
Le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, est souvent marqué par des célébrations et des discours sur l’égalité. Pourtant, pour des millions de femmes à travers le monde, cette date ne fait que raviver des blessures ouvertes, notamment à Goma, en République démocratique du Congo (RDC), une ville tristement surnommée la "capitale mondiale du viol".
Invitée du "Jury du dimanche" sur iRadio, Matina Kizuangui, missionnaire congolaise, a dénoncé la situation dramatique que vivent les femmes dans l’est de la RDC. "Malheureusement, je peux vous dire que c’est vrai ici, si vous avez l’occasion, je vais vous montrer les femmes qui ont subi cette violence. Elles portent les cicatrices de cette guerre qui ne dit pas son nom", a-t-elle répondu d’une voix empreinte d’émotion, interrompant même ses propos pour retenir son sanglot à la question du journaliste qui se demandait si cela était vrai.
Le viol comme arme de guerre
"Depuis des décennies, l’est du Congo est en proie à des conflits armés où les violences sexuelles sont utilisées comme une stratégie de domination et de terreur", dit-elle. Marina Kizuangui rappelle que " les femmes sont violées 24 heures sur 24. Cette guerre ne se fait pas seulement avec des armes, elle se fait aussi sur le corps des femmes. Des milliers de victimes sont laissées sans soins, sans justice et sans espoir, tandis que la communauté internationale reste passive".
Face à cette impuissance, les Congolaises tentent de faire entendre leurs voix. "Nous avons lancé un appel sur les réseaux sociaux pour que toutes les femmes congolaises se mettent en noir, pour exprimer notre désolation", explique Marina Kizuangui. Ce geste symbolique vise à interpeller les organisations internationales et les défenseurs des droits humains.
Un message à Ursula von der Leyen
Dans son plaidoyer, la missionnaire s’adresse directement à Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. "Elle est une femme, une mère de sept enfants. Qu’elle se mette à la place de ces mamans congolaises qui voient leurs filles et leurs sœurs violées jour et nuit, sans que personne ne vienne à leur secours", lance-t-elle. Avant de s’indigner de la différence de traitement entre les femmes du monde occidental et celles de la RDC : "Les enfants de l’Union européenne sont bien logés, bien nourris, bien respectés. Mais ici, une mère ne peut même pas nourrir son enfant. Pourquoi cette indifférence ?".
Le 8 mars : une célébration ou un jour de deuil ?
Alors que dans de nombreux pays, le 8 mars est un jour de fête, Matina Kizuangui estime que cette date ne devrait pas être une occasion de célébration pour les Congolaises. "À l’Est, qu’avons-nous à fêter le 8 mars ? Rien. Nous prions seulement pour ces femmes blessées, nous espérons qu’un jour, elles recevront justice. Mais en attendant, on ne fait rien pour elles. On parle des droits des femmes à l’international, mais de quelles femmes parle-t-on ? Des femmes européennes ?".
Elle critique également le manque d’attention portée aux véritables enjeux lors des événements liés à cette journée. « Au lieu de parler du sort des femmes de l’est du Congo, on assiste à des festivités et des discours vides. Les vrais sujets sont laissés de côté". Matina Kizuangui regrette également que les artistes et influenceurs congolais ne prennent pas une position plus affirmée face à cette tragédie. " Où sont nos musiciens, nos célébrités ? Pourquoi ne parlent-ils pas haut et fort de ce que vivent leurs sœurs ?". Elle reconnaît que certains ont tenté de se positionner, comme Koffi Olomidé, aperçu en uniforme militaire. Mais elle estime que ce n’est pas suffisant. "Peut-être qu’ils parlent à leur manière, mais leur engagement devrait être plus visible". Alors que la situation ne cesse d’empirer, Matina Kizuangui en appelle à une réaction immédiate de la communauté internationale. "Nous refusons cette guerre, nous refusons le pillage de nos richesses. Nous refusons que la femme congolaise continue d’être humiliée et vulnérabilisée. Il est temps d’agir", conclut-elle.
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