Les 176 victimes du crash à Téhéran ont désormais un nom et un visage. L’Iran paie le plus lourd tribut avec 82 ressortissants décédés, mais de nombreux étudiants canadiens comptaient aussi parmi les passagers, ainsi que des familles avec enfants, deux couples de jeunes mariés et un autre à jamais séparé en raison d’une erreur de billet. Un homme rapporte en outre que son épouse aurait eu un mauvais pressentiment avant le décollage.
Sheyda Shadkhoo a appelé son mari à Toronto vingt minutes avant de partir, au terme d’une visite à sa mère et ses soeurs. Elle cherchait à être rassurée. L’homme a été surpris de l’appel. “Elle se faisait du souci au sujet des tensions nées suite à la mort du général Soleimani. Elle voulait m’entendre dire qu’il n’y aurait pas de guerre. J’ai répondu qu’elle ne devait pas s’inquiéter, que rien ne se passerait.”
En légende d’un selfie sur Instagram, Sheyda a décrit son angoisse. “Elle a dû avoir un pressentiment. Voyez l’expression sur son visage”, montre Hassan. “Je pars. Mais ce que je laisse derrière moi m’inquiète. J’ai peur de ce qui attend les gens ici”, a-t-elle écrit dans son dernier message.
“C’était un ange. Je voudrais ne plus exister non plus”, confie Hassan, son mari depuis dix ans.
La catastrophe a aussi pris son épouse à Mohsen Ahmadipour, qui n’a pas pu embarquer à cause d’un ticket non valide, ayant apparemment annulé une partie de son voyage par erreur quelques jours plus tôt. Sa femme, Rouja Azadian, a elle pris place dans l’avion. Il devait la rejoindre plus tard à bord d’un autre appareil. Le couple, marié en 2014, était en Iran pour une visite familiale.
Saeed Tahmasebi, étudiant de l’Imperial College, était lui sur le chemin du retour vers Londres, avec sa femme. “Saeed était un étudiant brillant, ses contributions perdureront longtemps. Son histoire montre la persévérance dont doivent faire preuve les étudiants iraniens pour réussir à l’étranger”, commente la chercheuse Shirin Hakim.
Delaram Dadashnejad aurait dû repartir vers Vancouver dès le 17 décembre, mais elle a raté son vol et a été retenue en raison d’un problème lié à son visa d’étudiante. “Elle m’a montré sur FaceTime le bracelet qu’elle voulait acheter pour ma femme. C’était sa meilleure amie”, regrette Sia Ahmadi. “En apprenant la nouvelle, je n’y ai pas cru. Une fille si populaire”.
L’université de Guelph a perdu deux étudiants: Milad Ghasemi et Ghanimat Azhdari. Le compagnon de cette dernière est décédé aussi.
rash Pourzarabi et Pouneh Gourji étudiaient à Edmonton. Ils étaient en Iran pour se marier. Quatre des invités de la fête ont également péri dans le crash.
Siavash Ghafouri-Azar, spécialiste informatique chez Pratt and Whitney, et Sara Mamani, ingénieure chez Bombardier, venaient aussi de se dire “oui”.
Ardalan Ebnoddin Hamidi, sa compagne Niloofar Razzaghi et leur fils adolescent Kamyar avaient eux profité de deux semaines de vacances. Ils devaient rentrer à Port Coquitlam, au Canada.
Hamed Esmaeilion a perdu sa femme et sa fille. “Ce qui s’est passé est injuste. J’ai dû appeler son école pour prévenir qu’elle ne reviendrait plus”, expose-t-il.
Ayeshe Pourghader tenait une boulangerie perse à Vancouver, où sa fille Fatemah Pazavand donnait parfois un coup de main. “Elles attendaient avec impatience de devenir citoyennes canadiennes”, rapporte un voisin. “Elles me demandaient régulièrement si elles pouvaient utiliser mon ordinateur pour voir l’évolution de leur dossier d’immigration. Elles étaient venues au Canada pour une meilleure vie, et maintenant voilà ce qui est arrivé.”
Mohammad Hossein et Zeynab Asadilari étaient des frère et soeur d’origine canado-iranienne. “Elle aimait voyager et explorer le monde”, selon des amies. “On ne sait absolument pas que faire. Deux jours plus tôt, on échangeait encore des sms et elle était active sur les réseaux sociaux, et soudain elle n’est plus là.”
Le crash du Boeing d’Ukraine Airlines International est survenu mercredi peu après des tirs de missiles sur des bases utilisées par l’armée américaine en Irak. L’avion pourrait avoir été abattu par un missile sol-air iranien, peut-être par erreur. La thèse du missile est notamment appuyée par une vidéo. Une cinquantaine d’experts ukrainiens sont arrivés jeudi à Téhéran pour participer à l’enquête et au décryptage des boîtes noires de l’appareil.
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