Des soldats mutins ont ouvert le feu samedi sur la résidence du président guissau-guinéen Joao Bernardo "Nino" Vieira, annonce dimanche le président sénégalais Abdoulaye Wade. Le chef d’état-major de l’armée, le général Batista Tagme Na Wai a déclaré que cinq mutins avaient été arrêtés et que la situation était maîtrisée à Bissau, où le calme était revenu dimanche matin après l’attaque, qui a duré plusieurs heures.
Le ministre de l’Intérieur Cipriano Cassama a précisé de son côté qu’un garde du corps de Vieira avait été tué durant l’assaut et un autre blessé. Mais le président et sa famille sont sains et saufs, a dit le représentant spécial de l’Onu en Guinée-Bissau, Shola Omoregie, qui rendu visite à Vieira.
Selon des témoins, la façade de la résidence présidentielle, dans le quartier de Tchon de Pepel, était criblée d’impacts de balles de mitrailleuses et de roquettes. Un obus de mortier à même transpercé sa toiture.
Le président sénégalais Abdoulaye Wade a déclaré à Radio France Internationale avoir reçu dans la nuit un coup de téléphone de Vieira faisant état de tirs de soldats sur sa résidence.
Wade a déclaré avoir dépêché des soldats sénégalais à la frontière et avoir mis à la disposition du président bissau-guinéen un avion en vue de l’évacuer ainsi que sa famille. Mais il a précisé que Vieira avait décliné l’offre.
Wade a invité les militaires bissau-guinéens à regagner leurs casernes. Cipriano Cassama, le ministre de l’Intérieur, a affirmé que le pays, l’un des plus pauvres de la planète, ne pouvait plus se permettre les coups d’Etat et mutineries qui ont émaillé son histoire récente.
L’Union africaine a exprimé son inquiétude devant ces violences, qui interviennent à la suite de la publication vendredi des résultats des élections législatives du 16 novembre dans l’ex-colonie portugaise.
Ce scrutin, qui s’est déroulé dans le calme, s’est soldé par une claire majorité pour le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et des îles du Cap-Vert (PAIGC), l’ancien mouvement de libération fondé par Amilcar Cabral.
"NARCO ÉTAT"
Le PAIGC, qui avait quitté en juillet le gouvernement d’union nationale de Vieria, a obtenu 67 sur 100 lors de ces élections, que les observateurs internationaux ont jugées "libres, équitables et transparentes".
Le Parti du renouveau social (PRS), qui s’appuie sur l’ethnie Balante et jouit de l’appui des chefs de l’armée, a obtenu pour sa part 28 sièges de députés, mais son leader, l’ancien président Koumba Yala, a contesté la régularité du scrutin.
Celui-ci a été marqué par la défaite du Parti républicain pour l’indépendance et le développement (PRID), formation se réclamant du président de Vieira, créée pour l’occasion et emmenée par l’ancien Premier ministre Aristides Gomes.
Koumba Yala, renversé en 2003 par un coup d’Etat et candidat malheureux face à Vieira lors de la présidentielle de 2005, a réclamé une enquête internationale sur le trafic de drogue sous la présidence actuelle. Il a dit avoir échappé de peu vendredi à son arrestation par la police secrète.
Ces dernières années, la Guinée-Bissau, ses îles, ses côtes et son arrière-pays sont devenus l’une des étapes privilégiées des barons colombiens de la drogue pour faire parvenir leur production de cocaïne jusqu’au marché européen, via les vastes étendues sahariennes.
Vieira, qui a présidé le pays de 1984 à la fin des années 1990 et a connu l’exil avant de revenir au pouvoir en 2005, doit remettre son mandat en jeu en 2010.
Les organismes internationaux de lutte contre la drogue ont tiré la sonnette d’alarme, craignant que l’ancienne colonie portugaise, où l’argent du trafic de la cocaïne est de plus en plus visible, ne se transforme rapidement en "narco-Etat".
Le chef de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Antonio Mazzitelli, a déclaré récemment à Reuters qu’il espérait que la pression internationale pousserait le nouveau gouvernement à procéder à un ’grand nettoyage’ en "débarrassant le pays de la drogue et de l’argent du crime". L’Express
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