
L'anniversaire du décès de l'étudiant Mamadou Diop, fauché de plein fouet par le tristement célèbre camion-citerne de la police dénommé Dragon, alors qu'il manifestait contre la candidature jugée inconstitutionnelle de l'ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade, a remis au goût du jour le débat sur l'impunité des agents des forces de l'ordre sous nos contrées où la justice peine à se réaliser face aux groupes de pression... Les images révoltantes, reprises par Seneweb Videos, d'un jeune homme, dans la fleur de l'âge, se tordant de douleur sur le bitume en ce funeste crépuscule, agrippé désespérément au pied d'un manifestant venu le soutenir, devraient faire réfléchir par deux fois nos braves hommes de tenue.
Dans le malaise généralisé qui s'était emparé du pays tout entier, par la faute d'un despote (éclairé ?) qui n'en faisait qu'à sa tête dégarnie, ceux-ci s'étaient fait signaler par des bavures en série qui ont mis le Sénégal en émoi, non pas tant par leur nouveauté, que par leur récurrence. Pour la première fois, en l'espace d'une campagne pré-électorale et électorale, pas moins de cinq (5) individus ont été tués par des agents des forces de l'ordre.
Les images télévisées d'un certain capitaine de police, invectivant vertement un député, par ailleurs candidat à la présidentielle, l'arme en joue, sont révélatrices de l'état d'esprit de certains agents des forces de l'ordre, en porte-à-faux avec leur mission régalienne de défendre les citoyens. " Je méprise profondément ceux qui marchent en rang, sous une musique, ils ont un cerveau, dirait-on, mais une moelle épinière leur suffirait amplement ", disait le très pénétrant Albert Einstein, qui en sait long sur les bavures et autres exactions de hommes de tenue.
Cette assertion, loin d'être générale en ces temps où nombre d'entre eux, surtout aux postes de directions, ont reçu une formation de haut niveau et posent tous les jours des actes de haute portée citoyenne, s'applique à tous les hommes de tenue qui, durant ces périodes de surchauffe, faisant preuve d'un zèle aveugle et injustifié quand ils devraient être les garants de la loi (en l'occurrence, le droit à la manifestation est inscrit dans la constitution, ce dont il faut rendre hommage à Gorgui Wade, en particulier en période électorale !).
L'invite, rapportée par la presse, des généraux Abdoulaye Fall et Mamadou Seck, respectivement ancien Cemga et général de brigade de la gendarmerie, au président sortant, Abdoulaye Wade, dès la première publication, qui rechignait à quitter son moelleux fauteuil président et se préparait à un mauvais coup de Jarnac, l'enjoignant à respecter le résultat des urnes est illustratif de la posture républicaine de nombre de militaires, quel que soit le rang. La mise aux arrêts de quinze (15) homme de tenue impliqués dans les meurtres durant la pré-électorale et électorale est un peut-être le signe de nouveaux temps où l'impunité ne sera plus de règle, quand bien même serait-on gardien de l'ordre.
La mort de Mamadou Diop et de tous ceux qui ont succombé aux bavures policières doit servir de leçon à tous ceux qui se croyaient, à un moment ou à un autre, au-dessus de la loi, justement parce qu'ils en sont les garants (sic). Elle ne doit pas rester impunie pour l'histoire politique de ce pays dont la gestation démocratique, malgré les avancées notables, n'en est encore qu'à ses débuts. L'égalité devant la loi de tous les citoyens est une nécessité vitale pour une République, sinon elle cesse d'être la " chose de tous " pour être celle de quelques-uns. On tomberait alors dans les travers de la " République des animaux " de Georges Orwell où " tous les animaux sont égaux, mais il y en a qui le sont plus que d'autres... ".
Par Babacar Guèye
0 Commentaires
Participer à la Discussion