Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) va pouvoir enquêter en Côte d’Ivoire sur des crimes contre l'humanité et des « crimes de guerre » commis après l’élection de 2010. L'entourage du chef de l'Etat Alassane Ouattara s'en félicite. En revanche, dans le camp de l'ex-président Laurent Gbagbo, on doute de l'impartialité de la justice internationale.
Les juges de la Cour pénale internationale (CPI) ont donné, vendredi 30 septembre 2011, leur feu vert au procureur Luis Moreno-Ocampo pour qu'il puisse enquêter en Côte d'Ivoire sur des « crimes contre l'humanité » et des « crimes de guerre » qui auraient été commis au lendemain de l'élection présidentielle de novembre 2010. Selon les Nations unies, plus de 3 000 personnes avaient été tuées pendant les violences qui avaient suivi le refus de Laurent Gbagbo de céder le pouvoir après le scrutin.
Alassane Ouattara a désormais l'assurance que la CPI va enquêter sur les crimes commis durant la période post-électorale et il ne peut que s'en satisfaire. Avant même sa prise de fonction, le président ivoirien avait dit et répété qu'il voulait que le cas de Laurent Gbagbo mais aussi les exactions les plus graves perpétrées par les forces qui avaient combattu pour son installation au Palais soient jugés à La Haye.
La CPI aura-t-elle le champ libre pour mener ses investigations ?
Si les premières inculpations sont encore loin d'être tombées, un pas est désormais franchi. « Nous n'avons ni gêne, ni crainte », a martelé, lundi 2 octobre 2011, le ministre ivoirien de la Justice Jeannot Ahoussou Kouadio. Selon lui, il y a « des gages d’impartialité puisque la CPI va enquêter partout, dans tous les compartiments de l’organisation de la société ivoirienne. Dans tous les partis politiques, que ce soit des militants du FPI (Front populaire ivoirien), des proches de Laurent Gbagbo, ou bien des proches du président Ouattara, ou des proches du président Bédié (qui a succédé à Houphouët-Boigny). Jeannot Ahoussou Kouadio a ajouté que « toute personne qui sera prise dans le cadre de cette enquête sera passible de sanctions prévues par les textes de la CPI ».
Le fait qu’une justice indépendante vienne en Côte d’Ivoire ne fait pas peur aux autorités en place. « Nous sommes sereins. D’ailleurs, c’est le président Ouattara qui a pris l’initiative d’inviter la CPI. Il n’y a pas de réserves, il n’y a pas de gêne. Le président Ouattara n’entend pas protéger des criminels », a ainsi affirmé le ministre de la Justice Jeannot Ahoussou.
Le camp de Gbagbo doute de l'impartialité de la justice internationale
Ces sentiments ne sont pas toujours partagés dans le camp de Laurent Gbagbo. Justin Koné Katinan, porte-parole de l’ancien président, a été catégorique, en considérant que la justice internationale n'a aucune légitimité pour juger le président déchu. Il a souligné que la CPI ne fait qu'appliquer les desiderata d'Alassane Ouattara et de Paris. Il en veut pour preuve que les juges ont rendu leur décision aussitôt après les passages à La Haye du ministre ivoirien des Droits de l'homme et du ministre français de la Justice : « Premièrement, elle (la CPI) n’a pas donné des signaux forts en Afrique. Deuxièmement, elle a été actionnée par celui qui est l’auteur de toutes les exactions depuis 2002. Troisièmement, elle s’est limitée uniquement à la période demandée par cette personne, Ouattara, alors qu’elle aurait pu aller jusqu’en 2002. Quatrièmement – et c’est qui est le plus important – c’est que cette décision a été prise le lendemain du jour où M. Mercier Michel, garde des Sceaux dans le gouvernement de M. Sarkozy en France, se déplace personnellement avec le dossier ivoirien sous ses aisselles pour rencontrer les autorités de la Cour. Et ce voyage fait suite également à un autre voyage effectué par le ministre des Droits de l’homme du gouvernement de M. Ouattara ».
