«On n’est pas écrivain seulement par la parole»
«Je n’ai pas des relations amicales ni fraternelles avec Elie Charles Moreau»
Il fallait s’y attendre, on s’y attendait, et c’est arrivé. Après l’interview d’Elie Charles Moreau publiée dans notre édition de vendredi dernier, 15 avril, Alioune Badara, Bèye, président de l’Association des écrivains sénégalais, nous a appelé aux fins d’apporter la réplique aux critiques acerbes portées contre sa personne par le directeur des éditions Le Nègre international, écrivain et poète, membre du Conseil économique et social. Ouvrir le débat sur les multiples interpellations qui fusent dans les salons sur la culture dans notre pays était notre souhait. Sur toutes les questions soulevées par Charles Elie Moreau, l’auteur de «Nder en flammes», le feu à la bouche, apporte une réplique pour dire le moins, sans gants.
Alioune Badara Bèye, en tant que président des écrivains du Sénégal,
comment appréciez-vous les critiques d’Elie Charles Moreau de manière
générale ? De la littérature à Keur Birago en passant par l’édition, le
fonds d’aide, l’association que vous dirigez… ?
Je ne
veux pas prendre cette interview sous forme de polémique, mais il était
nécessaire de recadrer un peu les choses. D’abord, il a dit qu’il était
mon ami, mon frère. Ce n’est pas exact, je n’ai pas des relations
amicales ni fraternelles avec lui, c’est vrai que nous partageons cet
espace, Keur Birago, mais nous n’avons pas d’affinités particulières.
Aucune. Mais cela ne m’étonne pas. Élie a un triple handicap :
congénital, culturel et sociétal. Mais pouvez-vous me dire : «Elie
Charles Moreau a écrit tel ou tel ouvrage», en tout cas, il est entré
dans l’association avec un carnet de récitations. Ici nous n’excluons
personne, c’est cela d’ailleurs notre force et notre faiblesse. Quand
il voit ce qu’il a mené jusqu’à avoir presque soixante ans - je ne
connais pas son âge exact - , est-ce qu’il a réussi ou non, c’est la
faute à qui ? Voilà pourquoi je le situe à ce niveau. Franchement, je
ne voudrais pas être dans cette chaudière qu’il alimente à gauche et à
droite, je ne l'ai jamais vu, depuis que je le connais, parler en bien
de quelqu’un, d’un écrivain en particulier. Je dis que même son statut
d’écrivain est à discuter, il s’est fait publier lui-même dans sa
propre maison d’édition, moi je n’ai pas besoin de me présenter, tout
le Sénégal, toute l’Afrique sait ce que j’ai fait dans le domaine de la
littérature. Je suis publié partout, mes pièces de théâtre sont jouées
partout, donc nous sommes différents, nous ne sommes pas vraiment de la
même catégorie. Je pense que dans son interview, il y a un tissu de
mensonges, vérifiable.
Et sur la durée à la tête de l’association ?
Il y a eu d’abord à la tête de l’Aes, Aminata Sow Fall, Amadou Lamine
Sall, puis Mbaye Gana Kébé qui avait créé un parti politique, ce qui
n’est pas compatible avec l’association où l’on ne fait pas de
politique, ensuite moi-même. ÉLie a dit qu’il n’y a pas eu d’Assemblée
générale. Lors de celle qu’on a tenue ici, il y a cinq ans et qui m’a
élu, il y avait plus de trente-cinq personnes et c’est un record, elle
était présidée par Moustapha Wade. Je suis dans l’association des
écrivains ou je suis rentré très jeune, du temps de Birago et il faut
publier une œuvre de fiction, roman, nouvelle, théâtre, conte,
policier, par une maison d’édition reconnue pour en faire partie. Donc
le compte d’auteur est exclu, ça ce sont les statuts de l’association
qui le veulent. Ce qui fait que tout le monde ne peut pas être là.
Maintenant, tout le monde sait que 2010 était l’année du Festival
mondial des arts nègres, nous n’avions pas pu la tenir en fin d’année
parce que c’était entre octobre et novembre que cela devait avoir lieu.
