Il disait en 2017 lors d'un colloque organisé par l'état-major français tout le mal qu'il pense des missions tricolores en Afrique et des rapports privilégiés entretenus par les militaires venus de Paris avec les présidents africains
Le commandant Mamadi Doumbouya alors stagiaire à l’école de guerre, s’épanchait sans langue de bois lors d’un colloque organisé par l'État-major spécialisé pour l'outre-mer et l'étranger (EMSOM) en novembre 2017, sur la perception des officiers étrangers en Afrique. SenePlus reproduit le verbatim de cette communication qui révèle l’état d’esprit du chef des auteurs du coup d’État en Guinée vis-à-vis de ses homologues occidentaux.
« Bonjour à tous. En tant qu’officier guinéen, je viens témoigner de la perception des officiers français et étrangers servant dans les pays africains. La Guinée est un petit pays de 245 000 km2 qui comprend quatre ethnies qui n’ont rien en commun. Indépendante depuis 1958, la Guinée compte à ce jour 12 millions d’habitants, et son armée environ 19 000 hommes au total.
Le témoignage suivant résulte d’une consultation menée auprès de mes camarades africains de la promotion 25 : des Ivoiriens, des Maliens, des Sénégalais, des Nigérians, etc. Je vous ferai part ici de nos principaux points de convergence.
Les camarades européens ou américains sont accueillis avec une grande fraternité d’arme, mais leur connaissance de l’Afrique nous semble soit trop théorique, fondée uniquement sur des ouvrages, soit réduite aux représentations télévisuelles bien souvent éloignées de la réalité.
Ils nous posent des questions sur les effectifs ou les équipements de nos armées qui nous paraissent souvent suspectes : sachant que ces informations sont disponibles sur Internet, nous les supposons volontiers chargés d’une mission de renseignement.
Sur le plan professionnel, les Français venant en Afrique se révèlent compétents. Ils connaissent leur sujet et leur travail, qu’ils exécutent avec professionnalisme. Mais leurs rapports privilégiés avec nos personnalités politiques nous posent problème. Nos gouvernants préfèrent en effet leur faire confiance plutôt qu’à nous, et les considèrent comme de véritables conseillers, fonctions que nous n’atteindrons jamais. Nous le remarquons très souvent. Par exemple, un colonel ivoirien qui aura suivi toute sa formation en France, à l’instar d’un Français, n’aura jamais l’occasion de parler avec son chef d’État, alors que le Français pourra le contacter dès son arrivée. Ce problème récurrent dans nos débats entre collègues nous frustre beaucoup, d’autant plus que la réciproque reste inenvisageable : jamais un officier africain ne pourra accéder au président de la République française.
De même, les Blancs détiennent un pouvoir inaccessible pour nous. Par exemple, j’ai demandé l’année dernière des munitions pour entraîner mes troupes au tir, mais ne les ai jamais reçues parce que mes dirigeants craignent que je m’en serve pour provoquer un coup d’État. En revanche, le Français qui viendra dispenser une formation à notre attention recevra immédiatement tout ce dont il a besoin de la part de notre gouvernement. Nous nous réjouissons donc de leur venue qui nous permet d’entraîner nos armées, mais nous sommes agacés de constater que nous ne pouvons exercer notre métier dans de bonnes conditions, à la différence des étrangers qui le font à notre place.
Les officiers blancs possèdent un défaut majeur : la plupart du temps, ils sous-estiment les capacités humaines et intellectuelles des Africains, ce qui est particulièrement irritant puisque les officiers africains et français sortent des mêmes écoles, dont l’École de guerre. Mais une fois arrivés en Afrique, les Français se croient souvent plus intelligents et estiment qu’ils maîtrisent mieux le sujet que nous, ce qui n’est que rarement le cas. Nous déplorons leur attitude hautaine. Nous ne sommes pas aussi incompétents qu’ils le croient.
Sur le plan privé, les officiers étrangers privilégient les circuits touristiques au détriment de la vie de leurs homologues africains, qui ne les intéresse pas et restent pour eux des inconnus. Nous le regrettons.
