
Une mosquée chiite d’un village de l’est de l'Arabie saoudite a été la cible, vendredi 22 mai, d’un attentat-suicide meurtrier. À peine les corps des victimes évacués, les habitants sont sortis dans la rue pour dénoncer les autorités saoudiennes, qu’ils accusent d’avoir laissé prospérer les discours haineux contre la communauté chiite. Témoignage de notre Observateur sur place.
L’explosion s'est produite à l'heure de la grande prière du vendredi, dans la localité Koudeih, située au nord de la ville de Qatif, dans la province orientale où vivent la majorité des chiites d’Arabie saoudite. L’attentat a fait au moins 20 morts.
Notre Observateur Mohammad Alsaeedi vit à Qatif. Il s’est rendu à la mosquée quelques minutes seulement après l’attentat.
La communauté chiite s’attendait ces dernières semaines à être visée par un attentat. La seule surprise, c’est que cette attaque a eu lieu dans une petite mosquée de 200 personnes et non à Qatif, à seulement quatre kilomètres de là, où les célébrations chiites rassemblent régulièrement des milliers de personnes dans les rues.
Quelques minutes à peine après l’attentat, des dizaines d’habitants se sont spontanément rassemblés à l’entrée de la mosquée et ont entonné des chants à la mémoire des victimes.
L’ambiance était tendue. Quand les forces de l’ordre ont déployé des véhicules blindés autour de la mosquée, les gens ont demandé aux officiers de se retirer pour ne pas attiser les tensions. Les policiers ont accepté de partir.
Le gens ici en veulent aux autorités et disent que des mesures doivent être prises pour stopper les discours incitant à la haine des chiites qui, depuis le début de l’offensive contre les rebelles houthis chiites au Yémen, ont prospéré dans les médias et les mosquées.
Rien qu’au mois de mai, le journal local "Al-Yaoum", pourtant diffusé dans une région à majorité chiite, a publié deux articles truffés d’insultes envers la communauté chiite. [À la suite de cette publication, des boites de distribution du journal ont été jetées dans des bennes à ordures à al-Qatif le 4 mai dernier, NDLR].
Dans la province de Najrane, située à la frontalière avec le Yémen [sud-ouest] - où des combats ont régulièrement lieu entre l’armée saoudienne et les rebelles houthis - des discours haineux ont également fleuri dans les mosquées ces dernières semaines.
Les autorités ont récemment envoyé des dizaines d’imams dans cette région, officiellement pour remonter le moral des gens. Mais ces imams ont multiplié les prêches contre les chiites de Najrane, qui constituent pourtant la majorité de la population. Dans les mosquées, ils ne cessent de traiter les chiites de traîtres à la nation, les accusant d’être des complices des rebelles houthis, sans que les autorités ne lèvent le petit doigt.
C’est la deuxième fois en deux ans que la province orientale est visée par des attentats contre des chiites. En novembre 2014, des hommes encagoulés avaient tiré à la Kalachnikov sur un groupe qui célébrait la fête de l’Achoura dans un village près de la ville d’Ihsa, faisant cinq morts.
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