Discutée depuis cinq ans, une loi pour protéger juridiquement les femmes victimes de violences a été adoptée par le Parlement marocain ce mercredi. Les mouvements féministes pointent les insuffisances du texte et le poids des traditions.
Le Maroc a définitivement adopté mercredi 14 février une loi contre les violences faites aux femmes, discutée depuis cinq ans. Le texte incrimine pour la première fois "certains actes considérés comme des formes de harcèlement, d'agression, d'exploitation sexuelle ou de mauvais traitement", selon une note du ministère de la Famille. Mais il est jugé insuffisamment audacieux, aux yeux de plusieurs mouvements féministes.
Le Parlement a entériné un texte discuté depuis 2013, et amendé de multiples fois. Le texte de loi "permettra au Maroc de disposer d'un texte juridique de référence et cohérent susceptible de garantir une meilleure protection des femmes contre toutes formes de violence", a souligné l'agence de presse officielle MAP. La loi prévoit de durcir les sanctions pour certains cas et prévoit des "mécanismes pour prendre en charge les femmes victimes" de violences.
Les critiques et les insatisfactions vis-à-vis de ce texte sont nombreuses : "Cette loi ne modifie que quelques articles du code pénal, alors que celui-ci reste fondamentalement basé sur des concepts obsolètes, comme l'atteinte à la pudeur publique ou la pénalisation des relations sexuelles hors mariage", a réagi auprès de l'AFP Nouzha Skalli, militante pour l'égalité des sexes et ex-ministre en charge des droits des femmes. "Le texte ne prend pas en compte les définitions internationales en matière de violences à l'égard des femmes. Le viol conjugal n'est par exemple pas puni", poursuit-elle.
"Mentalités rétrogrades et misogynes"
Le Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (Mali) a également regretté l'impunité du viol conjugal, se disant "consterné par la persistance au sein du Parlement de mentalités rétrogrades et misogynes".
Au Maroc, médias et ONG tirent régulièrement la sonnette d'alarme sur le fléau de la violence subie par les femmes, en particulier le harcèlement dont elles sont victimes dans l'espace public. Dans un pays qui se veut, selon le discours officiel, chantre d'un islam tolérant et où les femmes n'ont pas l'obligation de porter le voile, marcher seule dans la rue relève parfois du parcours de la combattante : remarques désobligeantes et insultes y sont fréquentes. Autre signe de raidissement social, les femmes en maillot de bain sont de plus en plus rares sur les plages du royaume.
Ces dernières années, plusieurs cas d'agressions ont défrayé la chronique. Le sujet avait été remis au cœur du débat en août dernier avec une vidéo montrant une agression sexuelle collective contre une jeune femme dans un bus de Casablanca. Le gouvernement avait alors promis une "stratégie" pour lutter contre ce fléau.
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