Entre décembre 2012 et janvier 2013, le président de la République a tenu un discours en trois temps sur l’image de l’institution qu’il incarne. Macky Sall a menacé, est passé à l’acte avant de se rétracter finalement, pour mettre un terme à une cacophonie dont il a été à l’origine.
« Je suis encore coriace pour prendre des coups »
D’abord s’adressant à Sidy Lamine Niasse sans le citer nommément. « Vous ne pouvez pas avoir une radio, une télé et vous passez votre temps à insulter les gens gratuitement et si on vous le dit, vous dites qu’il n’y a pas de liberté de la presse. Ce n’est pas admissible. Ce n’est pas équilibré. Pour le moment j’ai encore le dos rond et je suis encore coriace pour prendre des coups donc je ne vais pas faire interpeller quelqu’un pour cela », avait-il déclaré devant le secteur privé, en mi-décembre dernier.
Mais il faudra à peine une semaine pour que Macky prenne l’option de sévir contre ceux qui sont dans leur rôle d’opposants et s’en prennent à sa personne, ou à l’institution qu’il incarne. Parce que le président apprécie peu les sorties du Pds contre le nouveau pouvoir. Non plus il ne supporte pas les attaques dont il fait l’objet de la part du groupe Walfadjri, journal, radio et télé. Cela, il l’a fait savoir à sa manière.
« On ne peut pas gérer un pays avec des fétiches »
Curieusement, Macky ne mettra pas longtemps pour passer à la vitesse supérieure, pour sévir, en faisant « interpeller quelqu’un », quelqu’un qui ne sera pas Sidy Lamine Niasse, mais l’ex-garde des Sceaux, El Hadj Amadou Sall qui accuse le président de fétichisme.
En bon « avocat » du Pds, Me Sall protestait contre les convocations, chaque jeudi, de Karim Wade par les enquêteurs de la Crei. « Karim Wade est convoqué tous les jours le jeudi, six fois de suite le jeudi (…) On le garde pour pouvoir le libérer dans la nuit du jeudi à vendredi. On ne peut pas gérer un pays avec des fétiches, dans le mysticisme », avait alors martelé Amadou Sall, arrêté par la suite, le 25 décembre, quelques heures seulement après la visite à Mbodiène du président Macky Sall, dont le discours musclé tenu devant les militants Apr, contre ses pourfendeurs, avait pour objet de siffler la fin de la récréation. «Je ne permettrai plus à personne de porter atteinte à l’image du chef de l’Etat», avait alors menacé Macky Sall, le 22 décembre dernier. Menaces traduites en actes, ce que regrettera par la suite le président, manifestement mal à l’aise après la polémique suscitée par l’arrestation de Me Sall, sa garde à vue et son passage annoncé devant une cour spéciale. « Wade a entendu pire », crie-t-on du côté de l’opposition, « nous sommes tous des El Hadj Amadou Sall », répètent en chœur l’orchestre du Pds, très remonté contre « le petit dictateur de Mbodiène », pour reprendre les termes d’un confrère.
Macky sait qu’il n’aurait pas dû s’emporter. Il veut rectifier le tir, prendre de la hauteur et rester au dessus de la mêlée.
Un emploi excessif du « je » dans le discours du président
L’occasion lui sera offerte par un « citoyen ordinaire », le porte-parole de la famille religieuse de Tivaouane, Serigne Abdoul Aziz Sy Al Amine, le 21 janvier dernier à quelques heures du Gamou. «J’ai entendu votre demande, d’ailleurs en venant j’ai dit au ministre de la Justice car aujourd’hui le Tribunal devait convoquer un avocat pour offense au chef de l’Etat mais, je lui ai demandé de leur dire que nous avons laissé cette affaire», confie le chef de l’Etat, qui a voulu sévir contre un crime de « lèse-Mackyesté ». L’emploi excessif du « je » dans les propos du président, rappelle son prédécesseur et fait redouter une personnalisation du pouvoir, un judiciaire à la solde d’un exécutif dont il serait le bras armé.
Toute cette cacophonie, était-ce nécessaire pour protéger son image de président et faire comprendre qu'il est le président de la République, celui que les Sénégalais ont choisi contre le sortant Abdoulaye Wade? En faisant preuve de "clémence" devant El Hadj Amadou Sall qu'il dit pardonner, Macky Sall foulera au pied la sacro-sainte séparation des pouvoirs. « Macky roule dame justice », écrit l’Observateur dans une de ses éditions. Laissant sous-entendre que la chancellerie a été activée par la présidence pour faire interpeller El Hadj Amadou Sall. La même présidence pour ne pas dire Macky Sall, qui ordonnera par la suite l’arrêt des poursuites contre l’ex-garde des Sceaux.
Exit Mbodiène, Macky dans ses habits de président
Aujourd’hui, Macly est « dans les habits d’un chef d’Etat, après le ton menaçant de Mbodiène », écrit Sud quotidien ce lundi, convaincu que « Macky Sall a décidé d’assumer sa fonction de chef d’Etat et l’image qu’elle (la fonction : ndlr) incarne ». Ce, après avoir été à l’origine d’une cacophonie présidentielle dont on aurait pu faire l’économie. Une cacophonie qui n’a pas été si inutile au débat publique, toutefois. Parce que dorénavant, Macky va devoir apprendre à prendre des coups, y compris les plus violents, sans broncher. Le lynchage politico-médiatique ne fait que commencer.
11 Commentaires
Ame
En Janvier, 2013 (15:54 PM)Emploi
En Janvier, 2013 (15:54 PM)Leuzz
En Janvier, 2013 (15:55 PM)Coplan-bis
En Janvier, 2013 (15:56 PM)Kerekou
En Janvier, 2013 (16:10 PM)Mimi
En Janvier, 2013 (16:20 PM)Hé!
En Janvier, 2024 (17:18 PM)Ftt
En Janvier, 2013 (16:27 PM)Ahmad_9254
En Janvier, 2013 (16:40 PM)Douwa
En Janvier, 2013 (17:39 PM)Kiroukou
En Janvier, 2013 (18:22 PM)Alioune.diop
En Janvier, 2013 (11:21 AM)Participer à la Discussion