Le regard des militaires étrangers en Afrique a évolué au fil du temps. Autrefois, un Blanc était forcément considéré comme une personne compétente, ce qui n’est plus le cas désormais, puisque nous nous permettons de poser un regard critique sur leurs actions et leurs explications grâce à nos formations plus poussées. En outre, les Français ne semblent pas disposer des moyens de leur politique, puisqu’ils ne viennent plus qu’avec leur théorie. Tandis que les Américains apportent leurs propres outils et matériels, et laissent ensuite tout sur place, les Français demandent au gouvernement la structure, les équipements et les munitions nécessaires à leur projet. Avant les réformes passées, la France se comportait comme les Américains. Nous nous demandons donc si nous sommes encore importants aux yeux de la France, alors que nous avions toujours eu l’habitude de collaborer avec elle. Pour de nombreux militaires, soit la France se désengage volontairement de l’Afrique, soit elle ne dispose plus des moyens de sa politique, à la différence des Américains. Nous préférons pourtant travailler avec des Français, notamment pour des raisons linguistiques, mais il conviendrait de remédier ce problème. »
Le commandant Mamadi Doumbouya alors stagiaire à l’école de guerre, s’épanchait sans langue de bois lors d’un colloque organisé par l'État-major spécialisé pour l'outre-mer et l'étranger (EMSOM) en novembre 2017, sur la perception des officiers étrangers en Afrique. SenePlus reproduit le verbatim de cette communication qui révèle l’état d’esprit du chef des auteurs du coup d’État en Guinée vis-à-vis de ses homologues occidentaux.
« Bonjour à tous. En tant qu’officier guinéen, je viens témoigner de la perception des officiers français et étrangers servant dans les pays africains. La Guinée est un petit pays de 245 000 km2 qui comprend quatre ethnies qui n’ont rien en commun. Indépendante depuis 1958, la Guinée compte à ce jour 12 millions d’habitants, et son armée environ 19 000 hommes au total.
Le témoignage suivant résulte d’une consultation menée auprès de mes camarades africains de la promotion 25 : des Ivoiriens, des Maliens, des Sénégalais, des Nigérians, etc. Je vous ferai part ici de nos principaux points de convergence.
Les camarades européens ou américains sont accueillis avec une grande fraternité d’arme, mais leur connaissance de l’Afrique nous semble soit trop théorique, fondée uniquement sur des ouvrages, soit réduite aux représentations télévisuelles bien souvent éloignées de la réalité.
Ils nous posent des questions sur les effectifs ou les équipements de nos armées qui nous paraissent souvent suspectes : sachant que ces informations sont disponibles sur Internet, nous les supposons volontiers chargés d’une mission de renseignement.
Sur le plan professionnel, les Français venant en Afrique se révèlent compétents. Ils connaissent leur sujet et leur travail, qu’ils exécutent avec professionnalisme. Mais leurs rapports privilégiés avec nos personnalités politiques nous posent problème. Nos gouvernants préfèrent en effet leur faire confiance plutôt qu’à nous, et les considèrent comme de véritables conseillers, fonctions que nous n’atteindrons jamais. Nous le remarquons très souvent. Par exemple, un colonel ivoirien qui aura suivi toute sa formation en France, à l’instar d’un Français, n’aura jamais l’occasion de parler avec son chef d’État, alors que le Français pourra le contacter dès son arrivée. Ce problème récurrent dans nos débats entre collègues nous frustre beaucoup, d’autant plus que la réciproque reste inenvisageable : jamais un officier africain ne pourra accéder au président de la République française.
De même, les Blancs détiennent un pouvoir inaccessible pour nous. Par exemple, j’ai demandé l’année dernière des munitions pour entraîner mes troupes au tir, mais ne les ai jamais reçues parce que mes dirigeants craignent que je m’en serve pour provoquer un coup d’État. En revanche, le Français qui viendra dispenser une formation à notre attention recevra immédiatement tout ce dont il a besoin de la part de notre gouvernement. Nous nous réjouissons donc de leur venue qui nous permet d’entraîner nos armées, mais nous sommes agacés de constater que nous ne pouvons exercer notre métier dans de bonnes conditions, à la différence des étrangers qui le font à notre place.