Selon Justin Koné Katinian, si Laurent Gbagbo et ses proches doivent être jugés, cela doit être uniquement en Côte d’Ivoire : « Absolument ! Nous ne pouvons pas comprendre qu’on nous reproche d’avoir commis des fautes en Côte d’Ivoire et que M. Ouattara décide celles qui doivent être jugées en Côte d’Ivoire et celles qui doivent être jugées à La Haye. Nous attendons de répondre de nos actes devant les juges ivoiriens et non très loin (du pays). »
5 Commentaires
Un Inconnu
En Octobre, 2011 (20:16 PM)Reply_author
En Septembre, 2022 (21:26 PM)Il faut songer à changer de stratégie. Poser des actions hyper fortes légales et symboliques avec zéro violence qui "choquent" pour interpeller les cerveaux dans le bon sens et a tel point que les médias du monde ne peuvent pas s'empêcher d'en parler.
Exemple : faire une sérieuse petition contre le 3e mandat et un député de l'opposition le brandit a l'assemblée avec en même temps une action symbolique (par exemple tous les députés de l'opposition décident de s'habiller en lambeaux ce jour de tel sorte que ce sera viral dans le monde).
Ou travailler sur la question avec un artiste assez connu pour une œuvre "choc" contre le 3 em mandat et diffuser les images partout
Créer des hashtags avec un message fort dans les réseaux sociaux.
Demander de mettre un message fort en photo de profil sur les réseaux
Mener campagne dans les médias internationaux en rappelant le précédent en 2012 et qu'il en va de la stabilité du pays qui est déjà sous tension a cause de cette question
Il y a plein de façons de faire passer un message.
Faut savoir parfois contourner un adversaire violent pour mieux le désarmer
Dembel
En Octobre, 2011 (21:18 PM)- de par le nombre puisque selon les organisations des droits de l' homme environ 2/3 des 3000 victimes leur seraient imputables
- de par le caractere massif , la cocentration et la barbarie qui leur donnent un aspect genocidaire etant donne que rien qu' a Duekoue en moins de 3 jours, entre le 28 et le 31 mars plus de 800 personnes ont ete sauvagement massacres par les dozos sans compter les viols , les millages incendies et autres actes de barbarie
- et ces crimes sont largement documentes.
Pour la periode anterieure a l' election ce sera surement un travail d' investigation plus long et plus difficile puisque beaucoup de traces et de temoins ont certainement disparu.
Mais rien que les crimes dela periode post-elctorale, particulierement la fin du mois de mars avec la marche sur Abidjan, sont largement suffisants pour envoyer Ouattara, Soro et les com'zones devant la CPI.
Le precedent de El Bechir est la pour montrer qu' un President, meme en fonctions, peut etre traine devant la CPI.
Lion
En Octobre, 2011 (23:15 PM)Les nouvelles autorités d’Abidjan ont inculpé le président Gbagbo pour crimes économiques. Il est cependant curieux de voir l’acharnement qu’elles manifestent de le traduire à la CPI. Cet acharnement pourrait être la preuve que ces autorités ne possèdent aucune preuve de crimes économiques contre le président Gbagbo, mais espèrent son emprisonnement par une CPI aux ordres de l’impérialisme occidental. Gbagbo, une fois en prison loin de territoire ivoirien, ces nouvelles autorités espèrent gouverner en toute quiétude, étant conscientes de sa force de sa nuisance politique s’il recouvre sa liberté. Pour cette raison, le nouveau régime devrait regretter de ne l’avoir pas assassiné dans le feu de l’action du coup d’État du 11 avril dernier. Gbagbo assassiné ou emprisonné, la vérité pour la majorité des ivoiriens rêvant d’une Côte d’Ivoire démocratique, indépendante, libre et souveraine, est qu’on peut tuer ou emprisonner un combattant, mais pas le combat. Ils se montrent toujours déterminés à mener ce combat en transcendant l’individualité, fût-elle charismatique, du président Gbagbo.
ZEKA TOGUI.
Résistance Africaine
En Octobre, 2011 (17:03 PM)Taxi
En Octobre, 2011 (00:20 AM)Participer à la Discussion