Il y a des principes fondamentaux qui sont communs à toute l'humanité. Comme l'affirme si bien Descartes: "le bon sens est la chose du monde la mieux partagée". Il est bien évident que toutes les nations du monde qui aspirent au développement doivent se construire avec un minimum de rationalité devant leur servir de soubassement pour gouverner la destinée de leurs peuples. Le cours de l'histoire nous montre chaque jour qu'au fur et à mesure que les autres contrées du monde progressent, les dirigeants africains avancent inexorablement vers le chemin de la régression et de l'anachronisme. Les institutions sont déstabilisées et toutes les conditions sont entretenues pour désorienter davantage des États particulièrement fragiles.
La situation de pauvreté dans laquelle baigne beaucoup d'africains est à comprendre à l'aune de l'instabilité des ses institutions créée par des dignitaires dont le seul souci est de se maintenir au pouvoir à tout prix. Le peuple, au nom duquel toutes les classes dirigeantes se réclament, ne représente que leur fallacieux instrument qu'ils utilisent tous pour assouvir leur désir de s'enrichir de manière démesurée. Au moment où la dette africaine croît à un rythme exponentiel, beaucoup de dirigeants africains remplissent leurs comptes en occident, construisent des châteaux et roulent avec des voitures de collection de tout genre. Pendant ce temps la misère se propage dans leur pays et atteint des proportions inquiétantes.
Pour entretenir cette situation d'opulence non justifiée, beaucoup de chefs d'État manipulent les institutions de leur pays, les ajustent à leur dessein et répriment violemment toute voix discordante qui s'oppose à cette injustice. Au Sénégal par exemple, tous les verrous mis en place pour installer une véritable démocratie et éviter le gaspillage des deniers publics dans le pays ont sauté sous les deux mandats du président Abdoulaye Wade (manipulations multiples de la constitution sans référendum, créations d'institutions inutiles comme le sénat, le conseil économiques et social, nomination incessante de ministres sans portefeuille, accaparement de biens publics à des fins privées, etc.). Le président en place, avant d'être élu en 2000, est celui qui a le plus décrié ces institutions fantômes, destinées à caser et entretenir une clientèle politique en mal de crédibilité.
Dans un autre pays au Niger, le président Mamadou Tanja, après avoir épuisé ses deux mandats autorisés par la constitution, dissout le parlement et la cour suprême, impose un référendum anticonstitutionnel de sa pérennité au pouvoir et gouverne par décrets spéciaux et ordonnances. Avec sa nouvelle constitution, il concentre tous les pouvoirs et devient le nouvel empereur. Des exemples de cette nature se multiplient sur le continent au grand dam d'une population livrée à une pauvreté insoutenable. Ailleurs en Guinée Conakry, la dictature imposée au peuple par le régime de Moussa Dadis Camara, est encore là pour montrer que le chemin à parcourir est encore long.
Doit-on se résigner du fait que l'Afrique est le seul continent où les dignitaires au pouvoir ont du mal à vivre avec des institutions stables? Doit-on accepter que pour des besoins crypto-personnels, l'avenir de millions de personnes soit hypothéqué? Assurément non! C'est à l'intérieur de nos États que le combat pour la démocratie devrait être mené. Le respect de l'Afrique dans le concert des nations dépend de la manière dont nos pays sont gouvernés de l'intérieur. Tant que nous ne montrerons pas du sérieux à la face du monde, nous allons malheureusement continuer à conjuguer avec des retours massifs de nos jeunes migrants avec des charters et des escortes musclées. Si jadis les chinois étaient souvent rapatriés dans leur pays d'origine dans les mêmes conditions que les africains d'Europe, aujourd'hui aucun pays développé n'ose entreprendre de telles initiatives au risque d'en récolter les dividendes. La Chine a atteint un niveau de développement que tous les pays respectent désormais.
A la lumière de toutes ces grandes évolutions qui marquent le monde d'aujourd'hui, l'Afrique ne peut continuer à rester en rade. Nous devons pouvoir nous arrêter un moment et dire que nous ne voulons plus de ces dirigeants qui ne pensent qu'à eux et non au bonheur collectif. L'Afrique ne changera que par les africains et son développement ne se fera que par les moyens de l'Afrique. Nous devons tout mettre en œuvre pour casser le cercle vicieux de la dépendance et nous ériger tous en défenseurs de la stabilité de nos institutions, gage de notre bonheur collectif et la lutte contre l'injustice.
Ibrahima Gassama
Économiste en développement durable, Montréal
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