Les officiers blancs possèdent un défaut majeur : la plupart du temps, ils sous-estiment les capacités humaines et intellectuelles des Africains, ce qui est particulièrement irritant puisque les officiers africains et français sortent des mêmes écoles, dont l’École de guerre. Mais une fois arrivés en Afrique, les Français se croient souvent plus intelligents et estiment qu’ils maîtrisent mieux le sujet que nous, ce qui n’est que rarement le cas. Nous déplorons leur attitude hautaine. Nous ne sommes pas aussi incompétents qu’ils le croient.
Sur le plan privé, les officiers étrangers privilégient les circuits touristiques au détriment de la vie de leurs homologues africains, qui ne les intéresse pas et restent pour eux des inconnus. Nous le regrettons.
Le regard des militaires étrangers en Afrique a évolué au fil du temps. Autrefois, un Blanc était forcément considéré comme une personne compétente, ce qui n’est plus le cas désormais, puisque nous nous permettons de poser un regard critique sur leurs actions et leurs explications grâce à nos formations plus poussées. En outre, les Français ne semblent pas disposer des moyens de leur politique, puisqu’ils ne viennent plus qu’avec leur théorie. Tandis que les Américains apportent leurs propres outils et matériels, et laissent ensuite tout sur place, les Français demandent au gouvernement la structure, les équipements et les munitions nécessaires à leur projet. Avant les réformes passées, la France se comportait comme les Américains. Nous nous demandons donc si nous sommes encore importants aux yeux de la France, alors que nous avions toujours eu l’habitude de collaborer avec elle. Pour de nombreux militaires, soit la France se désengage volontairement de l’Afrique, soit elle ne dispose plus des moyens de sa politique, à la différence des Américains. Nous préférons pourtant travailler avec des Français, notamment pour des raisons linguistiques, mais il conviendrait de remédier ce problème. »
17 Commentaires
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En Septembre, 2021 (08:03 AM)Caporal-chef De La Légion Étra
En Septembre, 2021 (10:56 AM)Reply_author
En Septembre, 2021 (10:58 AM)Reply_author
En Septembre, 2021 (22:00 PM)Sarcea
En Septembre, 2021 (08:09 AM)Reply_author
En Septembre, 2021 (09:33 AM)Ben Diouf
En Septembre, 2021 (08:38 AM)Diop
En Septembre, 2021 (09:17 AM)Reply_author
En Septembre, 2021 (22:02 PM)Une armée, c'est la discipline, sans discipline, chacun fait ce qu'il veut et les coups d'état font légion. Goita et Doumbouya, dans aucun pays normal, ils n'accéderaient au grade de Colonel. Pays de merde, république bananière.
Quand je vois de petits jeunes se réjouir de ces coups d'état et reprocher des choses à l'armée, c'est juste parce qu'il sont jeunes et cons.
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En Septembre, 2021 (12:25 PM)Avant tout il faut faire l'analyse de la situation et la condition d'atmosphérique du Mali, avant Goita prenne le pouvoir, le Mali n'était pas tranquille comme Sénégal.
Pour la Guinee, c'est le même cycle nigériane, c'est l'armé au pouvoir. Entre temps un civile gouverne mais ce n'est pas une transition durable.
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En Septembre, 2021 (22:03 PM)Senghor
En Septembre, 2021 (10:20 AM)Kk
En Septembre, 2021 (10:21 AM)Titeuf
En Septembre, 2021 (11:53 AM)Votre suscpetibilité nous tuera davantage
Titeuf
En Septembre, 2021 (11:53 AM)Ensuite tout ce qu'il faut retenir de son discours, c'est son courage devant l'arrogance de l'eternel colon Francais et son patriotisme pour son pays la Guinee. Dans le fond, il a tout a fait raison sur tout ce qu'il a dit. Concernant la forme, c'est sur qu'il a beaucoup muri entretemps et s'il devait s'exprimer aujourd'hui sur le meme sujet, il s'y prendrait autrement avec la casquette de leader qu'il porte actuellement.
Il faut juste souhaiter une transition paisible et des lendemains meilleurs pour la Guinee.
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En Septembre, 2021 (22:04 PM)Participer à la Discussion