Mais nous n’avons jamais exclu de la tenir. L’assemblée sera
souveraine, toutes les questions y seront discutées dans les règles de
l’art. Mais certains ne seront jamais à la tête de cette association.
Existe-t-il des cartes de membre dans l’Association ?
Il (Ndlr : Elie Charles Moreau) avait proposé qu’on distribue des
cartes. Où est-ce qu’on a vu cela ? Dans une association, les cartes
sont là. On a fait des communiqués pour que ceux qui sont déjà membres
renouvellent leurs cartes, mais ceux qui ne sont pas encore membres et
qui souhaitent venir acheter leurs cartes pour avoir droit de cité
peuvent en prendre l'initiative. Et ça, ce sont des règles qu’on ne
discutera pas. Maintenant, chaque jour, les gens viennent acheter les
cartes qui sont à 10 000 francs et l’on estime même que c’est peu et
qu’on aurait pu porter le prix à 15 000 F Cfa. C’est une association
dont la carte vous permet non seulement d’adhérer à toutes les
activités et d’avoir votre mot à dire, mais aussi c’est un moyen
d’aider un peu l’association pour ses diverses manifestations.
Est-ce que vous prévoyez de tenir une Assemblée générale cette année ?
Mais bien sûr, dans très peu de temps, parce que nous ne craignons
rien. Ceux qui sont de l’autre côté ne sont que quelques personnes, je
la convoquerai quand les écrivains seront là, munis de leurs cartes et
de leurs ouvrages, mais on ne prendra pas n’importe quel torchon,
seulement les œuvres édités par des maisons d’édition reconnues. Ceux
qui craignent pour l’Assemblée, ce sont des énergumènes qui ne
dirigeront jamais l’Association, parce qu’ils n’ont pas le statut. Les
Sénégalais ou les autorités demanderont d’abord qu’est-ce qu’ils ont
écrit. On n'est pas écrivain seulement par la parole, dire que je suis
écrivain, critiquer et insulter les gens, non ! Je pense que ce sont
des situations qui ne rentrent pas dans mon éducation ni dans ma vie de
tous les jours. Ce n’est pas l’association qui a fait Alioune Badara
Bèye, moi j’ai été publié et connu avant, je suis venu dans
l’association avec déjà quatre œuvres publiées aux Nouvelles éditions
africaines, j’ai été primé au concours de théâtre interafricain avant
de venir dans l’association, donc moi, ce n’est pas l’association qui
m’a fait, mais eux ont besoin de l’Association pour se faire. Si on
ciblait tous les écrivains d’Afrique qui sont venus ici, ou d’Europe
qui ont participé à nos activités, ils sont plus de deux cents qui sont
dans le monde, on a reçu ici des académiciens les plus connus, des
hommes politiques de toutes les dimensions, trois fois le président de
la République, des prix Nobel de littérature. Il n’y a pas
d’association qui a la lisibilité et la capacité d’organisation de
l’Aes en Afrique et je le dis en toute humilité. En Europe aussi où
j’ai été, le cas de l’Aes est exceptionnel, les écrivains ne sont pas
faits pour être dans un groupe, la plume est tout à fait solitaire.
Nous avons hérité d’une situation, Senghor a créé cette association et
depuis lors, nous avons des présidents qui ont apporté chacun sa
contribution. Mais en tout cas, c’est avec Alioune Badara Bèye qu’on a
eu cette distinction internationale. Avant, l’association n’était
jamais sortie, elle n’a jamais eu, à part l’époque de Aminata Sow Fall
qui lui a donné une dimension internationale, de reconnaissance
extérieure. Et c’est elle qui m’a proposé - dès mon adhésion - d’être
membre de la Fédération internationale des écrivains de langue
française, la Fidelf. Dans le cadre de la Francophonie, j’étais
responsable de l’Afrique dès la première année, j’ai été vice-
président, je faisais donc partie des cinq vice-présidents de la
Fidelf. Quelques années après le départ de Aminata, la Fidelf m’a
proposé d’être président. Je suis en tout cas l’unique ressortissant de
l’Afrique ou même du tiers-monde à avoir dirigé la Fédération
internationale des écrivains de langue française qui est installée à
Montréal et qui regroupe quelque chose comme 20 à 30 000 écrivains.
