
Un, deux, trois, quatre…
En l’espace de deux mois, des Sénégalais de l’extérieur ont été victimes d’une série de tueries en Europe, mais pas uniquement sur ce continent, parce qu’un pays africain s’est également illustré dans ce bilan macabre. Après Florence en Italie et Barcelone en Espagne, le Sénégal a enregistré la mort d’un Sénégalais froidement abattu, le 4 janvier 2012, par la police sud-africaine à Johannesburg. L’on peut, dès lors, se demander ce qui peut bien arriver à nos concitoyens de la diaspora. Sont-ils des Sénégalais au même titre que nous qui sommes sur notre territoire ? Tout laisse à penser que les autorités sénégalaises en veulent après leurs citoyens de la diaspora. Aucune considération à leur égard, sinon des tracasseries et des injustices qui viennent s’ajouter à leur situation déjà désastreuse dans les pays de résidence.
L’on se souvient de la restriction apportée par l’Etat sur les importations de véhicules, alors que tout le monde sait que ce créneau était une véritable bouffée d’oxygène pour cette frange de la population sénégalaise et les familles qu’elle entretient. L’on se souvient également des taxes aéroportuaires inventées pour financer l’aéroport international Blaise Diagne et de la récente surtaxe que l’Etat sénégalais vient d’imposer sur les appels internationaux entrants. Et comme si tout cela ne suffisait pas, voilà que les autorités opposent un mépris total et un silence dérangeant voire complice sur la situation inquiétante des Sénégalais de l’extérieur. Tout porte à croire qu’on cherche à les humilier ou tout simplement les dépouiller de leur humanité. Pauvres Sénégalais de l’extérieur !!!
On les tue, loin de chez eux, mais on ne les déshonorera point !
Pendant que les Sénégalais se font massacrer à l’étranger, les autorités étatiques qui devraient leur assurer protection, assistance et réconfort, sont plus préoccupées par des festivités. En lieu et place d’une semaine des migrants, le ministère des Sénégalais de l’extérieur ferait mieux de s’intéresser à cette situation calamiteuse qui ne peut plus durer. Je me demande, d’ailleurs, si ceux qui sont censés s’occuper des migrants sénégalais savent ce qu’ils ont à faire. Sinon, comment comprendre qu’une semaine dédiée aux migrants soit organisée dans le pays d’origine, ici au Sénégal. Quelle est la cible du ministère des Sénégalais de l’extérieur ? Les migrants en vacances ou les Sénégalais de la Diaspora ? Je pense que si on veut atteindre une cible, la meilleure des façons est de la trouver sur son espace naturel qui est tout autre que le Sénégal, mais plutôt les lieux de destination. Je préfère parler de lieux de destination, parce que beaucoup de Sénégalais sont dans des pays où ils sont tout sauf bien accueillis. Une approche plus prudente et plus pertinente recommanderait donc de ne point réfléchir à la place des principaux concernés.
Cette attention serait plus que méritée, parce que les émigrés sont de véritables régulateurs sociaux pour le Sénégal. Imaginez un jour sans envois de fonds vers le Sénégal. Imaginez une semaine sans ces précieux transferts d’argent des ‘modou-modou’ et des ‘fatou-fatou’. Imaginez un mois sans ‘Western Union’ ou ‘Money Express’ ou encore ‘Ria’ vers le Sénégal ! Je demeure convaincu que ces autorités qui les négligent tant auraient tous les problèmes du monde. Quand est-ce que les autorités sénégalaises vont enfin comprendre que ceux-là qu’on tue à tort et à raison à l’extérieur sont les gardiens du climat social ?
D’autre part, les Sénégalais de l’extérieur sont également parmi les principaux contribuables de l’économie sénégalaise. Sinon qui d’autre peut se targuer de faire mieux ? Qui est capable de faire bénéficier plus de 600 milliards de francs Cfa/an au Sénégal. On peut donc continuer à fermer les yeux sur ces incidents macabres, mais on ne pourra jamais les déshonorer. Alors debout et protégeons ces vaillants ‘soldats de l’économie’!
Compte tenu de l’importance des flux financiers générés par les migrants sénégalais et leur rôle dans le tissu social et économique de leur pays, je pense qu’il est temps que les autorités sénégalaises prennent les citoyens de la diaspora au sérieux. Il est inadmissible que ces Sénégalais continuent de subir ce genre d’actes de violence. J’estime que la mort de ces Sénégalais, loin des leurs, est non moins importante que celle enregistrée dans notre propre pays. Autrement dit, les questions migratoires doivent impérativement s’inviter dans le débat politique actuel. Elles devraient constituer une préoccupation centrale, pour ne pas dire la préoccupation majeure, de tous ceux ou de toutes celles qui aspirent à diriger le Sénégal. Que tous les candidats à la prochaine élection présidentielle s’expriment franchement sur la manière dont ils comptent améliorer le vécu quotidien des Sénégalais de l’extérieur. Qu’ils se prononcent clairement sur les contours et les pourtours de la politique qu’ils comptent mettre en œuvre s’ils sont élus.
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