
La forte demande de logement à Dakar est à l’origine des prix exorbitants des loyers. Cette robuste demande est alimentée par plusieurs facteurs, notamment la croissance démographique (taux de natalité élevé, l’exode rurale et sous régionale) et surtout la concentration de toutes les activités économiques à Dakar.
L’ambition du chef de l’état est d’améliorer les conditions de vie des sénégalais. Ainsi, il a saisi l’Assemblée nationale du projet de loi n°04-2014 portant baisse des loyers. Cette loi va avoir sur le court terme, en admettant qu’elle ne tombe pas en désuétude, des effets positifs sur le prix du loyer pour les locataires. Par contre, pour les propriétaires la loi signifie une perte de revenus, d’autant plus que ceux qui seront frappés par la réduction la plus significative ne sont pas nécessairement plus nantis que leurs locataires. En effet, la loi prévoit une réduction de 29% sur les loyers de 150000FCFA ou moins. Ces loyers, nous le savons tous, sont majoritairement de petits appartements et des chambrettes individuelles. Les propriétaires de tels édifices sont souvent des familles à revenu moyen qui s’entassent dans une partie de la maison et louent le reste pour avoir des revenus supplémentaires. Ce sont aussi, parfois, des immigrés qui ont investi toute leur épargne dans l’immobilier Dakarois en espérant vivre de leurs loyers.
Cette loi ressemble donc à une redistribution des richesses qui est quelque part injuste. Elle octroie un bénéfice immédiat aux locataires et pénalise les propriétaires les plus vulnérables.
Sur le long terme, cependant, il n’y aura que des perdants !
La loi portera préjudice aux bénéficiaires actuelles en créant une pénurie de logements. Elle va anéantir, de la part du secteur privée, toute incitation à l’investissement dans l’immobilier qui ne sera plus considéré comme bien rentable. Cette faiblesse des marges va pousser à construire, en dépensant le moins possible, des logements de très mauvaise qualité. De la même manière, l’entretien des logements déjà occupés sera moindre du fait que les propriétaires n’auront pas de motifs particuliers à entretenir des logements qui leur ramènent moins d’argent que ce qu’ils en escomptaient. Par conséquent, ceux qui auront la chance de trouver un logement pourraient se retrouver dans des maisons peu entretenues faisant face à des problèmes d’ordre sanitaire et sécuritaire, encore bien plus aigus que ce qu’il en est aujourd’hui. Ne parlons pas des risques d’émergence d’un marché noir pour le logement, car à cause de la pénurie qui sera enclenchée, certains demandeurs de logements accepteront de payer le prix officiel pour avoir un appartement tout en rajoutant des montants non déclarés aux propriétaires.
Voilà, les problèmes auxquels les populations vont être confrontées sur le court et le long terme si cette loi est appliquée.
Je recommande vivement au gouvernement sénégalais de reconsidérer cette loi.
Une politique du logement bien pensée, qui crée des logements décents à des prix abordables s’impose. Les retombées d’une telle politique sur le plan économique, social, et sur la baisse de la criminalité ne sont plus à démontrer. Dans un prochain article, je proposerai des solutions plus adéquates aux problèmes du logement à Dakar. Ici il m’avait semblé nécessaire d’avertir les autorités et d’alerter le peuple sénégalais, les observateurs et partenaires au développement, sur les méfaits de cette loi bien intentionnée, mais aux conséquences désastreuses sur le bien-être économique et social du pays.
Medoune M. Seck Professeur d’économie : John Abbott Collège( Montreal-Quebec) Diplômé en sciences économique : option monnaie et finance Université Paris I Panthéon Sorbonne. Master of Arts en économie de George Mason Université (Virginie-E.U)
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