Volte-face des footballeurs togolais. Ils décident de participer à la Coupe d'Afrique des nations qui s'ouvre ce dimanche en Angola, après avoir déclaré forfait suite au mitraillage de leur équipe par les rebelles de l'enclave du Cabinda. Alors que Lomé insiste pour le retour de ses joueurs, les indépendantistes du Flec menacent de mener de nouvelles attaques.
Les joueurs de la sélection du Togo ont signé un coup de théâtre en annonçant dans la nuit de samedi à dimanche qu'ils participeraient finalement à la Coupe d'Afrique des nations en Angola, "en mémoire" des deux membres de leur encadrement morts après l'attaque de vendredi.
Mais le Premier ministre du Togo Gilbert Fossoun Houngbo a assuré que l'équipe nationale de football "doit rentrer" dans son pays et quitter la Coupe d'Afrique des nations (CAN) en Angola. "Si à l'ouverture de la CAN (...), une équipe ou quelque personne se présente sous la bannière du Togo, ce serait une fausse représentation. L'équipe doit rentrer ce jour", a déclaré M. Houngbo à la presse togolaise ce dimanche matin.
"L'équipe doit rentrer. La décision du gouvernement est inchangée. C'est une décision mûrie depuis vendredi. Nous avons compris la démarche des joueurs qui voulaient exprimer une manière de venger leurs collègues décédés, mais ce serait irresponsable de la part des autorités togolaises de les laisser continuer", a indiqué le Premier ministre.
"En mémoire de ses disparus, l'équipe nationale a décidé de participer à la CAN, a déclaré à l'AFP un des joueurs, Thomas Dossevi. On a tous très mal au coeur, ce n'est plus une fête, mais nous avons envie de montrer nos couleurs, nos valeurs et que nous sommes des hommes".
"C'est une décision qui a été prise à la quasi-unanimité par le groupe qui s'est réuni dans la nuit et a décidé cela après avoir été rassuré par les autorités angolaises", a-t-il poursuivi.
"Si on reste ici, c'est pour eux"
Sur le site internet du quotidien sportif français l'Equipe, Alaixys Romao, le milieu togolais de Grenoble, a confirmé la position de l'équipe togolaise: "Nous serons sur le terrain lundi pour affronter le Ghana", dit-il. "Des personnes sont mortes pour cette CAN, d'autres sont blessées. On ne peut pas les abandonner et partir comme des lâches. Si on reste ici, c'est pour eux. Mais aussi pour ne pas donner satisfaction aux rebelles. Notre gouvernement n'est pas forcément d'accord avec nous mais nous sommes tous déterminés à jouer cette compétition".
Le sélectionneur Hubert Velud a assisté à la réunion des joueurs "mais il ne pouvait pas trop s'avancer", a dit Thomas Dossevi, avant d'ajouter: "A chaud, tout le monde pensait rentrer. Les autorités togolaises ont mis en place une cellule psychologique qui a évalué notre état mental. Personne n'est muré dans le mutisme. On a été perturbé, mais on va tâcher de participer".
Cette décision de disputer le tournoi prend à contre-pied la tendance qui se dégageait depuis le mitraillage du bus de la délégation togolaise vendredi par un groupe indépendantiste, les Forces de libération de l'Etat du Cabinda-Position militaire (Flec-PM), qui a coûté la vie au chargé de communication Stanislas Ocloo et à l'entraîneur-adjoint Abalo Amelete.
Le gouvernement veut "maintenir" le retour des Togolais
Le gouvernement togolais "maintient sa position" de rappeler son équipe de football, a déclaré dimanche à l'AFP Pascal Bodjona, porte-parole du gouvernement, malgré la décision des joueurs de participer à la Coupe d'Afrique des nations après la fusillade de leur bus.
Hubert Velud avait d'ailleurs indiqué à l'AFP, samedi après-midi, que la délégation togolaise allait s'envoler dès dimanche matin de l'enclave.
Un des membres de la délégation de la CAF missionnée samedi matin à Cabinda, Kodjo Samlan, avait aussi affirmé à l'AFP qu'un avion affrété par le Togo était stationné à l'aéroport de Cabinda afin de rapatrier les joueurs.
"Nous ne pouvons pas continuer dans cette circonstance de drame la compétition de la CAN", avait même déclaré à Lomé samedi après-midi le porte-parole du gouvernement togolais Pascal Bodjona, demandant ainsi aux joueurs de rentrer.
Le président de la Confédération africaine (CAF), Issa Hayatou, s'était rendu auprès des Togolais samedi pour tenter de les rassurer et de les convaincre de jouer. Il leur a également fait savoir que la décision de participer leur appartenait.
La CAF "voit ses intérêts en premier"
"Si vous choisissez de quitter la compétition, nous comprendrons votre décision et nous l'accepterons", avait-il dit, assurant que la CAF n'appliquerait pas les sanctions prévues en cas de forfait d'une équipe.
Mais l'équipe s'est dite très remontée contre la CAF, qui n'a pas souhaité "arranger un délai" ou "reporter" le premier match, prévu dès ce lundi contre le Ghana (18h30 GMT), "ne serait-ce que pour enterrer nos corps", a dénoncé Thomas Dossevi.
La CAF "voit ses intérêts en premier et pas ceux des pays, a encore regretté le joueur qui évolue à Nantes (D2 française). Nous sommes conscients des enjeux et nous n'avons pas envie de partir en lâches. Elle ne nous a pas soutenus assez".
Le Flec menace
Les Togolais sont toujours rassemblés à l'intérieur du village olympique, protégé par des forces militaires nombreuses et où se trouvent également les délégations de la Côte d'Ivoire et du Ghana, a constaté un journaliste de l'AFP. L'hôpital H28, où les blessés de l'attaque ont été soignés, se trouve à proximité.
L'attaque a été revendiquée par un groupe indépendantiste, les Forces de libération de l'Etat du Cabinda-Position militaire (Flec-PM), né en 2003 d'une dissidence du principal mouvement séparatiste, le Front de libération de l'enclave du Cabinda (Flec).
"Les armes vont continuer à parler", a menacé dimanche le secrétaire général du FLEC-PM en exil en France, Rodrigues Mingas, dans un entretien téléphonique avec l'AFP.
"Ca va continuer parce que le pays est en guerre, parce que M. Hayatou (Issa Hayatou, le président de la Confédération africaine de football) s'entête" à maintenir des matches de la CAN à Cabinda, a-t-il poursuivi.
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