Faut-il désespérer des dirigeants africains ? Malgré les nombreuses promesses non tenues du G8 et du G20, ils ont déféré, à l’exception du président égyptien, à l’invitation du Premier ministre du Canada Stephen Harper comme des ‘enfants du quartier invités à une offrande d’une maman pour conjurer le mauvais sort’. Le Premier ministre du Canada voulait réussir son sommet en permettant, pour quelques heures seulement, aux dirigeants africains invités d’assister à une session spéciale du G8 pour leur dire comment il a pu réussir à rallier ses homologues des pays riches à la cause des femmes et des enfants des pays pauvres. Pas de temps pour parler d’autre chose comme des promesses jamais tenues. Alors, fallait-il comme Abdoulaye Wade louer un avion de Dakar à Montréal pour presque un coût envoisinant une cinquantaine de millions de francs Cfa ? Peut-être s’asseoir entre Obama et Sarkozy pour le plaisir historique et honorifique en valait le déplacement.
Il reste que comme Abdoulaye Wade, les autres dirigeants africains invités au sommet ne se sont pas offusqués des engagements non tenus par le G8. A leur place, ce sont des organisations non gouvernementales qui sonnent la charge. Oxfam Canada déplore les promesses non tenues. La liste est longue : 50 milliards de dollars supplémentaires par an pour l’aide publique au développement d’ici à 2010 (promesses du G8 de 2005), accès universel aux traitements contre le Vih pour 2010 (2006), 60 milliards pour la santé (2007), 22 milliards de dollars sur l’agriculture et la sécurité alimentaire (2009)… Aucune allusion sur ces points n’a été faite lors du G8 ni du G20.
La déclaration finale du G20 est d’une platitude criarde pour l’Afrique. ‘Nous sommes résolus à combler le fossé du développement, et nous devons tenir compte des incidences de nos mesures stratégiques sur les pays à faible revenu. Nous allons continuer de soutenir le financement du développement, y compris par de nouvelles approches qui encourageront ce financement en provenance de sources tant publiques que privées’, ont indiqué les dirigeants du G20. Ces derniers d’ajouter que ‘la crise aura des incidences à long terme sur les trajectoires de développement des pays pauvres dans toutes les régions du monde. Parmi ces effets, les pays en développement auront probablement plus de difficultés à obtenir du financement de sources tant publiques que privées’.
La vision pour les pays pauvres se décline alors pour le G20 en ces termes : ‘Bon nombre d’entre nous ont déjà pris des mesures pour corriger cette lacune, en mettant en œuvre des approches novatrices concernant le financement, par exemple des mécanismes de garantie de marché, le Projet de financement des Pme et les récents progrès en matière d’inclusion financière. Les pays à faible revenu ont le potentiel voulu pour contribuer à une croissance mondiale plus forte et plus équilibrée, et devraient être vus comme des marchés pour l’investissement’.
Pour Oxfam, ‘la priorité est de tenir les engagements déjà pris, de présenter des plans de rattrapage et les moyens détaillés d’y parvenir, y compris avec des financements innovants. C’est une question de crédibilité’. Un des dirigeants de l’Ong note que ‘cette année, le sujet phare est la santé maternelle. L’année dernière, en Italie, c’était la crise alimentaire. Chaque année, les pays du G8 prennent une nouvelle initiative. Mais avec la stagnation de l’aide globale, ils ne font que déplacer l’argent. Les seuls fonds additionnels proposés par le Canada, 1,1 milliard sur cinq ans, correspondent au coût de l’organisation du sommet sur trois jours !’ Encore que si le Canada s’est félicité de la réussite de son initiative sur la santé des mères et des filles, la définition de la méthodologie reste une équation majeure. Le Canada qui contribue à hauteur de 22 % souhaite que ses homologues définissent un carnet de route précis avec des décaissements à définir. Le hic, c’est qu’il sera laissé à chaque donateur l’appréciation propre des stratégies à définir. Beaucoup de spécialistes critiquent cette approche, tout comme ils ne sont pas convaincus de l’efficacité de la création d’un fonds chargé strictement de la gestion de cette initiative. L’Afrique n’est guère sortie de l’auberge.
Seulement, les organisations non gouvernementales ont été unanimes à condamner la faiblesse de l'engagement des pays riches. Elles demandaient un engagement de 24 à 30 milliards pour la même période de temps. L'engagement du Canada de 1,1 milliard en cinq ans, est aussi inférieur au coût des sommets du G8 et du G20 (évalué à 1,2 milliard) qui ont duré trois jours. Mais la réalité est que l’Afrique est loin d’être la préoccupation des dirigeants du Nord et surtout du G8 qui restent encore confrontés aux défis de la relance économique après la crise de 2008.
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