Donc c’est beaucoup plus important, plus étoffé que l’Association des
écrivains du Sénégal. Il y a le Prix des cinq continents, aucune
association d’écrivains d’Afrique ne siège dans ce comité sauf l’Aes,
et le comité de sélection du concours nous envoie autour de 150
ouvrages, ça c’est la crédibilité de l’Association. Ce sont les
professeurs Omar Sankharé et Racine Senghor qui nous représentent
là-bas et qui sont d’éminents écrivains. Croyez-vous qu’ils vont
prendre n’importe qui ? Est-ce qu’ils connaissent même l’existence d’un
certain Moreau (Ndlr :Elie Charles Moreau) ? Non.
Etes-vous candidat à votre propre succession ?
J’avais dit que je ne l’étais pas, mais ce que je peux dire, c’est que
l’assemblée est souveraine. Je peux décider d’une chose et l’assemblée
fait autre chose. Si des écrivains ne veulent pas d’Alioune Badara
Bèye, dans les règles de l’art, je féliciterais mon successeur, je suis
un démocrate.
Et pour le Pen internationale qui doit défendre les journalistes et les écrivains censurés ?
Le Pen international, dont je suis membre depuis 1987, je suis
convaincu qu’Elie ne pourra même pas vous dire ce que cela signifie.
Cela veut dire Poètes, Nouvellistes, Essayistes, le siège est à Londres
c’est la plus ancienne association d’écrivains dans laquelle il y a des
sections. Il y a les écrivains de la liberté dont faisait partie Nelson
Mandela, des écrivains en prison, des écrivains en exil, ce sont des
sections qui sont dirigées par des écrivains, la plupart des prix
Nobel. Les prix Nobel sont pratiquement tous sortis du Pen
international et nous, nous sommes membre de ce comité, du Pen. Il y a
eu d’abord Senghor, ensuite Sembène Ousmane qui a fait presque 20 ans à
la tête du Pen international et maintenant c’est Mbaye Gana Kébé. Et le
Pen international, c’est le pendant de l’association des écrivains,
c’est une cellule ici mais sur le plan international, le Pen règle
beaucoup de problèmes hors littérature et avec les critiques d’art par
exemple. L’association est réservée uniquement aux écrivains de
fiction, les essayistes n’en font pas partis, mais ils peuvent se
retrouver au sein du Pen qu'on n'a jamais interdit à personne. Élie
Charles Moreau devait avoir beaucoup de respect pour Mbaye Gana Kébé
qui dirige Le Pen. D’abord par-ce qu’il peut être son père, ensuite sur
le plan de l'écriture, Mbaye Gana Kébé est l’auteur le plus produit au
Sénégal, le plus édité, il n’est pas de sa dimension, c’est comme
l'ivraie et la bonne graine, ce n’est pas la même chose. Mbaye Gana
Kébé s’est imposé avec sa plume, il n’y a pas de Sénégalais ou même
d’Africains qui ne le connaissent. Nous avons eu avec le Pen 2007 à
organiser la première réunion du Congrès du Pen international avec 300
centres. Depuis 1921 que le Pen a été créé, ils n’ont jamais tenu de
congrès en Afrique. Pourquoi ils l’ont tenu, ça c’est la crédibilité de
l’Association des écrivains du Sénégal, de ses membres, parce que dans
cette association, il y a au moins cinq ou six Grand prix du président
de la République, sans compter d’autres qui se sont imposés dans ce
domaine. Et aussi, ils cherchent la crédibilité du régime de notre
pays, c’est un pays où aucun écrivain n’a été condamné. Le congrès de
2007 avec 300 centres avaient été pris en charge par le chef de l’Etat
qui a d’excellents rapports avec les écrivains de notre pays et depuis,
Le Pen international n’arrive pas à organiser un congrès de la
dimension de Dakar qui est cité partout, donc il n’y a pas d’exclusion
au Pen.
La présence du Pen
international ne se fait pas trop sentir au Sénégal où il y des
journalistes que l’on fatigue et des écrivains qui sont censurés.
