
Le « Faniké », la cérémonie marquant la sortie des circoncis en milieu mandingue a été célébrée dimanche 28 septembre 2014 à Mbour (située sur la Petite-Côte, à environ 80 km au sud de Dakar). Venus de divers horizons, la capitale de la Petite Côte est prise d'assaut par plusieurs sénégalais et même par des étrangers, curieux de découvrir les rites initiatiques mandingues et le Kankourang, génie-Protecteur des nouveaux circoncis.
A cette période, Mbour est en pleine effervescence. Un mois de kankourang. Un mois de folie qui se termine à Mbour. Durant tout le mois de septembre, bienvenue les nuits blanches. Les populations, curieuses et attendant patiemment la sortie du Kankourang, ne dorment plus.
Ce dimanche (28 septembre 2014), marquant la cérémonie de clôture, les mbourois ont encore une fois dansé et chanté au rythme de leur « Jambo » favori. Une déformation idiomatique imposée depuis quelques années, par tous ceux qui ne parlaient pas la langue mandingue et qui trouvaient en ce mot, l'expression la plus simple pour parler de la danse des feuilles « le Jambadong ».
A 17 heures, à l'heure où le soleil pointait ses rayons vers le coucher, c'était déjà, la ruée vers Dialma, Guinaw rails, Thiocé, Santossou, et Serrekunda les cinq « Leuls » (maisons des initiés) de la ville. Tout prétexte dissuasif est mis en avant pour se faire remarquer. Des sifflets, des courses effrénées, des cris, de la poussière campent le décor. De véritables moments de joie et de montée d'adrénaline. A ses cris, s'ajoutent par moment les cris du Kankourang qui faisaient disperser soudainement la foule.
Regard épars, sourire aux lèvres, Fatou Ngouka Ndoye, une jeune léboue, ne rate jamais cet évènement. Cependant, si cette léboue de teint clair affirme son loisir de suivre le Kankourang, ce n'est pas le cas pour un de ces frères, qui a préféré rentrer sur Dakar le même jour.
Fatou Ngouka Ndoye persiste et signe ''le Kankourang veille sur la population mais surtout sur les initiès. Hormis cela, cet évènement incontournable est un divertissement pour tous mbourois. Aussi, si le Koukourang sort on a des sensations extraordinaires.''
Embouchant la trompette, un spectateur fait le portrait grand format du Kankourang.
''De visu, le Kankourang est un personnage mythique recouvert des fibres extraites de « Fara » (écorces d'arbre rouges en mandingue). Très craint, voire violent, il parcourt les rues en terrorisant la population pour protéger les jeunes circoncis pendant leur initiation'', a-t-il déclaré.
Selon Souleymane Mandiang, un ancien initié, ''le Kankourang joue aussi un rôle de régulateur et de préservation des valeurs sociales. Selon la tradition, le Kankourang est respecté. Si y a un phénomène ou une maladie qui sévit dans un village, les sages font appel au Kankourang''.
Les femmes sont interdites de suivre le Kankourang. Malgré cela, certaines d'entre elles grouillent de partout, parfois s'adonnant au jeu de cache-cache pour le suivre au dépend de leur vie.
Mais amusant quand même pour certaines comme l'explique cette mbouroise du nom de Néné ''je ne peux même pas vous décrire mes sentiments. En tout cas, quand j'ai vu le Kankourang, je ne sentais plus mes jambes. A un moment j'ai cru que j'avais fait une paralysie''.
Au cours de la cérémonie, personne n'ose prendre des images du Kankourang pour ne pas connaitre le même sort que le pauvre européen « solima », qui avait suivi le Kankourang toute la journée avec ses belles prises risquées, et a failli trouver la mort en voulant juste raconter à ceux qui ne le savaient cette belle histoire qui se passait à Mbour. L'on constate aussi des heurts entre les spectateurs provocateurs et les Sélbés qui veulent que personne ne s'approche du kankourang. Il arrive aussi que des accompagnateurs s'en prennent aux non initiés qui se moquent du symbole de la cosmogonie mandingue.
Jusqu'au coucher du soleil, hommes et femmes, accompagnateurs du Kankourang tous ont été tenus en haleine par le plus grand percussionniste de la ville, Tapha, regrettant pour l'essentiel que les choses se terminent si tôt.
Le Kankourang disparait pour ne revenir qu'au mois de septembre prochain. Cependant, Mbour reste une ville de tradition, de culture mais encore de Kankourang depuis sa rencontre avec le maître de la forêt au début du siècle.En 2005 le kankourang a été élevé au rang de patrimoine culturel immatériel de l'humanité par l'UNESCO.
MBB – www.rts.sn
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