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« ORCHESTRA BAOBAB »… EN TOURNEE EUROPEENNE : Les « papys » de la salsa vous saluent !

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« ORCHESTRA BAOBAB »… EN TOURNEE EUROPEENNE : Les « papys » de la salsa vous saluent !

En 1970, lors de la création de groupe, seul le Miami de Ibra Kassé à la Médina était disponible. Puis est né le Baobab, « version boîte de nuit » à la rue Jules Ferry. A l’époque, la musique cubaine était aussi la musique des jeunes de 15 à 16 ans. D’après vous, quand a eu lieu le renversement de tendance vers le mbalax ?

Barthélémy Attisso : Avant d’aller former l’Orchestra Baobab, dans la boîte de nuit créée par certaines personnalités que vous venez de citer, nos étions au Star Band. Et au Star Band, bien sûr, c’était la Salsa mais nous avons commencé par y introduire les musiques folkloriques que nous adaptions à la musique de danses modernes. Et il y avait Laye Mboup qui avait commencé avec nous. Peu de temps après nous sommes allés au Baobab. Et c’est là-bas que nous avons commencé par vraiment développer la musique traditionnelle adaptée à la musique de danses modernes. Et le mbalax était déjà dans nos répertoires mais avec un style allégé. C’est Youssou Ndour qui a eu le mérite de prendre la chose en main, de la vulgariser et de la développer pour en faire une musique nationale pour qu’on puisse dire qu’il y a une musique sénégalaise digne de ce nom.

A partir de quelle date ?

Balla Sidibé : Aux environs de 1977-78. Mais c’est dans les années 80 que cela a pris de l’ampleur avec Youssou Ndour.

Avant de parler Youssou Ndour, venons en d’abord au Star Band et à Ibra Kassé. Quelle a été l’influence du Star Band sur les musiciens du Baobab ? Attisso : Le Star Band, c’était une école. Disons plutôt le Miami. La boîte de nuit appelée le Miami dont le propriétaire était Ibra Kassé était une école pour la plupart des musiciens de Dakar dont nous même. C’est une véritable école parce la plupart des musiciens sénégalais sont passés par là. Je me rappelle, lorsque nous l’avons quittés pour le Baobab, d’autres générations sont passées comme Youssou Ndour qui est aussi parti former le Super Etoile et d’autres sont passés. Même son fils après.

Sidibé : Pour son fils, c’est récent mais le Miami et le Star Band étaient une véritable école. D’ailleurs moi-même, c’est là-bas que j’ai décidé de faire une carrière musicale parce que j’ai découvert quelque chose dans Ibra Kassé. Il m’a enseigné quelque chose. Des choses que je ne connaissais pas avant. Ibra Kassé dirigeait les musiciens. C’est lui qui choisissait les morceaux. Que ça soit difficile ou non, il te dit tu es obligé de jouer ça. C’est grâce à ça que les musiciens du Baobab sont devenus de grands musiciens. D’ailleurs c’est Ibra Kassé qui a conseillé à Attisso de jouer la guitare solo.

Nous allons y revenir mais te concernant, l’UCAS Jazz de Sédhiou était ta première école ?

Sidibé : J’étais dans l’UCAS à titre bénévole parce que je n’avais rien à faire. Je venais de l’armée. L’UCAS Jazz a été crée en 1959. J’étais jeune. J’écoutais la musique cubaine, la musique congolaise, la musique guinéenne jusqu’en 1964-65 et j’ai intégré l’UCAS de Sédhiou. C’est là-bas que j’ai pris goût. Je me suis dit : « Je fais faire de la musique en attendant autre chose. »1 En 1965, lorsque j’ai quitté l’UCAS pour venir à Dakar, j’ai sillonné des rues, j’entendais la musique cubaine, ça m’est rentré dans le cerveau. Je jouais comme ça de gauche à droite avec des amis et finalement un jour, on a crée un orchestre qui s’appelait Le Standard avec Barthélémy Attisso, Rudy Gomis et moi-même. Je crois depuis ces années 1966-68 Attisso, Rudy Gomis et moi, on a toujours joué ensemble jusqu’à nos jours.

