Au terme d’un sommet tenu, ce week-end, à Abuja, la Commission de la Cedeao a désigné les chefs d’État sénégalais et Faure Gnassingbé du Togo, pour prendre langue avec leurs homologues du Mali, du Burkina et du Niger. Ces trois pays, regroupés autour de l’Alliance des États du Sahel (AES), ont mis en place la veille une confédération.
Pour son premier sommet, le chef de l’État sénégalais n’a pas hésité à mettre le couteau dans la plaie, en rappelant d’abord les membres de la Cedeao à se départir des clichés et stéréotypes qui la réduisent à la posture d’une organisation soumise aux influences de puissances extérieures et distante des populations qu’elle a la responsabilité historique de servir.
Par-là, ce jeune président, souverainiste, préconisant une rupture à tous les niveaux, veut expliquer la conception très répandue dans la sous-région selon laquelle beaucoup de figures de la Cedeao sont des « préfets » de la France.
« Aujourd’hui, force est de constater que la Cedeao fait face à de nombreux défis au quotidien. Cela remet profondément en cause nos acquis en matière d’intégration avec un risque réel de désintégration de notre communauté (…) Il est impératif que nous poursuivions nos efforts pour des retrouvailles de toute la famille afin de consacrer toutes nos forces et nos ressources aux projets et initiatives communautaires qui nous rassemblent », est convaincu M. Faye, qui a, tout de même, réitéré l’ancrage de son pays dans ladite organisation.
Ce n’est donc pas un hasard si les membres de la Commission ont porté leur choix sur ce président, issu de la nouvelle génération de jeunes Africains, pour donner un nouveau souffle à cette organisation qui, il faut le dire, a perdu de sa crédibilité. Bassirou Diomaye Faye entretient une proximité avec les États de l’Alliance des États du Sahel. Sa posture souverainiste lui offre une certaine légitimité pour jouer un rôle de médiateur entre l’Aes et la Cedeao. Opposant, il avait une position critique envers la Cedeao dont, à ses yeux, il fallait revoir un certain nombre de choses qui posent problème », tout en mettant en avant le dialogue. Une démarche qu’il a adoptée aussitôt après son accession à la magistrature suprême.
Il a ainsi rendu visite aux voisins immédiats que sont la Côte d’Ivoire, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée et la Mauritanie, avant d’aller à la rencontre des pays de l’Aes dirigés par des régimes militaires.
À l'origine de l'Aes, un pacte de défense mutuelle !
C’était le 16 septembre 2023 : les autorités du Niger, du Mali et du Burkina Faso signent la charte dite de Liptako-Gourma, un pacte de défense mutuelle. L’acte de naissance de l’Aes, l’Alliance des États du Sahel. À l’époque, la Cedeao menaçait alors d’intervenir militairement contre les militaires au pouvoir au Niger, suite au coup d’État du 26 juillet 2023.
Depuis, le Niger, le Mali et le Burkina Faso ont annoncé sortir de la Cedeao. Ils reprochent à l’institution communautaire d’être une organisation inféodée à l’extérieur, estimant que des pays non africains, non membres, influencent ses choix. Ils ont cité des chefs d’État de la sous-région par lesquels les puissances étrangères seraient passées pour influencer les décisions. Eux, ils veulent une organisation qui ne dépend d’aucune structure non africaine.
Le président sénégalais, qui avait cette même lecture étant opposant, a insisté, dans ses différentes sorties à propos de la Cedeao, sur la « nécessaire réforme » afin de concrétiser l’indépendance de l’organisation.
Lorsqu’ils appartenaient encore à la Cedeao, le Mali, le Burkina Faso et le Niger, trois poids lourds du Sahel central jouissaient des mêmes avantages économiques que les douze autres pays membres. Mais après leur retrait définitif, les réalités pourraient désormais ne plus être les mêmes. Outre les projets communs et la création de monnaie unique de la communauté, une multitude de secteurs d’activité sont menacés par cette rupture. Des économistes craignent aussi des conséquences économiques du retrait des pays de l’AES de la Cedeao jusque dans les pays voisins.