Le fait d’avoir tenu ce grand évènement 2007 avec tous ces pays, c’est
un grand évènement. Maintenant, Le Pen n’a pas une vie quotidienne
comme cela, non il a une vie ponctuelle. Ce que je peux dire, c’est que
depuis Senghor, Diouf et Wade maintenant, je n’ai pas vu un écrivain
emprisonné, exécuté ou exilé. C’est vrai qu’à chaque fois qu’on est
interpellé pour un journaliste qui est emprisonné ou qui a des
difficultés, nous avons eu à intervenir au niveau du Pen international
à Londres et à chaque fois, nous le faisons dans la discrétion, mais
nous le faisons. Pour la censure, même moi qui vous parle, je suis
censuré parfois ; «Demain la fin du monde» a été jouée peut-être
quelque temps, mais depuis dix ans, la Rts ne la diffuse plus. Ce sont
des cas qui arrivent, mais globalement, je ne vois pas l’interdiction
qui est faite, tous les ouvrages, je les achète à Dakar ou dans les
rues ou chez les librairies. Le livre de Alioune Tine, on l’a présenté
ici, celui de Me Boucounta Diallo et d’autres essayistes. Quand on nous
en fait la demande nous prenons en charge les présentations.
Parlez-nous maintenant du Fonds d’aide à l’édition, de sa gestion.
Tenez, 90 sinon 98% des livres publiés par Elie sont financés par le
Fonds d’aide, pourquoi il met dans ses œuvres, cet ouvrage est financé
dans le cadre du fonds d’aide ?Le dernier c’est le livre de Soleya Mama
pour lequel il a reçu 10 millions Cfa du Fonds d’aide et il a même des
problèmes avec l’auteur pour ne pas avoir pu respecter ses engagements
avec l’imprimeur, et c’est l’auteur même qui a fait pression pour qu’il
le sorte et qui a payé pour cela. C’est même indécent de vouloir
profiter de quelque chose et ensuite détruire cela. Il n’a jamais été
aussi bien aidé dans le cadre du Fonds d’aide qu’avec ce ministre de la
Culture. Il devrait même avoir honte d’en parler. Comment peut-il dire
cela alors que c’est vérifiable ? (Il fait amener quelques ouvrages
publiés par le Nègre international, tels «le 3ème du couple» de Seydi
Sow et «Célébrations» de El Hadj Diogaye Thiarré ou c’est effectivement
écrit derrière, en bas de page, que cela a été subventionné (par le
Fonds Ndlr). C’est la condition, on vous dit pour que vous puissiez
bénéficier du Fonds d’aide, il faut mentionner cela. C’est non
seulement une malhonnêteté extraordinaire de dire que l'on n'a pas reçu
un franc du Fonds, mais c’est un mensonge de haut niveau, on ne peut
pas mentir comme cela.
Encore un autre mensonge. Quand il (Elie Charles Moreau)
dit qu’il a été à la base du Fonds d’aide, mais les gens vont rigoler.
Pour le Fonds d’aide qui était entre 40 et 50 millions, le président
est venu ici à l’occasion de la Journée internationale de l’écrivain,
c’est Mbaye Gana Kébé et moi qui l’avons interpellé, il en a profité
pour dire qu’il allait multiplier cela par dix. Ensuite, il a
interpellé son Premier ministre Macky Sall pour dire qu’il allait lui
demander de le porter à 600 millions. Il (Elie Charles) n’a jamais été
associé à cela, on ne l’y associe pas parce que les gens connaissent
son manque de sérieux. Le Fonds d’aide, c’est une proposition de
l’Association des écrivains du Sénégal. Il a dit qu’il avait rencontré
Safiatou Ndiaye Diop, demandez à Safiatou, on ne consultait pas, il
n’avait aucun pourvoir pour cela, c’est quelqu’un qui braie dans la rue
comme cela, qui parle à gauche te à droite.
Nous ce qu’on dit, c’et très simple, même le fait qu’on
dise dans la constitution que le Premier protecteur des arts et des
lettres est le président, cela a été décidé ici, le président nous a
envoyé à cette période son conseiller culturel Baba Wane qui nous a dit
que le président souhaite qu’on lui donne quelques propositions dans la
nouvelle constitution. Et nous lui avons dit cela, c’est un acquis de
l’association. En ce moment, où était Elie Charles Moreau ? Personne ne
le connaissait parce que les Sénégalais jugent les gens par leur
production et non par leur langue.
