Le président de l’Union des magistrats du Sénégal (Ums), Souleymane Téliko, revient à la charge pour dénoncer le fonctionnement de la Justice sénégalaise. Dans l’émission Juridy du dimanche sur Iradio, il fait remarquer, pour le regretter, que toutes les conditions ne sont pas réunies pour que la Justice puisse exercer son indépendance.
«Dans l’articulation des rapports entre la Justice et l’Exécutif, il y a deux impératifs qu’il faut tenir en compte. Le premier, c’est de reconnaitre à l’Exécutif tous les pouvoirs, toutes les prérogatives nécessaires à l’organisation du secteur de la Justice. Le second impératif, c’est de faire en sorte que l’exercice de ce premier pouvoir dévolu à l’exécutif ne conduise pas à remettre en cause l’indépendance de la Justice», a-t-il fait savoir face à Mamoudou Ibra Kane. Soulignant, dans la foulée, que c’est là où il y a un problème au Sénégal.
«Le premier, c’est le parquet. Tel que s’est fait, le ministre a la possibilité de s’immiscer dans les affaires judiciaires. Le parquet est une autorité judiciaire qui a des attributions juridictionnelles, qui peut ordonner des arrestations, requérir le mandat de dépôt, exercer des voies de recours qui maintiennent la personne en détention», indique le président de l’Ums.
Il ajoute: «Quand vous mettez une telle autorité sous la subordination de l’exécutif, indirectement vous donnez à celui-ci la possibilité d’avoir une influence sur le traitement des affaires judiciaires. Donc, aujourd’hui, le ministre peut, par instruction écrite, demander au parquet de requérir dans tel ou tel sens. Cela est une entorse aux principes de la séparation des pouvoirs».
Réforme…
Le président de Chambre à la Cour d’appel de Thiès explique à cet effet que cette subordination du parquet a deux conséquences dommageables : «elle permet l’immixtion de l’exécutif dans le traitement des affaires judiciaires et elle nuit à l’image de la Justice toute entière».
En plus clair, détaille Souleymane Teliko, «cette subordination fait peser sur le parquet et par ricochet sur toute la justice un soupçon permanent et de collision avec l’exécutif».
Le juge de rappeler que c’est pour cette raison que l’Ums avait sollicité une réforme dans ce sens qui consiste à modifier le Code de procédure pénale et à enlever toutes les dispositions qui permettent à un ministre de la Justice de donner des instructions dans telle ou telle affaire.
«Le ministre de la Justice devrait se contenter de donner des circulaires pour tracer les grandes lignes de la politique pénale et laisser à chaque procureur le soin de décider librement du traitement des affaires judiciaires».
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