.
Les SPACs sont en vogue depuis le début de 2020, bénéficiant de l’incertitude des marchés en raison de la crise du Covid-19.
À la fin de septembre, les analystes de EY comptaient « 122 SPAC créés à travers le monde, pour un montant total de 44,1 milliards de dollars levés ». « Pour le seul troisième trimestre 2020, le produit des introductions en bourse des SPAC (32,2 milliards de dollars) a dépassé le produit total (15,8 milliards de dollars US) de l’ensemble de l’année 2019 », souligne le cabinet de conseil.
"un SPAC est un moyen incroyablement efficace pour un investisseur institutionnel d’accéder aux marchés privés"
« Si vous y réfléchissez du point de vue d’un investisseur, un SPAC est un moyen incroyablement efficace pour un investisseur institutionnel d’accéder aux marchés privés », insistait en octobre dernier Scott Kleinman, président exécutif du géant américain de l’investissement Apollo Global Management (433 milliards de dollars d’actifs sous gestion). Ce dernier a lancé le 6 janvier Apollo Strategic Growth Capital II, son deuxième SPAC, qui vise la levée de 400 millions de dollars pour son introduction en Bourse.
Le sud-africain Renergen Limited a été l’un des premiers SPACs cotés sur une place boursière africaine, en juin 2015, après la levée à l’époque de 75 millions de rands (5,5 millions d’euros).
En décembre dernier, Renergen a annoncé un partenariat avec le géant français Total pour le marketing et la distribution de produits issus du gaz naturel liquéfié.
Depuis son départ – plus ou moins contraint – de Credit Suisse, Tidjane Thiam est resté en retrait de la direction opérationnelle d’institutions financières, privilégiant des postes non exécutifs, notamment au conseil d’administration du numéro 3 mondial du luxe Kering, à la tête de celui du Rwanda Finance Limited, parmi les envoyés spéciaux de l’Union africaine pour mobiliser des ressources face au Covid-19 et au sein du Conseil pour un capitalisme inclusif, affilié au Vatican.
Son nom revient régulièrement dans la sphère politique en Côte d’Ivoire – où de pressantes rumeurs l’ont présenté comme potentiel candidat à la présidentielle d’octobre 2020 – autant qu’en France, où d’aucuns le voyaient s’installer à Bercy, ministre de l’Économie et des Finances d’Emmanuel Macron.
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