PROCUREUR SPÉCIAL, ALIOUNE NDAO « Nous sommes à la chasse de milliards»

Elle ne parle pas de millions, mais plutôt de milliards. La Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei) s’intéresse aux dossiers de personnalités soupçonnées d’avoir détourné des milliards. Mais le procureur près la Cour a précisé face à la presse hier qu’ils n’ont pas reçu une information concernant Aminata Niane.

L’absence du nom d’Aminata Niane sur la liste des personnalités qui doivent être entendu par les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie a fait l’objet d’interpellation du procureur spécial près la Cour de répression de l’enrichissement illicite, Alioune Ndao. Car, une certaine presse avait soutenu qu’elle figure sur la liste.

Seulement, Aliou Ndao a souligné que si l’article de presse parle de millions, la Cour n’a pas reçu des informations en ce sens. D’ailleurs, a-t-il souligné, «nous sommes à la chasse de milliards. Notre attention est portée sur ceux qui ont détourné des milliards. Nous n’avons pas reçu des informations sur Aminata Niane».

Toutefois, devant la crainte des Sénégalais de pouvoir récupérer l’argent planqué à l’extérieur, le procureur spécial, Alioune Ndao informe de la bonne collaboration de certains pays. «Nous avons séjourné à Paris il y a quelques jours. Nous avons pris des contacts avec les autorités judiciaires et administratives françaises qui sont disposées à collaborer avec nous», soutient le procureur spécial. Selon lui, en France on parle de non justification de ressources. «Nous sommes aussi en contact avec un magistrat de liaison qui est à l’ambassade de France au Sénégal. Donc, nous sommes bien capables de collaborer avec l’extérieur. En cas de besoin, ce sont ces collaborateurs qui vont enquêter respectivement dans leur pays. Même si des magistrats sont envoyés dans un quelconque pays, ils seront derrière ces collaborateurs», dira Alioune Ndao.

Pour ce qui est des Etats-Unis, Alioune Ndao avance qu’un procureur spécial est nommé pour cela. «Ce procureur viendra au Sénégal dans le cadre notre travail d’enquête pour nous aider», dit-il. Le Canada n’est pas en reste pour aider le Sénégal à rapatrier les fonds planqués dans son pays. «Un officier de liaison du Canada qui réside au Maroc s’est présenté à nous sur instruction des autorités», affirme M. Ndao.

La Cour est constituée par ailleurs de 18 magistrats, un greffier en chef, 3 greffiers et 4 agents.

7 ANCIENS MINISTRES ET DIRECTEURS DEVANT LES ENQUÊTEURS

Karim Wade ouvre le bal le 15 novembre

Le défilé des dignitaires du régime de Wade devant les enquêteurs de la section de recherches de la gendarmerie va bientôt reprendre. L’annonce est du procureur spécial près la Cour de répression de l’enrichissement illicite, Alioune Ndao, qui a animé une conférence de presse. C’est Karim Wade qui va ouvrir les auditions le 15 novembre prochain. Et personne ne peut se prévaloir de son immunité.

La fin de la récréation est sonnée. Le champ politique sera bientôt secoué par des convocations d’anciens dignitaires du régime de Wade dans le cadre de l’enquête enclenchée par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei).

C’est le fils de l’ancien président, Karim Wade, qui va ouvrir le bal d’auditions d’anciens ministres et directeurs. La révélation est du procureur spécial près la Crei, Alioune Ndao, assisté de son substitue, qui a fait face à la presse hier pour expliquer leur mission et prérogatives. «Les enquêtes ont commencé depuis 6 mois. On dit dans la presse que la Cour ne fonctionne pas alors qu’elle est bien fonctionnelle. Actuellement, nous avons transmis sept demandes d’enquête à la section de recherches de la gendarmerie», précise le procureur spécial. Les personnalités visées sont de son avis, Karim Wade, Oumar Sarr, Abdoulaye Baldé, Samuel Sarr, Me Madické Niang, Taïbou Ndiaye ancien directeur du cadastre et Doudou Diagne ancien directeur de l’urbanisme. Seulement souligne Alioune Ndao, «la liste est loin d’être exhaustive. D’autres personnalités y s’ajouteront. Karim Wade est convoqué à la section de recherche de la gendarmerie le jeudi 15 novembre prochain». Le procureur spécial espère que le fils de Wade répondra à la convocation de la gendarmerie comme il avait pris l’engagement de répondre à toute convocation. D’ailleurs, Alioune Ndao dit avoir reçu, il y a de cela quelques jours un des conseils de Karim Wade. Toutefois, il dément tout mandat d’arrêt  international contre Karim Wade.

Toutefois, le procureur spécial près la Crei rappelle que personne ne peut se prévaloir à cet stade de l’enquête de son immunité pour refuser de répondre à la convocation des enquêteurs. «Il y a une inopposabilité des immunités. On ne peut pas se prévaloir du statut de ministre ou député. Les immunités se jouent après les mises en demeure. Je lance un appel à ceux qui seront convoqués et qui refuseront de déferrer. Nous serons obligés de les amener par la force», soutient le procureur. Selon lui, toutes les personnes soupçonnées d’enrichissement illicites seront entendues. «Nul n’est au-dessus de la loi. S’il arrive dans le cadre de l’enquête qu’un marabout soit impliqué, il sera entendu», dit-il. À l’en croire, il n’y a pas de plainte déposée contre ces personnalités, mais plutôt la Cour a eu des informations judiciaires pour ouvrir des enquêtes. «Nous avons les procès-verbaux des enquêtes globales de la gendarmerie. Mais le constat que nous avons fait est qu’on parle plus d’enrichissement illicite. Ces procès-verbaux contiennent des informations que nous exploiterons», affirme M. Ndao. Interpellé sur les accusations d’illégalité de la cour, le procureur spécial s’inscrit en faux. «C’est un débat de juristes, nous sommes des praticiens. Nous n’entrons pas dans le débat qui pourrait être soulevé plus tard», dit-il.

Par ailleurs, contrairement aux Sénégalais qui sont pessimistes quant à l’aboutissement des procédures, Alioune Ndao rassure : «Je sens une nette volonté des autorités d’aller jusqu’au bout. Cela se manifeste par la volonté de transformer la Crei en Cour de répression contre les crimes financiers.»