Et pour ce qui est de Keur Birago ?
On n'a jamais empêché un écrivain d’être là. S’il y a un espace ouvert
au Sénégal, c’est bien ici ! Nous recevons des écrivains, des
musiciens, des artistes plasticiens, des cinéastes. Pourquoi cela ?
Parce qu’il y a une diversité, nous n’excluons personne, il y a les
jeunes auteurs - nous avons publié trois anthologies dont deux de
jeunes de moins de 20 ans. Il y a les écrivains qui sont de passage
ici, les autorités et les écrivains qui étaient à l’ombre qu’on a fait
ressortir parce qu’on avait quand même besoin de relancer les jeunes
auteurs qui n’avaient pas la chance d’être édités. On a édité ici une
anthologie de poésie sur les mines anti-personnelles, c’était organisé
par l’Ondh et l’association, qui a organisé un concours et dont le
premier prix avait été remporté par feu Olla Faye, un journaliste qui
était à Sud et 300 poèmes avaient été reçus. Il n’y a pas des bureaux
fermés, ils sont tous ouverts à chaque fois que quelqu’un en a besoin.
Il y a même des écrivains qui viennent et qui disent qu’ils ont besoin
de rester trois ou quatre jours et on les laisse ici. On les laisse en
résidence, parfois même une semaine et qui ne sont même pas de Dakar
mais des régions et même maintenant de la sous-région. C’est une
résidence qui n’a pas beaucoup de chambres, nous n’en avons que quatre
maintenant, s’il y en a plus, on leur dit qu’on ne peut pas prendre
plus de cela et cela pour leur éviter d’aller à l’hôtel. Parfois, les
écrivains viennent occuper les bureaux, écrivent comme ils veulent.
Vous savez, c’est très facile de mentir, quand on ment sciemment aussi
pour faire du mal.
La qualité d’impression des livres n’est parfois pas très bonne au Sénégal. Pourquoi ?
Les livres que nous publions aux éditions Maguilen, on ne compare même
pas, nous sommes au-dessus parce que nous existons depuis 1992, nos
premiers ouvrages sont là encore, l’anthologie de poésie
anti-apartheid, «Regard sur la francophonie» préfacé par Abdou Diouf
date de 1992, l’autre est préfacé par Nguesso et Mandela, mais ce sont
des œuvres best-sellers que nous avons. Ce n’est pas pour rien que nous
avons été primés meilleure maison d’édition africaine à la Fildak 2009,
nous ne sommes pas de sa dimension, franchement. Regardez les ouvrages
qu’il a publiés, un auteur a même écrit pour demander qu’il retire
l’ouvrage des librairies, tellement il y avait des fautes. Celui qu’il
a dédié au président, il n’en parle pas, il y a plus de cinquante
fautes. Beaucoup d’auteurs retirent leurs ouvrages quand ils sont
publiés par Le Nègre international (Ndlr ; la maison d’édition d’Elie
Charles Moreau). Nous, on se compare à d’autres maisons d’édition, mais
pas à la sienne qui se résume à lui-même d’ailleurs. Nous sommes
soucieux de la qualité. L’Occident nous reprochait souvent de faire des
livres qui n’étaient pas très bien, mais nous avons des problèmes
d’imprimerie et nous n’avons pas ce complexe, plusieurs de nos œuvres
ont été éditées en France, d’autre en Italie, mais nous savons aussi
utiliser des imprimeurs sénégalais qui sont maintenant bien. Nous
sommes très soucieux de la qualité du livre, il y a des livres qui sont
mal collés, ça arrive de temps en temps, mais globalement, les éditeurs
sénégalais ont fait des pas-de-géant dans ce domaine, mais cela nous le
devons aussi à l’organisation de l’édition dirigée par un éminent
professeur, Madieyna Ndiaye. Nous savons que nos ouvrages réalisés ici
ou ailleurs peuvent circuler librement avec une bonne considération, un
profond respect. Nous travaillons en gros avec l’imprimerie Monteiro
mais aussi avec d’autres éditeurs.
