
Chargé de mission auprès des autorités sénégalaises «pour renouer le contact entre ces dernières et les combattants qui sont dans le maquis», le Cardinal a émis quelques suggestions importantes allant dans le sens de la reprise du dialogue entre l’Etat et les rebelles du Mfdc. La condition, selon lui, serait la prise en charge par l'État de l'intendance et de la logistique des hommes qui sont dans le maquis.
Toutefois, a-t-il émis quelque réserve sur le point relatif aux vivres et médicaments à faire parvenir à ces rebelles qui, est-il nécessaire de le rappeler, ont juré de tout mettre en œuvre en vue d’obtenir l’indépendance de la partie sud du pays.
Or, leur apporter une telle assistance dans le contexte actuel pourrait s’apparenter comme une initiative visant à renforcer son ennemi, à lui donner la possibilité de rebondir alors qu’il est plus ou moins affaibli. Car rien ne garantit que ces groupes armés vont déposer les armes, curieusement parce que l’Etat du Sénégal aurait subitement décidé de leur venir en aide pour raisons humanitaires.
A ce propos, combien de millions ou de milliards ont été mis sur la table par les régimes précédents sans pour autant arriver à désarmer les rebelles? En attestent les aveux d’un ancien ministre sous le régime sortant, qui révélait soigner et nourrir les rebelles il y a quelques années, et depuis la Casamance ne se porte pas mieux.
Dès lors, plusieurs interrogations s’imposent : dans quel pays au monde un Etat peut-il se donner le luxe de nourrir ses rebelles ? En réservant un écho favorable à cette sollicitation de l’église catholique du Sénégal, l’Etat du Sénégal aura du mal, beaucoup de mal à expliquer aux Sénégalais, qui plus est aux victimes des mines antipersonnel, des braquages à répétition et autres exactions commises dans le sud du pays, les circonstances dans lesquelles il pourrait être amené à entretenir la rébellion casamançaise comme ce fut le cas dans un passé récent, en somme, à nourrir des individus qui constituent une menace à la paix dans le sud du pays ; ces derniers n’étant pas moins que des groupes armés qui défient l’autorité de l’Etat de manière ouverte, et persistent à réclamer avec insistance la partition «non négociable», selon eux, du sud du Sénégal. Nul besoin de rappeler que l’indépendance de la Casamance demeure l’unique objet de leur rébellion vieille de plus de trois décennies.
Ainsi, devant la multiplicité des acteurs autour du conflit, toute tentative destinée au retour de la paix est la bienvenue. Ce qui ne peut être synonyme d’une main tendue de l’Etat à des groupes armés qu’il faut surtout éviter de renforcer, en les entretenant sur le plan financier. Ce serait saper le travail abattu par les forces de défense et de sécurité qui ont perdu assez d’hommes dans un conflit qui n’a que trop duré. Tout en accordant à cette question la place qui sied dans le débat, les priorités de l’Etat du Sénégal devraient plutôt aller dans le sens d’une reconstruction de la paix, notamment par des initiatives et démarches destinées à encourager la réconciliation entre frères et sœurs Casamançais, et non à une quelconque assistance à l'endroit de ceux qui déclarent une guerre ouverte à l’Etat, braquent les populations, pillent et tuent à satiété et en toute impunité. Ils sont les derniers à mériter le soutien de l'Etat qui, le cas échéant, n'agirait pas en Etat responsable.
Éprouver une quelconque sympathie à l'endroit de ces combattants armés pourrait être perçu comme une complicité envers des individus coupables de crimes qu'il convient de condamner avec la dernière énergie, à défaut de pouvoir les traduire devant les juridictions compétentes.
Momar Mbaye
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