Vous dites avoir fait le tour du monde mais je ne vois aucune trace d’une tournée à Cuba qui est quand même votre principale source d’inspiration. Quelle en est la cause ?

Attisso : Cuba été programmée dans nos tournées mais nous n’avons pas encore été là-bas parce que tout simplement nous ne pouvons pas faire plusieurs choses à la fois. Nous y allons pas à pas. N’oubliez pas que nous avons fait énormément de pays : les Etats-Unis, le Canada, le Mexique, l’Australie, le Japon, la Chine et l’Europe bien sûr mais très peu l’Afrique. Nous n’avons fait que l’Afrique du Sud. Nous avons joué à Johannesburg et au Maroc à deux festivals. Mais qu’en est- il de Cuba ? La programmation a été faite au cours des années passées, mais a dû être reportée pour chevauchement de dates tout simplement. C’est sûr qu’avec le nouvel album qui est sorti, nous allons bientôt partir à Cuba qui est pour nous un pays de référence bien que la musique cubaine ait d’abord été une musique africaine exportée à Cuba et retournée en Afrique. Nous avons maintenant le mérite et l’ambition de l’enrichir avec nos instruments traditionnels et nos rythmes connus comme les plus endiablés du monde.

Alors la musique cubaine et le Sénégal, c’est une longue histoire qui déborde même sur le champ linguistique. Tenez ! Quand on disait à l’époque « typique », c’est comme si on disait « salsa » aujourd’hui ? Parlez-nous de la ferveur Pachanga de l’époque. Le Havanas Club etc. Avez-vous encore des contacts avec eux ?

Sidibé : Vous savez, les gens qui sortaient à l’époque ne sortent plus aujourd’hui. Sauf quand le Baobab joue quelque part, on voit certaines personnes qui viennent avec leurs enfants. Et qui leur disent : « venez écouter ce que c’est la musique. » Le Havanas Club n’existe plus. Le club Baobab n’existe plus. Au Miami, les enfants d’Ibra Kassé ont changé la musique et ça n’a pas marché. A part Alioune Kassé qui fait son petit bout de chemin. Beaucoup de clubs : le Palladium, le Calipso, le Balafon, le Jindeer etc. n’existent plus. Il n’y a que le Just 4 U qui essaye de faire quelque chose mais ce n’ai pas la musique des années 70. Il n’y a que le Baobab qui, s’il n’est pas en tournée, joue au Just 4 U deux samedi le mois. Alors là, c’est l’apothéose puisqu’on voit des jeunes, des moins jeunes qui viennent s’asseoir en nous disant je me sens comme à l’époque, au bon vieux temps.

On parle de déboires financiers pendant votre séjour à Paris. Racontez-nous pourquoi vous vous sentiez obligés de quitter la France ?

Attisso : Vous savez que dans toute entreprise il y a des hauts et des bas. Nous sommes allés à Paris dans cadre d’un contrat pour une production de disques et de spectacles. Un contrat rédigé et signé en bonne et due forme ; et même enregistré. Arrivés sur les lieux, les personnes qui étaient chargées de nous produire et avec qui nous avions signé le contrat ont changé d’avis. Ils ont trouvé que les offres et les engagements qu’ils avaient pris dans le contrat étaient exorbitants par rapport à leurs moyens. Et unilatéralement, ils ont décidés de réviser les clauses du contrat. Finalement, ça a créé d’énormes problèmes parce qu’ils se sont heurtés à une résistance de notre part. Mais finalement ils ont eu le dessus. Il faut dire nous étions en terre étrangère. Nous n’avions pas les moyens de subsistance. Nous étions résignés.

En parlant de moyens financiers, est-ce qu’un orchestre comme le Baobab peut survivre en ne jouant qu’au Sénégal ?

