Le 08 janvier 2023, les Béninois iront aux urnes pour renouveler les membres du parlement. Un scrutin capital pour les partis politiques. Les enjeux sont énormes surtout dans la perspective des élections générales de 2026.
Le Bénin a basculé dans la violence lors des élections législatives de 2019. Une première dans ce pays paisible d’Afrique de l’Ouest. La cause est connue. Les partis d’opposition n’ont pas pu participer au scrutin, bloqués par des pièces comme le certificat de conformité à la nouvelle charte des partis politiques. Quatre ans après, le pays s’est engagé dans un nouveau processus électoral qui conduira à l’élection des députés de la 9ème législature. Contrairement à 2019, le scrutin s’annonce très ouvert avec la participation de 7 partis politiques. 4 de la mouvance présidentielle et 3 de l’opposition au régime de Patrice Talon. Parmi les quatre partis politiques fidèles au chef de l'État actuel, il y a le Bloc Républicain et l’Union Progressiste, le Renouveau, les deux partis qui contrôlent le parlement depuis 2019. Dans les rangs de l’Opposition, il y a la Force Cauris pour un Bénin Émergent, l’ancien parti de l’ex-président de la République Boni Yayi et Les Démocrates, qui se réclament de l’opposition véritable. C’est d’ailleurs la nouvelle formation politique de Boni Yayi qui en est le président d’honneur. Les Démocrates étaient à un cheveu de manquer une nouvelle fois les élections législatives. En effet, certains de leurs potentiels candidats devaient des sommes colossales au fisc. La Commission électorale a donc rejeté dans un premier temps le dossier de candidature du parti. Il a fallu une décision salvatrice de la Cour constitutionnelle pour que la Cena valide une nouvelle liste introduite par la formation politique en remplacement de l’ancienne qui contenait les noms des débiteurs.
Quid de la Liste électorale informatisée (Lei)
En somme, tout le monde sera au rendez-vous en janvier 2023. Seulement, la Liste électorale informatisée (Lei) qui devrait être utilisée pour ce scrutin n’éloigne pas les acteurs politiques de toutes craintes. L’Agence nationale d’identification des personnes (Anip) qui a conçu cette Lei a certes accepté qu’elle soit auditée, mais les résultats de l’audit ne rassurent pas totalement. Jean Baptiste Elais, l’ex-président de l’autorité nationale de lutte contre la corruption, acteur important des travaux, a déclaré début novembre sur une Webtv, qu’il y a avait des « personnes décédées sur la liste électorale ». Il craint aussi la présence de mineurs et d’étrangers sur cette Lei. Récemment, Jean Baptiste Elias a même invité les étrangers et les mineurs qui se retrouveraient sur la liste électorale à ne pas aller voter le jour du scrutin. Il est important de préciser que la Lei ne fait pas l’objet de débat actuellement, surtout après son audit. Il y a une sorte de consensus autour d’elle. L’opposition et la mouvance savent à quoi s’en tenir et ils ont accepté d’aller aux élections avec cet instrument qui, de l'avis de M Elias, est « acceptable ». « Je n’ai jamais dit que la liste est crédible et fiable » souligne-t-il cependant.
Le piège des 10%
Les Béninois iront donc aux élections avec la Lei. La campagne électorale démarre le 23 décembre 2022. Les partis politiques jouent leur survie dans ce scrutin. Malheur aux vaincus. En effet, selon le code électoral, les partis qui peuvent prétendre à un siège au parlement doivent avoir 10% des suffrages exprimés sur l’ensemble du territoire national. L’objectif est de favoriser l’avènement des grands ensembles politiques. Cette règle des 10% sera le premier tamis parce que s’il y a de grandes formations politiques qui sont capables de l’obtenir à l’instar du Bloc Républicain ; l’Union Progressiste, le Renouveau, la FCBE, ou encore Les Démocrates, il y en a d’autres qui pourraient être en difficulté. Il s’agit du Mouvement Populaire de libération (MPL), un parti politique de l’opposition, le Mouvement des élites engagées pour l’émancipation du Bénin (Moele-Bénin) et l’Union Démocratique pour un Bénin Nouveau (UDBN). On aura peut-être des surprises.
Le parrainage
Une autre bataille va se livrer au niveau des partis qui réussiront à obtenir les 10% des suffrages exprimés. Il s’agira de contrôler le parlement. La formation politique qui réussira à remporter le plus de sièges au parlement est assurée de présenter un candidat à la présidentielle de 2026. Les autres aussi, mais il faudrait qu’ils aient au moins 16 députés élus, parce que selon le code électoral ; le candidat à la présidentielle doit être parrainé par 16 députés ou maires.
Sur ce plan, les partis de la mouvance, en l'occurrence le Bloc Républicain et l’Union Progressiste le Renouveau, ne sont pas vraiment en danger, même s’ils n’arrivaient pas à avoir 16 députés chacun. Ils pourraient toujours solliciter le parrainage des maires issus de leurs partis politiques. C’est plutôt l’opposition qui est en danger. Elle doit absolument gagner ces élections législatives, ou à défaut, avoir 16 députés élus. Rappelons cependant que la FCBE a, lors des élections présidentielles de 2021, obtenu les parrainages des députés de la mouvance. Mais le contexte était bien particulier. La FCBE n’avait pas pris part aux législatives exclusives de 2019. Vu que tous les partis seront dans la compétition, on ignore si la mouvance fera des faveurs à la FCBE en 2026, si elle n’arrivait pas à avoir les 16 députés requis pour le parrainage.
Le taux de participation
L’autre réalité de cette élection sera le taux de participation. Les observateurs avertis de la politique béninoise surveilleront ce taux, parce qu’on avait estimé qu’il était faible en 2019, à cause de l’absence de l’opposition. Selon la Cour constitutionnelle, ce taux était de 27%. Lors des précédents scrutins, cela tournait autour de 60%. Est-ce qu’on assistera à un retour massif des électeurs dans les bureaux de vote et quelles incidences, ce taux de participation aura sur le résultat du scrutin ? Sera-t-il en faveur de l’opposition ou de la mouvance. N’oublions pas aussi la fraude électorale que chaque parti devra surveiller.
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