Ce type de débat soulevé par M. Moreau est-il salutaire pour promouvoir la littérature d’un pays ?
C’est un débat de poussière, qui n’a aucune qualité parce que provenant
de quelqu’un qui n’a aucune référence au Sénégal. Moi je ne dénigre
personne et c’est quelqu’un qui ne méritait même pas que je lui
réponde, mais je ne pouvais pas laisser s’installer un tissu de
mensonges, pour le respect que je porte à l’autorité qui s’occupe du
Fonds d’aide, aux écrivains du Sénégal et à ceux qui nous font encore
confiance. L’extérieur qui nous sollicite à tout moment, pour ceux qui
nous représentent, donc. C’est un débat de caniveau parce que tout le
monde sait qu’il n’est pas représentatif. Je ne suis pas de son niveau,
je ne devais même pas répondre, il fallait que les gens sachent qui est
l’homme qui passe tout son temps à critiquer. Élie me doit, et je le
dis en toute honnêteté, son premier emploi, pour avoir un bulletin de
paie, c’est moi qui l’ai recruté, avec le conseiller régional de Dakar
qui est un ami. Je ne peux pas le haïr, je suis un homme issu d’une
grande famille qui connaît les bonnes choses, je me connais, je ne peux
pas faire du mal, je ne suis pas éduqué comme cela. Quand je parle de
handicap congénital, c’est cela. Même sa femme, c’est moi qui l’ai
recrutée dans le Fesman, tout le monde le sait, mais quand ils ont
divorcé, il m’a demandé de l’exclure, j’ai dit non, une femme avec qui
vous avez quatre enfants, je vais continuer à l’aider au contraire et
augmenter son salaire, ce que j’ai fait. Je ne rentrerais pas dans les
autres détails, je vous montrerais des factures, des demandes qu’il m’a
adressées et que j’ai refusé de faire, vous serez restés évanouis. La
culture est faite pour les hommes sains, les hommes et femmes corrects,
les civilisés, ce n’est pas fait pour les torchons.
Alioune Badara Bèye vous êtes écrivain, poète, dramaturge, romancier, scénariste. Parlez-nous de votre carrière.
J’ai été dans la marine française et sénégalaise puis à la douane
pendant cinq ans, quand je venais à Dakar, on me payait des primes de
dépaysement et de chaleur, j’ai fait presque le tour du monde, et
quinze ans de contrôle économique. Il a dit que je suis riche
maintenant, mais ce n’est pas lui qui m’a enrichi. J’ai fait un choix
et j’ai décidé de vivre de ma plume, j’ai créé ma maison d’édition, ma
maison de production Dialer qui porte le nom de ma grand-mère. Moi, ma
principale richesse, c’est ma création, «Nder en flammes», c’est moi,
«Demain la fin du monde», c'est moi. Ma première maison, je l’ai eue en
1975, ma première voiture, dès 1972, en 1991, quand je faisais mon film
sur Lat-Dior, j’avais un budget de 425 millions et l’Etat m’avait donné
une rallonge de 60 milions, j’avais presque 500 millions. Mes films
sont vendus, j’ai cette chance. Je vis de ma production très largement.
C’est Dieu qui l’a décidé, il a fait que je suis né dans une bonne
famille, bien né, je ne me dispute avec personne, j’ai eu ce que je
devais avoir, on m’a bien éduqué. Mes films, je ne suis pas le plus
talentueux, mais mes œuvres sont vendues, vendues dans toutes les
télévisons européennes. «Lat-Dior», « Nder en flammes», diffusées par
52 chaînes, «Demain la fin du monde», même censurée au Sénégal, a été
diffusée sur Cfi, Arte, Tv5. Je ne suis pas le meilleur, mais il faut
reconnaître la main de Dieu, ne mélangeons pas les serviettes et les
torchons. Il y a des acteurs reconnus et vous ne les entendez pas,
surtout la gent féminine, Sokhna Benga, Nafissatou Dia Diouf, Fama
Diagne Sène, Rakhmatou Samb, Mariama Ndoye publiée dans beaucoup de
maison d’éditions africaines, Yelli Faye, Mme Wardini, c’est surtout la
relève féminine qui m’intéresse. Dieu est juste, c’est le plus grand
metteur en scène, il met les acteurs par-ci par-là et certains ne
seront jamais premiers, ils seront toujours derniers. Ceux qui me
connaissent savent que je ne suis pas fait pour le discours ordurier.