Attisso : D’abord je voudrais souligner que la nouvelle équipe de l’Orchestra Baobab n’est pas une équipe destinée à rester sur place. Actuellement, nous avons opté pour l’extérieur. Et d’ailleurs nous avons commencé. Ce qui nous a valu des tournées internationales qui vont se poursuivre. Nous avons signé des contrats avec une maison de disques et de tournées. Ce qui veut dire que dans le cadre de la promotion d’albums, nous faisons des tournées pour la promotion de ceux-ci. C’est un travail intermittent avec des tournées d’un mois mais parfois deux semaines ou un mois et demi. En quand nous revenons chacun de nous retourne à ses activités. Surtout moi qui ne fait pas seulement de la musique et qui a d’autres occupations que vous connaissez.

A propos de retour du Baobab sur scène, quel a été le rôle de Youssou Ndour ?

Attisso : Je salue ici la grandeur de cœur de Youssou Ndour qui nous a été d’un grand secours. Lorsque nos œuvres étaient piratées et se promenaient de piraterie en piraterie jusqu’à tomber entre les mains de Nick Gold, un producteur anglais, qui nous a actuellement pris en charge, il s’est dit : « mais cette musique-là, ne devait pas disparaître. Il faut nécessairement que je trouve les musiciens qui en sont les auteurs. » Et pour nous trouver, il s’est adressé à Youssou Ndour qu’il connaissait déjà. Et c’est grâce à Youssou Ndour que le lien a été tissé. C’est grâce à Youssou Ndour que nous sommes actuellement avec Nick Gold. Je me souviens aussi de sa disponibilité lors de la réalisation des premiers échantillons d’albums qu’on appelle communément « démo » qui devaient permettre au producteur de nous produire ou pas. C’est Youssou Ndour qui nous a fait ces « démo » dans son studio Xippi à Dakar. Il n’y a pas que ça. Lorsque nous faisions l’album précédent qui est intitulé « Specialist in all styles », Youssou Ndour a encore participé à la réalisation de cet album par des conseils et des suggestions. Il a même joué avec nous dans le titre qui s’appelle « hommage à Ibrahim Ferrer ». Il a aussi, dans cadre du nouvel album. Lorsque nous le lui avons demandé, il a mis son studio à notre disposition pour faire la « démo » de ce nouvel album « Made in Dakar » et pour finalement nous permettre d’enregistrer l’album entier dans ce même studio.

Pour en revenir à la piraterie, peut-on dire que Nick Gold est un pirate qui vaut son pesant d’or pour le Baobab ?

Attisso : Oui. Contrairement au mal que les pirates nous ont fait, Nick Gold nous a rendu le prix de ce que nous valons. Quelque part, nous disons « vive les pirates ! » (Rires) Les pirates nous ont fait du bien cette fois-ci. Parce que grâce aux pirates, nous avons été récompensés. Nous saluons Nick Gold, nous le remercions, nous l’encourageons aussi à œuvrer dans ce sens pour aider les artistes comme il nous a aidés ; surtout ceux qui ont été beaucoup piratés. C’est un Monsieur, qui depuis que nous l’avons connu, a toujours œuvrer pour mener les musiciens à non seulement se développer mais à se faire connaître partout dans le monde. Parce que la plupart des producteurs, selon la pratique en cours, enregistrent les musiciens, produisent des cassettes, les vendent au marché et ça s’arrête là. Aucune promotion et aucune publicité autour du musicien. Je vous rappelle que dernièrement, il y a deux ou trois semaines, Nick Gold était venu à Dakar dans le cadre de la promotion de ce nouvel album avec une quinzaine de journalistes européens rien que dans le cadre de la promotion de ce nouvel album. Mieux, il y a eu une conférence de presse qui avait rassemblé tous les journalistes sénégalais autour de l’orchestre Baobab en présence des journalistes européens. Vous voyez que c’est une entreprise gigantesque. Il faut beaucoup de moyens pour payer le voyage et les frais d’hôtels à toute une équipe de journalistes. Actuellement, Balla et moi voyageons dans le cadre d’une promotion. Nos avons fait Paris, Amsterdam, Bruxelles et aujourd’hui nous sommes à Cologne. Et nous avons rencontré près d’une quarantaine de journalistes auxquels nous avons donné des interviews sur la vie de l’orchestre et son évolution. Vous voyez ! Ça permet aux musiciens d’être connus. Si demain, nous ne sommes plus avec ce producteur, il aura au moins beaucoup fait pour nous afin de nous faire connaître dans le monde entier.

