Le Premier ministre a dévoilé ce mercredi 11 décembre sa réforme des retraites et les compromis auxquels l'exécutif est prêt pour tenter de calmer la colère, lors d'une septième journée de mobilisation sociale.
« Le temps est venu de construire un système universel de retraites. » Le Premier ministre Édouard Philippe s’est exprimé devant le Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour y présenter « l'architecture » de la réforme des retraites. Celle-ci vise à fondre les 42 régimes de retraite actuels (spéciaux, fonctionnaires, salariés du privé, libéraux, artisans, agriculteurs...) en un seul système universel par points.
« Il n’y a pas d’agenda caché, nous ne cherchons pas à faire de petites économies ici ou là », a affirmé le Premier ministre, pour qui la refonte du système des retraites n’est pas une « bataille ». « Il n'y aura ni vainqueur, ni vaincu », a-t-il encore promis.
Un régime universel à points avec une règle d'or
Il s'agira d'un « système en points et non en trimestre : chaque heure travaillée ouvrira des droits, a assuré Édouard Philippe. Nous nous engageons à ce que la valeur du point ne soit pas fixée à la sauvette, au gré des difficultés budgétaires. Nous demanderons aux partenaires sociaux de fixer sa valeur et son évolution. La loi prévoira une règle d’or pour que la valeur des points acquis ne puisse pas baisser. Elle ira au-delà en prévoyant une indexation progressive non pas sur les prix, mais sur les salaires. »
Les régimes spéciaux seront progressivement supprimés
« Le temps du système universel est venu, celui des régimes spéciaux s'achève », a affirmé le Premier ministre, en référence aux nombreux « régimes spéciaux » qui permettent à certaines professions en France de partir plus tôt à la retraite. Parmi eux, les cheminots de la SNCF et les conducteurs de la RATP, mais aussi les avocats, les professions libérales...
Autant de régimes auxquels Édouard Philippe veut mettre fin, mais « progressivement, sans brutalité, avec respect », a-t-il temporisé en direction des syndicats, qui s'opposent dans leur grande majorité au projet gouvernemental.
Le nouveau système s'appliquera aux Français nés en 1975 et après
« Pour les personnes déjà dans la vie active, nous avons choisi de ne rien changer pour celles qui sont à 17 ans de la retraite. Autrement dit, celles nées en 1975 ne seront pas concernés par le système universel », a assuré le Premier ministre.
Quant aux nouveaux venus sur le marché du travail, « la génération 2004 »sera la première concernée par la réforme, c'est-à-dire que les Français qui auront 18 ans en 2022 intégreront directement le nouveau système.
« Nous conserverons 100% des droits acquis dans les régimes actuels, a promis le chef du gouvernement. Seules les années travaillées à partir de 2025 seront régies par le système universel. La première génération concernée, celle de 1975, aura donc encore 75% de sa retraite calculée selon l’ancien système. »
Minimum vieillesse à 1 000 euros par mois
« Nous garantissons une pension minimale de 1 000 euros net par mois pour une carrière complète au SMIC. » C'est, a souligné le Premier ministre « une conquête pour les agriculteurs et les artisans. »
Il a précisé que ce minimum de pension serait « garanti par la loi à 85% du SMIC dans la durée et évoluera comme celui-ci ».
L'âge légal de la retraite à 62 ans, avec un « âge d'équilibre à 64 ans » et un système de bonus-malus
Pour Édouard Philippe, « la seule solution [pour sauver le régime des retraites], c’est de travailler un peu plus longtemps, comme c’est le cas partout en Europe, et un peu partout dans le monde. Nous maintiendrons l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans. Sans les y forcer, nous allons devoir inciter les Français à travailler plus longtemps. » La réforme va « instaurer au dessus de l'âge légal un âge d'équilibre avec un système de bonus-malus. L'âge d'équilibre, fixé à 64 ans, devra entrer en vigueur en 2027. »
« 64 ans est l'âge moyen auquel les salariés partiront à la retraite dans 5 ans, a rappelé le Premier ministre. Cette date est déjà un horizon raisonnable pour la majorité des Français. »
« Les personnes qui ont commencé à travailler tôt, avant 20 ans, pourront continuer de partir deux ans avant les autres. Le futur système tiendra également compte de ceux qui, pour des situations de handicap, ne peuvent travailler comme les autres. Les personnes exerçant des métiers usants pourront partir deux ans plus tôt que les autres. Le compte pénibilité sera ouvert au service public, notamment aux hôpitaux. »
5% de majoration dès le premier enfant, 2 % supplémentaires par enfant pour le familles nombreuses.
La réforme accordera une « majoration de 5% par enfant dès le premier enfant », a annoncé Édouard Philippe. « Nous améliorerons le système des réversions. Si nous nous engageons dans un âge d’équilibre, nous pourrons abaisser la borne des 67 ans qui est l’âge de la décôte, pour permettre aux femmes qui ont des carrières heurtées de partir plus tôt, à taux plein. 80 000 femmes chaque année sont contraintes d’attendre 67 ans pour liquider leur retraite. Elles pourront à terme toucher leur pension 2 à 3 ans plus tôt qu’aujourd'hui. »
Le niveau des pensions des enseignants sera « sanctuarisé »
« Nous inscrirons dans la loi la garantie selon laquelle le niveau des retraites des enseignants sera sanctuarisé et comparable au niveau des retraites des fonctions ou des métiers équivalents dans la fonction publique », a déclaré le Premier ministre.
« Nous engagerons avant la fin du quinquennat les revalorisations nécessaires pour maintenir le niveau des pensions » des enseignants, « nous le ferons progressivement et nous commencerons dès 2021 », a-t-il également assuré.
Même niveau de cotisation jusqu'à 120 000 euros de revenus
Le chef du gouvernement l'a assuré : les Français paieront un « même niveau de cotisation » sur « la totalité des revenus jusqu'à 120 000 euros ». Au-dessus, la « cotisation de solidarité plus élevée qu'aujourd'hui », a soutenu Édouard sans donner d'autre précision.
La « gouvernance » de la réforme confiée aux partenaires sociaux
Le « retour à l'équilibre financier » sera confié aux partenaires sociaux, a promis Édouard Philippe, en appelant à « ne pas fuir nos responsabilités en renvoyant au-delà du quinquennat les mesures nécessaires. »
« Si les partenaires sociaux s'entendent sur une telle trajectoire, le gouvernement la prendra à son compte », a ajouté le Premier ministre, qui a annoncé dès l'année prochaine la mise en place d'une « gouvernance » qui « leur confiera les principaux leviers », afin de « prendre des décisions qui seront mises en oeuvre dès le 1er janvier 2022 ».
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