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Le parricide des fils rebelles : Idrissa Seck entre le marteau du père et l’enclume du " frère "

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Le parricide des fils rebelles : Idrissa Seck entre le marteau du père et l’enclume du " frère "

Le leader du parti Rewmi en cas de second tour devra opérer un choix difficile voire impossible entre son rival de toujours, Macky Sall, et son père d’emprunt, Abdoulaye Wade.

On s’achemine probablement vers une tragédie familiale digne d’une pièce de Shakespeare, un parricide impliquant deux fils rebelles, deux frères ennemis. Ou encore l’épilogue du feuilleton Wade-Idy qui a tenu en haleine les Sénégalais depuis l’aube de l’alternance. L’ancien premier ministre et maire de Thiès se voit damer le pion par Macky Sall qui après lui avoir succédé à la primature puis au cœur du PDS, ne cesse d’étendre ses tentacules. Confiant, il poursuit sa marche folle vers le palais de la république, conforté par les premières tendances à l’issue du scrutin du 26 février dernier. L’édile de Fatick a donc décidé de sceller dans un premier temps le sort d’Abdoulaye Wade, pour ensuite envoyer à la retraite politique les socialistes Niasse et Tanor - ainsi que toute la génération des cinquante et soixante-huitards qui, en refusant de quitter l’arène politique, sont en train de livrer la dernière bataille politique de leur vie. Aujourd’hui sur le point de commettre un parricide, Macky Sall devra, au passage, solder les comptes du maire de Thiès. Arrivé deuxième à la présidentielle de 2007, Seck, au second tour, va devoir se contenter d’un simple rôle « d’arbitre de touche », pour reprendre les termes d’un chroniqueur de RFM.

C’est donc pire qu’un drame cornélien qui se dresse devant l’ancien premier ministre, qui va devoir prendre son mal en patience, jusqu’à la prochaine présidentielle. Mais il lui faudra choisir, de toute évidence, entre le père et le frère, Wade et Macky, deux anciens collaborateurs qu’il connait bien, deux ‘frères’ libéraux qu’il aura côtoyés longuement. Celui qui déclarait préférer « s’allier avec son père pour tuer l’ennemi » plutôt que l’inverse, se trouve aujourd’hui dans une posture non enviable pour ne pas dire délicate : commettra-t-il enfin comme Brutus le parricide tant rêvé, ou tentera-t-il de sauver le père ? Rien n’est moins sûr, même si ses partisans, d’ores et déjà, ont écarté tout soutien à Abdoulaye Wade.

Compte tenu de la violence politique combinée à la virulence des propos qui ont émaillé la dernière campagne électorale, où Wade, Idy et Macky ne se sont pas fait de cadeau, on peut difficilement envisager une alliance entre les uns et les autres, si ce n’est pour des logiques de survie politique pour les deux premiers cités, une logique de rassemblement pour le dernier. Macky Sall, pressenti pour affronter Wade au second tour, devra faire preuve d’ouverture, et démontrer sa capacité à rassembler autour de sa personne, mais envisagerait-il une alliance avec celui à qui il aura succédé à la primature puis dans le directoire de campagne d’Abdoulaye Wade ?

Pour en revenir à Idrissa Seck, son retour éventuel au  PDS serait une suite bizarre mais très logique, un « happy end », étant donné que l’homme des Chantiers de Thiès n’a jamais renié ses origines politiques, son appartenance et son ancrage dans la famille libérale, une formation politique qui risque de ne pas survivre au départ du pouvoir de son fondateur Abdoulaye Wade. Mais que gagnerait Seck « le banni » à retourner dans la maison du père ? Tout et rien à la fois. Le maire de Thiès, de par ses allers-retours entre pouvoir et opposition, a fini par dégouter une bonne partie des électeurs, la classe politique et ses alliés qui l’estiment imprévisible quant à ses calculs politiciens, ses choix politiques, somme toute logiques, mais dépourvues de cohérence ou de constance. Pour Idrissa Seck, donner une consigne de vote en faveur de Macky Sall revient à ramer dans le sens du courant, et donnerait l’impression au Rewmi de participer à la marche de l’histoire sans y apporter grand-chose. Parallèlement, retourner avec Wade et l’aider à conserver le pouvoir serait un pari risqué pour Idrissa Seck, qui, en opérant ce choix, passera pour celui qui aura combattu un régime aujourd’hui aux abois, et au lieu de lui donner le coup de grâce, essaierait de le tirer d’affaire en le maintenant sous perfusion le temps du deuxième tour. Le phénomène « Djibo » pourrait-il de nouveau entacher l’entre-deux tours ?

En revanche une dernière option s’ouvre à Idrissa Seck : ne pas donner de consigne, et laisser à ses électeurs et sympathisants la liberté de choisir. Cette posture lui permettrait à la fois de ne pas entacher davantage sa réputation en termes d’allers-retours entre le pouvoir et l’opposition, et l’aiderait à rabattre les troupes en vue des législatives de juin prochain. En cas de départ du PDS du pouvoir, Seck pourra, s’il le souhaite, choisir de « recycler » certains de ses anciens camarades de parti qui voudront bien le rejoindre, en vue de constituer un contre-pouvoir, une alternative crédible, étant donné que l’APR de Macky Sall risque d’occuper le premier rang en termes de formation politique une fois au pouvoir. Idy et Macky, héritiers légitimes du Sopi, devront chacun puiser dans le PDS, tout en évitant d’en recycler la gangrène, ces transhumants et hommes de main que Wade a choisi de mettre en selle, en lieu et place des PDS authentiques, ses alliés avec lesquels il avait conquis le pouvoir en 2000.

Il est évident que si Wade perd le deuxième tour de l’élection, il n’aura ni les ressources nécessaires encore moins la force physique de s’opposer à Macky Sall. La retraite politique s’imposera à lui, ce sera l’avènement d’une nouvelle génération d’hommes politiques, la fin du PDS, un parti aujourd’hui sous soins palliatifs; mais Wade aura tout de même la relative satisfaction de laisser le pouvoir entre les mains d’un de ses fils spirituels, Macky Sall en l’occurrence, et non à ses adversaires de la famille socialiste. En attendant manœuvres ultimes, Wade et Idy, deux bêtes politiques aux réactions imprévisibles, pourront-ils encore une fois écrire l’histoire, créer la surprise ? Idrissa Seck choisira-t-il de participer au parricide auquel se prépare Macky Sall ? Time will tell !

Momar Mbaye

Correspondant des Dernières Nouvelles d’Alsace,

Et administrateur du site www.thiesvision.com



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