Parlons de musique tout simplement. Quand vous jouez au mariage de la fille de Pierre Cardin ou à la remise du prix Nobel de la paix à Stockholm, proposez-vous la même musique que dans une boîte de nuit telle que le Just 4 U à Dakar ou jouez-vous une musique spéciale pour ces gens-là ?

Sidibé : Non ! On joue le répertoire du Baobab. Nous, quand on joue quelque part, on ne se dit pas qu’on va jouer telle ou telle musique pour que ces gens-là dansent. On répète nos morceaux et on les joue. Maintenant, c’est aux mélomanes de trouver leurs repères. Tous les morceaux qu’on joue, les Européens le dansent. Le baobab n’a jamais joué à un concert sans que les gens ne dansent. Et pour preuve, une fois on est parti en Espagne et le promoteur nous dit : « je suis inquiet. » On lui demande pourquoi. Il répond : « parce que cette salle n’est jamais remplie et les gens ne dansent pas. Peu importe l’orchestre qui passe, les gens ne dansent pas. » Même les Sénégalais qui étaient à Madrid nous disaient : « dans cette salle personne ne danse. » On a dit d’accord. Le soir, on était dans la loge et le promoteur est venu en courant les larmes aux yeux. Quand je lui ai demandé : « qu’est-ce qu’il y a », il m’a répondu : « Sidibé, c’est incroyable. Il y a plus de monde à l’extérieur qu’à l’intérieur. Il y a des gens qui ont des billets et ne peuvent pas rentrer. La salle est pleine. Que dois-je faire ? C’est extraordinaire ! » Et au paravent, il nous avait dit qu’il avait fait un sondage pour le choix du Baobab ou d’un orchestre cubain. Mais à l’unanimité, les Espagnols lui ont dit : « on veut voir le Baobab. Un orchestre qui joue la salsa, mais qui chante dans d’autres langues que la nôtre. » Comme ce que disait Attiso, on dit bravo aux pirates. Parce qu’en nous piratant, ils ont fait notre promotion. On nous a piratés et Dieu nous faisait attendre qu’on devienne connu dans le monde entier pour récolter le fruit de votre peine. Bizarrement, depuis qu’on a commencé nos tournées, nos concerts sont toujours sold out (complets) dans tous les pays. C’est pour cela que j’ai dit aux journalistes à Dakar, qu’on était plus connu à l’extérieur qu’à l’intérieur du Sénégal.

Il y en a deux femmes qui ont chanté pour Le Baobab en 1985. Qui sont-elles ? Et pourquoi on n’en parle jamais ?

Sidibé : Non, ça c’est Natou Sarr et Ndèye Seck qui ont chanté « Ndamé Lo » qui a eu du succès. Lorsque tous les anciens sont partis, il ne restait plus que Balla Sidibé et Charly Ndiaye. On a essayé de récupérer quelques jeunes guitaristes qui voulaient jouer comme Attisso. Donc Ass Diouf qui est devenu le soliste d’Ismaïla Lo et Adama Sarr qui est le soliste de Thione Seck. Ils ont fait du mbalax. On leur a dit, les instruments nous appartiennent et l’on est plus âgé que vous. On va rester derrière et vous allez faire votre musique. C’est le nom qui restait, pas la musique. C’était autre chose. En 1987, on était à Paris pour un contrat de deux mois.On a fait une cassette là où il y a le morceau « Ndamé Lô » qui a eu du succès. Malheureusement, les jeunes, quand on les applaudit une fois, ils ne se sentent plus. Ils n’ont pas su gérer ce succès. (A suivre).

 



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