Que pensez vous de la vie culturelle au Sénégal dans sa globalité ?
Nous avons eu depuis Senghor une vie culturelle, et aucun président ne
peut remettre cela en question, Abdou Diouf est venu, a réalisé des
choses, la preuve, Keur Birago, c’est lui qui l’a acheté, mais c’est
Wade qui lui a donné cette dimension. Nous avons de grands musiciens,
Youssou Ndour, Ismaël Lo, Thione Seck, Baba Maal, nous avons cette
fierté. De grands peintres depuis Pape Ibra Tall jusqu’à présent,
Kalidou Kassé. Dans l’écriture, des références, ceux qui nous ont
précédé, de Senghor en passant par Birago, Cissé Dia, mon père dans le
domaine du théâtre, Ousmane Socé, Moustapha Wade, Thierno Ba, Cheikh
Hamidou Kane, Aminata Sow Fall. Nous avons des écrivains de qualité qui
se sont imposés sur le plan national et international. Maintenant, la
vie culturelle aux acteurs culturels. Le président a défini les grandes
lignes et nous ne cesserons de le remercier pour beaucoup de choses :
Le Fonds d’aide, le Grand théâtre, le Parc culturel qui va se dérouler.
Maintenant, tout le monde doit pouvoir réfléchir sur l’animation de la
vie culturelle. Il y a les associations, toutes les associations ne
sont pas comme l’Aes, nous, nous vivons sur le plan national et
international, nous avons une crédibilité, je salue une association
comme Arcots, qui est très dynamique et bien dirigée par Ndiaye Doss et
Pape Faye. Je les ai rencontrés dans toutes les grandes régions, ou ils
font des manifestations avec peu de moyens, mais ils arrivent à
survivre, c’est très important. La plume d’un écrivain, c’est son arme,
ce n’est pas l’insulte à la bouche, ça n’apporte rien du tout. Le
président fait beaucoup d’actions, il aide beaucoup de gens, des
écrivains, des artistes, des plasticiens. Une fondation peut-être mise
en place pour se charger des fonds sociaux des créateurs sénégalais et
aider à la production cinématographique, à la résidence d’écriture aux
renforcements des capacités.
Votre mot de la fin.
En dernier, moi je voulais remercier tous les écrivains qui se sont
imposés par leurs plumes et non par la jalousie, le souci de
dénigrement, de perfidie, je les encourage, je félicite les éditeurs.
Je remercie les autorités le président de la République qui m’a
toujours fait confiance, il m’a nommé à Sorano comme président du
Conseil d’administration. Et c’est sous l’ère de Wade parce qu’avant,
on ne prenait que les fonctionnaires qu’on y mettait, je pense avoir
accompli quelque chose, quand je partais, le budget était à moins de
200 millions et maintenant, c’est à plus de 400 millions. Cette
confiance a été renouvelée au Cnra où je représente la littérature, le
colonel Guèye qui est à la Céna, les écrivains sont maintenant partout
et c’est grâce à la crédibilité de l’association, il y a même d’autres
que je ne citerais pas. Je remercie la presse de mon pays qui est une
grande presse, diversifiée. C’est aussi un gage de démocratie.
10 Commentaires
Undefined
En Avril, 2011 (12:14 PM)Fa
En Avril, 2011 (14:14 PM)Boffffff
En Avril, 2011 (15:35 PM)Querelle de vieux oisifs
Reply_author
En Décembre, 2021 (12:17 PM)Diagne
En Avril, 2011 (16:55 PM)Undefined
En Avril, 2011 (17:35 PM)NEGATIF sur tout le monde Quittes le cercle feminin et vas chez les garçons
Gentil Homme
En Avril, 2011 (18:10 PM)Marième D
En Avril, 2011 (19:22 PM)Cher
En Avril, 2011 (23:49 PM)Tass
En Avril, 2011 (01:42 AM)Diaw
En Décembre, 2014 (00:22 AM)Participer à la Discussion