Douze candidats officiels, 5,4 millions d’électeurs, et seulement deux petites semaines de campagne avant la date fatidique du 18 octobre. Match ultime entre les rivaux de toujours, Alpha Condé et Cellou Dalein Diallo, la présidentielle guinéenne est aussi une équation à multiples inconnues.
Au-delà du duel entre le président sortant et l’ancien Premier ministre, quel est le poids des différents candidats ? Quels sont les fiefs électoraux dans lesquels ils espèrent faire le plein de voix ? Et si le vote régional, voire communautaire, est une donnée centrale pour les principaux candidats, qu’en est-il des régions dont aucun leader n’est issu, comme c’est le cas de Boké, Kindia ou encore Conakry ?
En observant le poids électoral des différents bastions revendiqués par les candidats en lice, un début de réponse s’esquisse, sous la forme de la cartographie que nous vous présentons ci-dessous.
Présidentielle en Guinée : les fiefs des principaux candidats
L’opposition n’en reste pas moins suspicieuse quant aux équilibres par région, qui avantageraient selon elle le Rassemblement pour la Guinée (RPG-Arc-en-ciel), le parti d’Alpha Condé.
Kankan, le fief d’Alpha Condé
La région la plus importante par le nombre d’électeurs est en effet celle de Kankan, en Haute-Guinée, bastion historique du parti au pouvoir, qui représente à elle seule 22 % des électeurs nationaux.
C’est d’ailleurs depuis la ville de Kankan qu’Alpha Condé a officiellement lancé sa campagne, le 19 septembre, lors d’une cérémonie qui s’est tenue par visio-conférence.
Le fief du RPG-Arc-en-Ciel a cependant été le théâtre, ces derniers mois, d’une vague de contestations et de manifestations. À l’origine de sa colère, des délestages en série provoqués par des retards dans la construction d’une centrale hydroélectrique.
Alpha Condé bénéficie néanmoins d’un ancrage solide dans la région, de même qu’en Guinée-Forestière, en Basse-Guinée, à Conakry, ou encore dans la région de Faranah, qui était le fief d’origine du président Sékou Touré.
Labé, bastion de Cellou Dalein Diallo
Si l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) de Cellou Dalein Diallo est également en mesure de défier le président sortant dans la capitale, qui regroupe 19 % des électeurs, c’est dans la région de Labé (8 % des électeurs) et dans l’ensemble de la Moyenne-Guinée qu’il dispose de son assise la plus solide.
L’ancien Premier ministre de Lansana Conté a débuté cette semaine une campagne nationale de dix jours à travers le pays. Après une longue période d’hésitation, l’opposant a donc décidé de rompre avec la stratégie du boycott déployée en mars dernier par son parti, l’UFDG, lors du double scrutin couplant législatives et référendum.
Une décision mal accueillie par le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), opposé au troisième mandat d’Alpha Condé.
Premières candidatures
Les fiefs des dix autres candidats en lice sont moins immédiatement identifiables. Pour la majorité d’entre eux, ce scrutin sera en effet le premier de leur carrière de femmes et d’hommes politiques.
L’ancien conseiller d’Alpha Condé Ousmane Kaba, exclu du parti présidentiel en 2016 pour avoir publiquement exprimé son désaccord avec le chef de l’État, a décidé de rompre avec le mot d’ordre du FNDC pour présenter sa candidature. Élu député à Kankan lors des législatives de 2013, il bénéficie d’un parti bien implanté en Haute-Guinée, où il espère ravir des voix au président sortant.
L’avocat Abdoul Kabélé Camara, ancien ministre d’Alpha Condé, a pris la tête du Rassemblement guinéen pour le développement (RGD) à sa sortie du gouvernement en 2018. C’est en Guinée-Maritime, dans la région de la capitale, que l’ancien bâtonnier a le plus de poids politique.
Ibrahima Abé Sylla, candidat de la Nouvelle génération pour la République (NGR), mène cette année sa deuxième campagne présidentielle. Implanté dans la région de Kindia, en Guinée-Maritime, il ne possède cependant pas de fief électoral de poids.
Parmi les candidats pour lesquels cette campagne présidentielle sera un baptême du feu, plusieurs ont également travaillé aux côtés d’Alpha Condé. C’est le cas de la diplomate Makalé Camara, qui fut sa ministre des Affaires étrangères ; et de l’ancienne ministre Makalé Traoré, qui a été sa directrice de campagne lors de la présidentielle de 2010.
Les « régions-pivots »
Autre inconnue dans le scrutin à venir, le comportement des électeurs des régions-pivots, qui seraient qualifiées de « swing states » si le vote se tenait aux États-Unis. Aucun candidat en lice n’est ainsi issu de Guinée-Forestière – qui recouvre la région de Nzérékoré, fief de Moussa Dadis Camara, l’ancien chef de la junte – ni de la région de Boké. Et si Ibrahima Abé Sylla est originaire de Kindia, les votes des électeurs de la région devraient cependant être très disputés.
La géographie politique de Conakry est, elle aussi, très complexe, avec des quartiers traditionnellement acquis au RPG -Arc-en-ciel et d’autres à l’UFDG.
Il faudra aussi compter avec le comportement des électeurs de Sidya Touré, le leader de l’Union des forces républicaines (UFR) ayant décidé de suivre la consigne de boycott du FNDC.
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