L’idée d’une zone dans le vagin qui serait le centre ultime du plaisir sexuel féminin a émergé dans les années 1980. Mais jusqu’à maintenant, il n’existe pas de preuves scientifiques de son existence.
L’idée qu’il existerait une zone hypersensible dans le vagin est internationale et vieille de plusieurs siècles. En Occident, cette zone fut baptisée «point G» en hommage au médecin allemand Ernst Gräfenberg. Ce gynécologue est connu pour l’invention dès 1930 d’un anneau contraceptif, ancêtre du stérilet que l’on connaît actuellement. En 1950, il décrit une «zone érotique, toujours présente sur la paroi antérieure du vagin, le long de l’urêtre» dans l’International Journal of Sexology.
Le point G connaîtra ensuite une popularité importante à partir des années 1980, quand trois Américains publient The G-Spot and Other Recent Discoveries about Human Sexuality (Ed. Holt Paperbacks). C’est ce livre qui, le premier, a popularisé auprès du grand public l’idée d’un «point G». Mais son existence ne repose alors sur aucun fait scientifique, hormis la vague description qu’en faisait Ernst Gräfenberg en 1950. Depuis, de très nombreuses d’études plus ou moins sérieuses ont été réalisées, dont certaines ont fait le lit de fausses croyances.
À la recherche du point G
L’enjeu est grand: stimuler cette zone procurerait un orgasme à coup sûr… Imaginez! La découverte de sa localisation précise pourrait révolutionner la sexualité. Mais en réalité, «les études suivantes qui ont eu tant de retentissement médiatique portent sur un nombre modeste de patientes et se basent sur un niveau de preuves notoirement insuffisant», expliquait Marie-Hélène Colson, médecin sexologue et directrice d’enseignement de sexologie à la faculté de médecine de Marseille, dans la revue Sexologies en 2010. En 1983 par exemple, une étude menée avec seulement 11 femmes a trouvé chez 4 d’entre elles «une zone similaire au point G» grâce à une palpation manuelle, une méthode «plus que sujette à caution», selon Marie-Hélène Colson.
En 2006, l’idée d’un point G est même sur le point d’être enterrée, quand une équipe d’uro-gynécologues américains réalisent plus de 100 biopsies de parois vaginales. «Nous n’avons pas trouvé d’innervation particulière dans la paroi antérieure du vagin», concluent-ils dans The Journal of Sexual Medicine . «Cependant, nous n’affirmons pas pour autant qu’il s’agisse de la preuve que le point G n’existe pas», nuancent-ils. Et d’ajouter: «Il est possible que nous n’ayons pas cherché au bon endroit».
Point G ou zone G?
Mais une autre hypothèse vient défendre l’existence de cette zone mythique: celle que le plaisir viendrait non pas du vagin, mais du clitoris collé à celui-ci, la pénétration stimulant le clitoris au travers du vagin. Le point G correspondrait en fait à cette zone de contact entre les deux organes.
«Ceci semble confirmé par des études plus récentes utilisant l’échographie», explique Marie-Hélène Colson. En 2009, la gynécologue Odile Buisson et l’urologue Pierre Foldes font passer des échographies de la vulve à 5 femmes. Ils observent alors que que la pénétration vaginale entraîne un mouvement du clitoris. «La racine du clitoris descend et rentre en contact avec la paroi vaginale antérieure», décrivent-ils dans The Journal of Sexual Medicine . «Nous suggérons que cela pourrait augmenter le contact entre le vagin et le clitoris, très innervé. C’est important car l’innervation pauvre du vagin est l’argument habituel de ceux qui nient l’existence du point G», poursuivent-ils. Une année plus tard, ils font passer une échographie à un couple pendant leurs relations sexuelles et confirment ce mouvement du clitoris: «la racine du clitoris est particulièrement étirée par le pénis et compressée contre la paroi vaginale antérieure», observent-ils.
Cela suffit-il à prouver l’existence du point G? Pour Marie-Hélène Colson, «le point G est une idée, un concept». En clair, le point G ne correspond pas à une réalité physique fixe et immuable. «Ce que l’on a pu appeler le point G n’est en fait pas un point, mais plutôt une zone de tissu conjonctif plus richement innervée et vascularisée, donc plus sensible, et située à l’entrée du vagin, sur sa paroi antérieure», explique la sexologue. Et nombreux sont les organes qui, à un moment ou un autre de la relation sexuelle, peuvent concourir à la venue de l’orgasme. En effet, toutes les structures qui participent au plaisir sexuel (le vagin, le clitoris, mais aussi l’anus, la vessie et la vulve) sont liées à la fois sur le plan neurologique et vasculaire. «L’orgasme en lui-même est identique quelle que soit la zone de stimulation initiale, et son intensité est liée au nombre de ses structures qui y contribuent (anus, vagin, clitoris, vessie, vulve), ainsi qu’à la résonance émotionnelle qui l’accompagne».
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