Quand Abdoulaye Wade, dans la solitude tragique de sa fonction, décrète, le pays tout entier devait retenir son souffle. Mais l’abus et l’habitude, l’outrance et la redondance usent les ruses et sapent les stratagèmes. Les remaniements succèdent aux réaménagements, les départs télescopent les arrivés. Les gens vont et viennent, viennent et vont. Ce ballet a quelque chose de dangereuse psychosomatique. Notre pays est un corps atteint. La sensibilité des organes touchés affectent le cerveau. Pour reprendre une image chère aux maoïstes, le poisson pourrit par la tête. Plus exposées à la critique, les élites politiques traditionnelles seront les premières à coucher sur le divan .Se croire plus intelligent que les autres est devenu un problème de psychiatre. Endémique et incurable, cette névrose n’est pas une maladie mentale. C’est une maladie des mentalités.
La révolte des magistrats, les immolations par le feu, Barça ou Barsax, aucune piqure n’a rappelé à ces messieurs les limites objectives de la boite crânienne. Mais la dépression économique, politique et sociale du Sénégal est à la fois un symptôme, un remède et un vaccin. « La crise, dit Antonio Gramsci, c’est quand le vieux meurt et le nouveau refuse de naitre. »
Abdoulaye Wade devrait être le premier à faire les frais de la première révolution des mentalités depuis l’indépendance. En un demi-siècle, le politicien classique s’est comporté avec les électeurs avec une certaine désinvolture. C’est le marché de dupes des promesses électorales sans fin et sans lendemains. Mais la vérité de l’an 2000, n’est pas celle de 2012. Et les événements de la semaine dernière le prouvent à suffisance. Le président de la République a encore usé de sa prérogative constitutionnelle de nommer aux emplois civils et militaires. Son remaniement ministériel a été accueilli dans l’indifférence générale. Le citoyen-électeur a pris date avec l’histoire et le calendrier républicain, mais son silence n’est pas acquiescement. Et le retour de Cheikh Tidiane Sy dans le gouvernement, au poste de ministre de la justice a été accueilli par beaucoup de Sénégalais comme la preuve ultime d’un mépris. Nos dirigeants nous prennent pour quantité négligeable. Notre réprobation et notre indignation collective n’affectent pas leur comportement et n’orientent pas leurs décisions. On se trouve devant l’exemple type de lé démocratie du verbiage et du verrouillage. Dis ce que tu veux, je fais ce que je veux. Hosni Moubarak a cru tenir l’Egypte en laisse par cette méthode. La nouvelle de son incarcération est un bon sujet de méditation pour tous les attardés mentaux de la planète. A l’horloge d’un peuple, une seconde peut faire une décennie. Il y a toujours un temps de formation, un moment d’accélération avant le dénouement rapide. Les événements déclencheurs sont imprévisibles, mais les signes du changement sont visibles. Regardez l’opposition traditionnelle sénégalaise, elle semble complètement déboussolée par l’irruption de candidats indépendants crédibles dans la bataille pour l présidentielle 2012. Cheikh Tidiane Gadio et Ibrahima Fall sont quasiment sur la ligne de départ au moment où Benno est prise au piège de ses égos. Parmi les candidats à la candidature unique de l’opposition significative figurent des losers patentés. Entourés pas des laudateurs peu scrupuleux, ils ratent tous les jours le train de l’histoire, de leurs propres histoires. Ces grands malins pensent toujours pouvoir par les mots et la manipulation emporter l’adhésion populaire. Leur égoïsme est une cécité. Il empêche de voir, au de-là des nombrils, les changements en cours dans la société sénégalaise. Le temps de l’amnésie collective est révolu. Le soutien de Ousmane Tanor Dieng à Laurent Gbagbo restera dans les mémoires. Abdoulaye Wade n’est pas le seul problème de notre pays. Son âge et ses actes de tous les jours le placent loin du futur. Son dernier remaniement pose le débat sur ses intentions réelles. Un candidat à la présidentielle a forcément besoin de fort en thèmes comme Bamba Ndiaye et Serigne Mbacké Ndiaye. Mais le conseil des ministres est devenu le carnaval de Roume. Jamais, les sénégalais n’ont vu passer autant de masques. En un seul jeudi.
5 Commentaires
Kkk
En Mai, 2011 (16:15 PM)Me
En Mai, 2011 (18:12 PM)Lune
En Mai, 2011 (08:58 AM)Tuff Gong
En Mai, 2011 (10:50 AM)Ygr,ual
En Mai, 2011 (13:48 PM)Participer à la Discussion