Le CIO a déjà cédé. Dès 1996, aux JO d'Atlanta, le CIO autorisait
l'entrée dans le stade olympique de la première athlète en tenue
islamiquement correcte couvrant entièrement son corps. Résultat, une
épidémie de costumes islamiques : en 2008 aux JO de Pékin quatorze
délégations défilaient avec des femmes ainsi vêtues. L'athlète du
Bahreïn, Rakia Al-Gassra ne faisait d'ailleurs pas mystère du caractère religieux de sa tenue.
La débandade du CIO devant le chantage islamique fait peu de cas du
courage des glorieuses médaillées d'Afrique du Nord, la marocaine Nawal
El Moutawakel et l'algérienne Hassiba Boulmerka
qui ont bravé la menace des intégristes et ont couru, comme les autres,
bras et jambes nus avec le costume règlementaire devenant ainsi des
modèles pour la jeunesse de leur pays.
LA FIFA COMMENCE PAR RÉSISTER…
Invoquant la loi 4 de son règlement, la FIFA exclura l'équipe de foot
féminine d'Iran quelques semaines avant les premiers Jeux olympiques de
la jeunesse à Singapour (août 2010). Face aux menaces de représailles
des pays islamiques le président de la FIFA se ravisera et acceptera un
"compromis" parfaitement hypocrite : les joueuses seront couvertes de la
tête aux pieds, à l'exception des oreilles et du cou…
Ce compromis ne sera pas respecté : au printemps 2011, en Jordanie,
lors des épreuves qualificatives pour les JO de Londres, l'équipe d'Iran
se présentera totalement couverte de la tête aux pieds. Le représentant
local de la FIFA décide de l'exclure.
C'est dans ce contexte que le vice-président de la FIFA, qui se trouve être
l'un des frères du roi de Jordanie, organisera à l'automne 2011 un
séminaire à Amman, dont la conclusion sera que le hijab "n'est pas un
signe religieux mais un signe culturel". Il ne remet donc pas en cause
la règle ! Conclusion approuvée par la Commission exécutive de la FIFA à
Tokyo, en décembre 2011.
LE CONTOURNEMENT DE LA RÈGLE EN CATIMINI
Il ne restait plus qu'à faire entériner
la chose le 3 mars, lors de la réunion annuelle de la puissante IFAB
(International Football Association Board), seule instance habilitée à
se prononcer sur les règles du football.
Pour éviter
toute mauvaise surprise, le sujet ne sera pas inscrit à l'ordre du
jour de la réunion sous la rubrique : "points nécessitant une décision"
(ce qui aurait impliqué une analyse des enjeux du contournement de la
règle), mais dans : "questions diverses", sous un libellé sibyllin.
Cerise sur le gâteau, le conseiller spécial sport auprès du secrétaire général des Nations unies, Wilfried Lemke,
mu par un élan spontané, rendit publique la veille de la réunion de
l'IFAB, sous forme d'un communiqué des Nations unies, la lettre qu'il
venait d'adresser au président de la FIFA dans laquelle il prônait l'autorisation du hijab sur les terrains de sport !
Au-delà de la question du hijab, ce qui est en cause c'est le peu de
considération portée à un sujet impliquant le droit des femmes. Comme
l'écrit la philosophe Geneviève Fraisse dans une tribune remarquable parue dans Le Monde : "Refusons
le déni politique, le rejet de l'importance du port du voile. Car en
matière de féminisme, c'est courant, c'est même un argument clé de la
domination masculine ; passez votre chemin, il n'y a rien à voir ; que du futile, du privé, de l'anecdotique.
"
Une façon de dire que lorsqu'il s'agit des femmes, point n'est besoin de mettre en œuvre les véritables mécanismes de prise de décision, ni même de faire semblant de les mettre en œuvre. Il faut dire
(à la décharge ?) des Nations unies et de la FIFA que les intérêts
économiques (un marché de millions de costumes sportifs islamiquement
corrects) et idéologiques (une tribune internationale pour les tenants
de l'islam politique), sont considérables. Que pèsent les valeurs du
sport face à cette réalité ?
EN SPORT COMME EN POLITIQUE, L'UNIVERSALITÉ NE S'APPLIQUE PAS AUX FEMMES
A l'image de la Convention des Nations unies pour l'élimination des
discriminations à l'encontre des femmes (CEDAW) – qui était censée prôner
l'universalité des droits, mais qui est en fait gangrénée par les
"réserves" des Etats au nom de la culture et de la religion – le monde
du sport rompt avec l'unicité de la règle sur le conseil d'un haut
fonctionnaire des Nations unie qui se permet d'interférer avec des décisions relevant de dirigeants sportifs souvent plus sourcilleux de leur indépendance.
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