Un lourd tribut économique
D’ailleurs, dans un discours on ne peut plus alarmiste, prononcé lors du 65e sommet, Omar Alieu Touray, le président de la Commission de la Cedeao, a dressé un sombre tableau de la situation. « Notre région n’a jamais connu simultanément autant de défis depuis de nombreuses années. En effet, en dehors de nombreuses menaces liées à la paix et à la sécurité ainsi que des défis liés à la pauvreté, notre région est également confrontée au risque de désintégration », a-t-il martelé, citant la décision du « Burkina Faso, du Mali et du Niger » de quitter l’organisation « avec effet immédiat ».
Ce retrait brutal des trois nations pourrait avoir des implications dramatiques, selon M. Touray. « Il est évident que la désintégration perturbera non seulement la liberté de mouvement et d’établissement des personnes, mais elle aggravera également l’insécurité dans la région », a-t-il prévenu.
Sur le plan sécuritaire, le diplomate gambien redoute que ce divorce ne porte « un coup dur à la coopération en matière de sécurité, notamment en termes de partage de renseignements et de participation à la lutte contre le terrorisme ». Une inquiétude de taille pour cette région en proie aux attaques djihadistes meurtrières.
Pire encore, l’isolement guette le Burkina, le Mali et le Niger sur la scène internationale, puisqu’ils « ne pourront plus bénéficier d’un soutien de bloc » au sein d’instances comme l’Union africaine ou l’ONU, a notamment regretté le président de la Commission.
Au-delà des aspects sécuritaires et diplomatiques, c'est l'avenir économique de la région qui est en jeu. Car, le retrait des trois États membres pourrait entraîner l’arrêt ou la suspension de tous les projets et programmes de la Communauté dans ces pays, pour une valeur totale estimée à plus de 500 millions de dollars. Sans oublier les investissements menacés des institutions financières régionales comme la Banque d’investissement et de développement de la Cedeao (environ 321 millions de dollars).
Pour dire donc que les défis sont énormes. Si le président Bassirou Diomaye Faye, en facilitateur, parvient à faire revenir ces pays de l’Aes dans les rangs, il s’adjugera une nouvelle image et rehaussera la diplomatie sénégalaise qui a déjà eu des succès sous le règne de son successeur Macky Sall, qui a eu à porter à plusieurs reprises la voix de tout le continent étant président de l’Union africaine (Ua).
9 Commentaires
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En Juillet, 2024 (12:42 PM)La Survie De La Race Noir
En Juillet, 2024 (12:47 PM)🇸🇳 ✊🏿
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En Juillet, 2024 (13:21 PM)Dieu nous en préserve
God Bless Africa
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En Juillet, 2024 (13:23 PM)Cedeao
En Juillet, 2024 (13:12 PM)La Cedeao a été créée en Mai 1975, et donc plus vieille que beaucoup d’acteurs politiques d’aujourd’hui.
Combien de Chefs d’Etat des 15 pays , tous plus africanistes les uns que les autres, aimant leur pays , voulant le développement du Continent y ont siégé ?
Aujourd’hui des putschistes de 3 pays dont les prédécesseurs, civils ou militaires, ont tous siégé au Comité des Chefs d’Etat, viennent insulter les autres disant que la Cedeao est influencée ou manipulée par la France, tout parce qu’ils sont mécontents des sanctions qui sont appliquées à leur pays pays.
Ces mêmes sanctions, qui sont prévues dans la charte de la Cedeao, ont pourtant bien appliquées par le Mali, le Burkina et le Niger, par les Alpha Oumar konare du Mali ,Compaore, du Burkina, Issoufou du Niger contre la Gambie et la Guinée Bissau.
Pourquoi ne doit pas les appliquer contre les 3 pays dits EAS.
Il n’y a donc rien à réformer, sinon il faut le faire en interne, c’est le travail des experts en interne qui font des propositions aux Chefs d’Etat qui sont membres.
Ces Chefs d’Etat doivent être plus fermes car c’est la seule façon d’emmener les peuples de ces Êtas de l’AES à se débarrasser de ses dictateurs :
Quand le passeport sera leur sera supprimé, le visa leur sera exigé pour leur voyage dans les autres pays, les projets financés par la Cedeao stoppés, ces gens reviendront à la raison sous la pression des populations.
Il va arrêter ce cirque.
Sénégalais
En Juillet, 2024 (14:50 PM)Le Sénégal n’a rien à faire avec des pays dirigés par des putschistes qui ont confisqué le pouvoir du peuple.
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