Au Japon, Hiroshima commémore ce 6 août le 75e anniversaire du premier bombardement atomique de l’histoire. Il sera suivi d’un second à Nagasaki trois jours plus tard. Aujourd’hui, Hiroshima lutte contre l’oubli. Les derniers survivants atomisés, les « hibakusha », s’éteignent. Leur moyenne d’âge est de 85 ans. Cette année, dans son combat contre l’oubli, Hiroshima est par ailleurs victime de la pandémie de coronavirus.
La pandémie de coronavirus domine les peurs des Japonais jusqu’à leur faire presque oublier Hiroshima. La plupart des cérémonies du souvenir du bombardement atomique sont annulées. Le virus empêche les écoliers japonais de visiter en groupe le Parc de la paix, son mausolée érigé à l’épicentre de la déflagration, son « musée de l’horreur » atomique. Le virus confine aussi chez eux ou dans des hôpitaux de la ville les derniers « hibakusha » ou atomisés encore en vie. La plupart n’ont plus la force de raconter ce qu’ils ont vécu.
Pour préserver le récit des victimes atomisées et lutter contre l’oubli, la municipalité d’Hiroshima a lancé un projet de successeurs d’hibakusha. Il s'agit d'hommes et de femmes qui ont établi depuis des années une relation avec des survivants de la bombe. Ils recueillent leurs récits, pas seulement des faits, mais aussi leurs émotions, les souffrances qu’ils ne peuvent exprimer. Ces successeurs transmettent la mémoire des atomisés à la mort de ces derniers. Pour les Japonais les plus jeunes, Hiroshima n’est plus qu’une page d’histoire qu’on apprend à l’école, en gommant parfois ce qui a précédé, comme les atrocités de l’armée impériale japonaise durant la guerre.
Un Japon doté de l'arme nucléaire ?
Les bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki ont engendré au Japon un mouvement pacifiste en faveur de l’abolition de l’arme nucléaire. Le Premier ministre Shinzo Abe cherche, lui, à réviser la Constitution pacifiste. Dans leur majorité, les Japonais tiennent encore à leur Constitution écrite d’une main américaine à la fin de la guerre. Ils dépendent pour leur sécurité du parapluie nucléaire américain.
Mais le Japon, premier pays atomisé du monde, n’a toujours pas signé le traité de l’ONU sur l'interdiction des armes nucléaires. L’érosion de la mémoire d’Hiroshima sert Shinzo Abe. Le Premier ministre se veut réaliste. Il est confronté à la menace nucléaire de la Corée du Nord, mais aussi de la Chine. Son parti propose d’acquérir des capacités de frappe défensive contre des attaques de missiles nord-coréens. Shinzo Abe veut faire du Japon un pays comme les autres, doté si nécessaire de l’arme nucléaire.
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