
Le Soudan du Sud entend défendre à tout prix ce champ pétrolifère frontalier. A Khartoum, on considère désormais le gouvernement du voisin du Sud comme l'«ennemi».
Le Soudan du Sud entend défendre coûte que coûte le champ pétrolifère de Heglig qu'il a pris la semaine dernière au Soudan, à la frontière entre les deux pays où la tension restait «très élevée» mardi, selon le porte-parole de l'armée de Juba.
«Si (les troupes soudanaises) avancent vers Heglig, la SPLA (armée sud-soudanaise issue de la rébellion contre le nord du pays) est prête à répondre et à les repousser», a assuré le colonel Philippe Aguer. «La SPLA les attend à l'extérieur de Heglig.»
A la frontière entre les Etats sud-soudanais d'Unité et soudanais du Kordofan-Sud, où les affrontements armés ont repris de plus belle fin mars entre les deux armées, la situation «est toujours fragile et la tension toujours très élevée», a-t-il déclaré à la presse.
Le colonel n'a cependant fait état d'aucun nouveau bombardement mardi. Il a seulement évoqué un feu dans un champ pétrolifère à la périphérie de la localité de Heglig, déclenché selon lui lundi par un bombardement de l'aviation soudanaise.
Les deux Soudans s'affrontement dans la région depuis fin mars, dans les pires combats depuis l'accession à l'indépendance du Sud en juillet dernier.
Avant de s'y positionner plus durablement mardi dernier, les troupes de Juba avaient déjà brièvement pris Heglig à leurs homologues soudanaises fin mars.
Des
soldats soudanais à Talodi, dans le Kordofan-Sud, à 50 km de la
frontière avec le Soudan du Sud, le 12 avril 2012. (Photo Reuters)
Juba, «ennemi» de Khartoum
Le gouvernement soudanais a averti pour sa part qu'il défendrait son Etat du Kordofan-Sud, dans lequel se trouve, dit-il, Heglig, par tous les moyens. Et la prise de la région de Heglig par le Soudan du Sud a poussé lundi le Parlement de Khartoum à qualifier d'«ennemi» le gouvernement de Juba.
Heglig, dont Juba dit qu'elle ne se retirera pas tant que Khartoum occupera une autre région disputée, Abyei, fait partie des nombreuses zones frontalières que revendiquent toujours les deux Soudans, neuf mois après l'indépendance du Sud.
Le différend sur le tracé de la frontière commune est, avec des accusions réciproques de soutien à des groupes rebelles et le partage des ressources pétrolières du Soudan d'avant sécession, l'une des principales sources de tension Nord-Sud.
A l'indépendance, Juba a hérité des trois quarts des réserves de brut. Et Heglig assure à elle seule aujourd'hui environ la moitié de la production de pétrole du Nord.
La région est donc ultra-stratégique pour Khartoum, qui n'entend pas la laisser échapper.
Ces dernières semaines, les deux capitales se sont livrées, sur le terrain comme en paroles, à une véritable escalade. Cette semaine encore, le Sud a accusé le Nord d'avoir bombardé un camp de Casques bleus dans l'Etat d'Unité, une accusation démentie par le Soudan mais relayée par l'ONU.
Bombardements aériens, tirs d'artillerie lourde : chacun estime être dans son bon droit, en situation de défense, et accuse l'autre d'avoir lancé l'offensive.
Les deux pays se reprochent mutuellement d'avoir choisi la voie d'une nouvelle guerre. Khartoum a claqué la porte de négociations destinées, sous l'égide de l'Union africaine, à apaiser les tensions et les deux capitales semblent rester sourdes aux appels à la retenue de la communauté internationale.
Mardi, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a encore appelé les deux pays à cesser «immédiatement» les combats. Dans le même temps, le président kényan, Mwai Kibaki, appelait la Communauté d'Afrique de l'Est à trouver les moyens diplomatiques de résoudre la crise.
Avant des accord de paix signés en 2005, qui ont ouvert la voie à la partition du pays, le Nord et le Sud se sont livré des décennies de guerre civile. A elle seule, la dernière vague du conflit, entre 1983 et 2005, a fait deux millions de morts.
Le département d'Etat américain a pour sa part «condamné fermement le bombardement de la mission de l'ONU au Soudan du Sud par les forces armées soudanaises», lundi, mais il a également appelé le Soudan du Sud à «retirer ses forces immédiatement et sans conditions de Heglig».
(AFP)
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