
Le Sénégal et le Tchad ont signé, vendredi à Dakar, un accord de coopération judiciaire devant faciliter le déplacement en territoire tchadien des magistrats des chambres africaines pour le procès de Hissène Habré.
''Il est important de retourner dans le
pays où les crimes internationaux ont été commis sur le territoire du
Tchad durant la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990. Ces
déplacements permettront au procureur et aux magistrats de rassembler
les éléments nécessaires pour l’enquête’’, a déclaré Aminata Touré,
ministre sénégalais de la Justice.
S’exprimant lors de la signature de l’accord de coopération, Mme Touré a
estimé que ‘’cet acte est à la fois symbolique, historique et important
dans cette lutte contre l’impunité que nos gouvernements respectifs
mènent avec détermination.’’
‘’Vous ne perdez pas de vue qu’une telle habilitation [les déplacements
des magistrats] est indispensable à ces juges qui, dans
l’accomplissement de cette mission, ne peuvent éluder les enquêtes et
autres investigations qu'en territoire tchadien’’, a estimé le ministre
de la Justice.
Pour le ministre tchadien de la Justice, Jean-Bernard Padaré, cette
enquête redonnera de l’espoir aux victimes. ''Les victimes des crimes
commençaient à perdre espoir que le jugement puisse avoir lieu un jour.
Cet accord de coopération pour la poursuite des crimes internationaux
sur notre territoire redonnera l’espoir à toutes les victimes’’, a-t-il
souligné.
M. Padaré, qui a également réitéré l’engagement total du Tchad, aux
côtés des victimes, a assuré que toutes les dispositions nécessaires
seront mises en place pour que les équipes puissent mener à bien le
travail.
Les activités des Chambres africaines extraordinaires, créées au sein
des juridictions sénégalaises pour juger les crimes commis au Tchad sous
l’ère Habré, ont été lancées le 8 février à Dakar.
Quatre magistrats composent la Chambre d’accusation : Assane Ndiaye,
André Bop Sène, Lamine Sow, Hippolyte Anquédiche Ndèye. Le parquet
général est dirigé par Mbacké Fall, assisté de Youssoupha Diallo, Anta
Ndiaye Diop et Moustapha Ka.
La Chambre d’instruction est composée de magistrats Jean Kandé,
Souleymane Téliko, Absatou Ly Diallo, Barou Diop, Abdou Aziz Diallo et
Oumar Sall.
La mise en place des Chambres africaines extraordinaires fait suite à la
résolution 401, adoptée le 31 janvier 2012 par la conférence des chefs
d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine (UA).
Cette résolution demande au gouvernement du Sénégal d’examiner les
modalités pratiques ainsi que les implications juridiques et financières
pour la suite des crimes internationaux commis sur le territoire
tchadien durant la période du 7 juin 1982 au 1er décembre 1990.
L’ancien président tchadien, qui vit en exil à Dakar depuis sa chute
après huit ans de pouvoir au Tchad (1982-1990), est accusé de crimes
contre l’humanité, crimes de guerre et tortures. Selon des ONG, 40.000
personnes auraient été tuées durant sa présidence.
Pour son jugement, le gouvernement sénégalais et l’UA ont signé un
accord pour la création au Sénégal d’un tribunal spécial. L’accord a été
approuvé le 19 décembre par les députés sénégalais.
Le Sénégal avait été mandaté en juillet 2006 par l’UA pour juger M.
Habré, mais l’ex-président sénégalais, Abdoulaye Wade, n’a jamais
organisé de procès. Son successeur, Macky Sall, qui a pris ses fonctions
en avril 2012, a exclu d’extrader Hissène Habré en Belgique, qui le
réclame, et s’était engagé à organiser un procès au Sénégal.
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