
Ces pensées sont à l’origine inspirées par la mort du jeune Mamadou DIOP. Il était à l’époque un mort de plus, mais déjà un mort de trop. C’est un euphémisme de dire que le Sénégal prend une direction à l’issue à la fois périlleuse et incertaine. Plus personne n’a le droit de se taire.
Le régime
libéral est le plus grand gâchis de l’histoire du Sénégal. Au soir du 19 mars 2000,
c’est tout un peuple qui l’a porté au pouvoir. Son avènement fut un motif de
fierté pour le continent africain dans son ensemble et partout dans le monde on
lui a tressé des lauriers, magnifiant l’exception sénégalaise.
Au soir du
31 janvier 2012, ce régime est descendu bien bas. Il s’est définitivement fermé
les portes de la grandeur et de l’honorabilité éternelles. Il s’est condamné à
la petitesse. L’analogie de la petite porte de sortie est trop généreuse. Il
n’y a plus de porte de sortie honorable possible. Il y a seulement une petite
issue comparable à celles qu’on trouve dans les boutiques Naar. On n’y entre pas en se tenant droit : il faut ramper ou
se baisser pour passer. Tel est le sort de tous ceux qui bravent la volonté de
leurs peuples et s’abaissent à faire passer leur appétit pour le pouvoir avant
la vie de leurs concitoyens. Quelle voie funeste ! Quelle sortie
méprisable surtout pour des hommes qui ayant la reconnaissance de leurs pairs,
les faveurs de la communauté internationale et le soutien de leur peuple
étaient suffisamment outillés pour écrire en lettres d’or l’histoire du Sénégal
à l’aube du 3e millénaire.
Ceux qui ont
tué ce jeune père de famille ne sont pas seulement ceux qui l’ont écrasé. Ce
sont aussi ceux, tous ceux, qui ont contribué à ce que les conditions
objectives de ce malheur soient réunies.
L’opinion la
mieux partagée concernant les politiciens au Sénégal est une sentence sans
appel : ils sont opportunistes, menteurs, égoïstes. Il n’y a qu’à regarder
l’opposition sénégalaise incapable de s’entendre sur un candidat unique à cause
d’ambitions personnelles qu’elle n’arrive pas à placer au dessous de l’intérêt supérieur de la nation.
Seulement le
cas du Parti Démocratique Sénégalais frise la caricature. Il a poussé jusqu’à
son niveau le plus détestable le concept d’Etat patrimonial. Avec lui, la
notion de cannibalisme social dont faisait état Axelle KABOU et qui nous a tant
révolté trouve tout son sens. Du temps de l’esclavage, ce sont les africains
qui vendaient les africains. Durant la période coloniale, le Blanc s’est appuyé
sur une partie des autochtones pour opprimer les populations. Aujourd’hui
encore pour entretenir un système inégal en défaveur de l’Afrique les
mécanismes de la communauté internationale s’appuient sur les élites africaines
qui au plus haut niveau trahissent leurs peuples pour de l’argent, du confort,
de la gloire, par instinct sécuritaire ou pour leurs familles.
Ce qui
manque le plus à nos hommes politiques, ce n’est ni l’audace ni l’intelligence
ni, dans bien des cas, l’expérience ; c’est la vertu.
Que vaut un
leader qui dit et se dédit ? Quelle est la valeur d’un homme sans parole ?
Est-ce ce
régime là que nous voulons reconduire en 2012,
si tant est que le choix de son candidat soit légitime ? Un régime
qui quelque soit le prix à payer pour son peuple campe sur ses positions et poursuit
ses ambitions, faisant passer des considérations électoralistes avant la
stabilité de la nation, incapable de répondre à l’appel des bonnes volontés ni
même d’entendre leurs sollicitations. Un régime qui ne s’émeut point de voir
passer ses concitoyens de vie à trépas, sourd à la voix du bon sens et de la
raison, qualifiant ces faits de vent qui passe.
Amadou SONKO
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