Le musée Théodore Monod d’art africain de Dakar abrite une exposition qui entend, à l’aide de l’art et de la production artisanale, ‘’donner du sens’’ à la Renaissance africaine, thème du troisième Festival mondial des arts nègres (10-31 décembre).
On respire le neuf à l’entrée du hall de ce musée qui a rajeuni par le fait d’une fondation, qui a déboursé 655 millions de francs CFA, à l’occasion du festival. Le musée était défraîchi par les années, puisque ses murs dataient de 1931. Ils ont servi de siège à l’administration générale de l’Afrique occidentale française (AOF), pendant la colonisation.
L’espace d’exposition du musée Théodore Monod d’art africain, dans ses beaux atours, satisfait la curiosité de nombreux touristes étrangers et d’élèves de Dakar et d’autres régions du pays.
‘’En moyenne, chaque jour, nous recevons 150 visiteurs ordinaires, qui peuvent être des ambassadeurs, des commerçants, par opposition aux visites pédagogiques, celles des élèves et de leurs enseignants’’, revendique Joseph Diédhiou, membre de la cellule de communication du musée. ‘’Chaque jour, l’exposition est visitée par 600 voire 800 élèves’’ accompagnés de leurs enseignants
Diédhiou, le regard rivé tantôt sur l’écran d’un ordinateur, tantôt sur une machine à imprimer, poursuit : ’’Ils viennent rendre visite à nos ancêtres Lucy et Toumaï qui sont là.’’
De la pièce réservée à la cellule de communication, le visiteur sort avec un document distribué spontanément. Le texte explique ‘’la philosophie et le contenu de l’exposition’’.
Distribué au premier venu, il professe que ‘’l’Afrique et sa diaspora peuvent puiser dans leurs trajectoires plurielles des repères suffisamment forts pour accompagner l’idéal de la renaissance’’.A travers ‘’des expressions artistiques, des productions artisanales et des artéfacts exceptionnels’’ venus d’une vingtaine de pays africains.
Dans le hall du bâtiment abritant l’espace d’exposition, élèves, touristes et autres visiteurs se frayent du chemin, pour observer le squelette de ‘’nos ancêtres qui sont là’’.
En fait d’ancêtres, il s’agit surtout de Lucy, un fossile découvert dans le nord de l’Ethiopie en novembre 1974. C’est la plus grande attraction de l’exposition intitulée ‘’Arts d’Afrique’’.
Une jeune femme servant de guide raconte machinalement l’histoire de cette découverte anthropologique. Ce fossile ‘’s’appelait auparavant Dinknesh, qui veut dire +merveilleux+ en amharique, une langue éthiopienne. Il a été découvert par un chercheur anglais Donald Johnson. Il est vieux de 3,2 millions d’années’’, dit-elle par exemple. Touristes et élèves, religieusement attentifs, ne la quittent pas d’une semelle.
De cette dame, le visiteur peut apprendre que le nom du fossile est tiré de la chanson ‘’Lucy The sky with diamonds’’ [‘’Lucy, le ciel couvert de diamants’’] des Beatles, un groupe musical britannique qu’admire l’historien Johnson.
Toumaï, un autre fossile découvert en 2001 au Tchad, aiguise la curiosité. Une grande photo, légende à l’appui, lui prête l’âge de sept millions d’années. Son crâne, exposé sous un grand verre, retient l’attention de M. N. Diop, un écolier dakarois venu visiter l’exposition. ‘’Je suis très content ici. J’ai pu découvrir les visages des hommes comme Toumaï, des masques. C’est joli à voir’’, avoue l’élève.
D’autres élèves et étudiants écoutent attentivement les explications de leur guide ou lisent les tableaux. Certains griffonnent des notes. ‘’Cette exposition nous permet d’avoir un regard sur l’histoire de l’Afrique et de trouver des outils pour d’éventuelles recherches’’, confie, stylo et carnet de notes sous la main, Jacques Ntab, un étudiant de l’Ecole des bibliothécaires, archivistes et documentalistes (EBAD) de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Tenant à immortaliser leur visite à l’exposition ‘’Arts d’Afrique’’, élèves, touristes et autres visiteurs posent devant des caméras, à côté des objets d’art. Parmi ces nombreux visiteurs, un couple français, les Ferrière, Claude et Laurence, venus de Montpellier, en France.
‘’L’exposition est belle, la salle grande et bien agencée. Il me parait intéressant que l’art africain soit reconnu comme une entité à part entière, qu’on distingue les arts premiers des arts primitifs. Il y a de plus en plus de gens sensibilisés à l’art africain, collectionneurs, comme non-collectionneurs’’, commente Claude.
Les légendes des objets d’art ne font pas grand cas de la dimension temps, comme le constate un visiteur, compatriote de Claude. Un livre sur le tourisme sénégalais sous la main, il se réjouit ‘’des beaux et superbes objets’’, mais ‘’regrette que [l’exposition] manque de dates et d’explications’’.
A l’étage du musée, est exposée la vie africaine, à travers de nombreux centres d’intérêt allant de la fécondité aux travaux champêtres, en passant par les loisirs, le pouvoir, le fétichisme ou la maternité, etc.
‘’C’est extraordinaire ! Ce n’est pas simplement de l’art ça. Par cette exposition, on nous explique l’âme même de l’homme africain. Chaque objet a une fonction qui participe à la régulation sociale’’, commente un juriste et anthropologue qui requiert l’anonymat.
‘’Il fallait faire beaucoup d’enfants quand les tribus étaient en guerre’’, ajoute l’homme, tout impressionné par des statuettes inspirées de la fécondité et de la maternité. Elles sont venues de la Guinée, pour la plupart.
‘’On avait tout ça. Mais, quand l’islam est arrivé, on a tout brûlé. On devait exposer tout ça à ciel ouvert, à la Place de l’indépendance par exemple’’, préconise le même visiteur.
‘’L’art africain n’est pas beaucoup esthétique. Mais, ici, on a essayé de représenter la beauté de la femme africaine’’, explique, connaisseur, le guide Lamine Bâ, qui s’arrête net devant un cimier en coiffure de corne, acheminé d’Ekoil, au Nigeria.
‘’Les coiffures en forme de corne font partie des parures de fête de jeunes filles nubiles dont les cheveux sont rasés, à l’exception de ceux qui seront utilisés pour élaborer cette coiffure élégante’’, explique la légende de cet objet d’art nigérian.
Le pouvoir traditionnel – de certains anciens royaumes ouest-africains - est représenté par des objets génialement sculptés, dont le spectre et la canne baoulés, venus de la Côte d’Ivoire. La majesté de ces royaumes est mise en exergue par des sculptures représentant le lion, le crocodile, etc.
La musique est aussi représentée à l’exposition, par des fluettes, sifflets, etc. Là, le guide Lamine Bâ, élève-professeur d’éducation artistique et musicale à l’Ecole nationale des arts (ENA), explique : ‘’La musique, ce n’était pas seulement pour la fête. Elle était présente à la naissance, à l’initiation et pendant les funérailles. C’était un moyen de communication.’’
5 Commentaires
Doff
En Décembre, 2010 (12:57 PM)Wolof
En Décembre, 2010 (13:01 PM)Lebouc
En Décembre, 2010 (13:07 PM)Egare
En Décembre, 2010 (14:06 PM)P M N
En Décembre, 2010 (08:27 AM)Participer à la Discussion