Le jeune écrivain Babacar Ndiaye diplômé de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis et qui a poursuivi ses études à l’Institut de Mathématiques Appliquées (IMA) à Angers et à l’Université Paris Dauphine en France. Dans cet entretien, il soutient que le système éducatif du Sénégal, du Préscolaire à l’Université est un canal de transmission de « savoir » et non « savoir-faire » encore moins de « savoir-faire faire ». Mieux, il a formulé des recommandations pour changer la donne. Il a jeté aussi un regard critique sur le Franc Cfa qui est à ses yeux complètement déconnecté de nos réalités économiques et de nos besoins en politique monétaire.
Qui est Babacar Ndiaye ?
Je suis un jeune sénégalais. Je suis statisticien, financier et actuaire de formation. J’ai passé une partie de mon cursus scolaire au Sénégal et l’autre en France. J’ai commencé ma carrière professionnelle au sein d’AXA Global P & C à Paris en 2010. Ensuite, j’ai rejoint des cabinets internationaux en France. Parallèlement, je dispensais des cours aux niveaux Master à l’Institut de Mathématiques Appliquées (IMA). En 2017, après 10 années en hexagone, j’ai décidé de rentrer au Sénégal pour contribuer de près à son développement.
Qu’est-ce qui vous a motivé à écrire votre ouvrage ?
Je suis animé par un fort désir de contribuer au bien-être des Sénégalais. C’est ainsi que l’idée m’est venue de partager une vision et des propositions de solutions. Les thèmes suivants sont abordés dans ce livre intitulé « La France à fric » : monnaie et finance internationale, économie, système éducatif, santé, corruption, retraite et protection sociale.
Est-ce que ce n’est pas facile de concilier les métiers de statisticien et financier et celui d’écrivain ?
Je ne me considère pas comme écrivain, même si j’ai publié un premier ouvrage. Je ne suis qu’un simple citoyen soucieux de la marche actuelle du pays et désireux d’apporter sa modeste contribution.
Le système éducatif au Sénégal est abordé dans votre ouvrage. Qu’est-ce qui peut le justifier?
Le « système éducatif » constitue un des six thèmes développés dans le livre. Au Sénégal, il est confronté à d’énormes difficultés. Nous avons axé nos analyses et suggestions autour de 3 points fondamentaux. Il s’agit d’un système éducatif non approprié à notre structure démographique
Quelle est la réponse que vous proposez par rapport à la structure démographique ?
Le modèle diang diangalé a été proposé pour corriger l’inadéquation de notre système éducatif à notre structure démographique. En résumé, il est fondé sur une solidarité intergénérationnelle et une décentralisation de la transmission des connaissances comme déjà pratiqué dans les grands daara et centres éducatifs chrétiens, etc. (A préciser que ce modèle ne fait pas allusion au contenu du système éducatif mais uniquement à son organisation).
A maturité, ce modèle permettrait d’éradiquer les grèves récurrentes. Par ailleurs, d’après une première estimation brute, les économies réalisables pourraient se chiffrer à plus de 100 milliards de franc CFA par an tout en assurant un meilleur résultat scolaire.
Quel est votre regard par rapport aux contenus des programmes ?
Le continent africain est jeune et est en construction. Il doit être construit essentiellement par sa population. Pour cela, il faut que cette dernière soit formée à travers un système éducatif performant et approprié alliant à la fois transmission de « savoir » et de « savoir-faire » dès le bas âge. Au Sénégal, la majorité des écoles, du préscolaire au supérieur, sont des canaux de transmission de « savoir » et non de « savoir-faire », encore moins de « savoir-faire faire ». En d’autres termes, le système produit majoritairement des profils avec connaissances théoriques sans aucune pratique. Par ailleurs, l’esprit d'entrepreneuriat n’est pas inculqué durant le cursus scolaire, au contraire, c’est le modèle du salariat, inadapté en ce moment, qui l’est implicitement.
Après le diagnostic, passons aux propositions :
· inclure des enseignements pratiques en les mettant en lien avec les enseignements théoriques ;
· à l’école primaire, penser à adopter (ou combiner avec) une approche holistique dans l’élaboration des cours et exercices. En effet, l'approche traditionnelle avec des matières parfois restrictives peut être un facteur de blocage pour certains apprenants. Par exemple, élaborer des exercices dont la résolution fait appel à plusieurs matières afin de déceler facilement les points forts des élèves en théorie et en pratique.
· enrôler et valoriser les ateliers techniques (mécaniciens, menuisiers, tailleurs, cordonniers, forgerons, etc.) pour les formations pratiques. Ces ateliers sont de véritables écoles.
· financer, moderniser, équiper ces ateliers en contrepartie ;
· enrôler et valoriser les daara, les centres éducatifs chrétiens, etc. et toute structure informelle dont la substance est jugée utile à la formation des jeunes conformément à nos besoins. Cela nécessite un approfondissement et entrera dans la deuxième phase de ce travail qui implique toutes les parties prenantes ;
· financer, moderniser, équiper ces structures en contrepartie ;
· enrôler et valoriser les écoles et centres de formations sportifs pour allier le sport avec un choix de disciplines variées (lutte, football, volley ball, hand ball, rugby, natation, etc.) pour permettre aux jeunes d’allier sport et étude à des proportions bien étudiées ;
· financer, moderniser, équiper ces centres en contrepartie. Aménager les stades afin qu’ils soient de véritables écoles sport/étude en étant opérationnels tout le temps ;
· orienter le programme vers l’enracinement d’abord, l’ouverture après. Concrètement, les programmes d’histoire et de géographie, par exemple doivent insister dans un premier temps sur la connaissance du pays et de ses figures telles que Cheikh Omar Foutiyou Tall, El Hadji Malick Sy, Cheikh Ahmadou Bamba, Cheikh Ibrahima Niass, Seydina Limamou Lahi, Cheikh Bou Kounta, etc. Des modèles d'entrepreneuriat doivent également inspirer notre jeunesse. Nous pensons à El Hadj Djily Mbaye, Ndiouga Kébé, Diallo Pithie, Aliou Sow (CSE), Bocar Samba Dièye, Serigne Mboup, Ndiaga Ndiaye, Abdoulaye Dia, etc ;
· mieux exploiter les TIC pour certaines matières qui ne nécessitent pas forcément une présence physique permanente. Ce qui peut favoriser l’émergence de filières peu ou pas développées dans le pays telles que l’intelligence artificielle, la robotique, la physique médicale, l’actuariat, les data science, etc. à travers des enseignements à distance mettant en œuvre les compétences universitaires locales et de la diaspora.
L’apprentissage dans nos langues est souvent recommandé. Comment peut-on le rendre effectif ?
A long terme, les dégâts causés par l’apprentissage en français sont incommensurables. Écrivant en français, je précise que je ne récuse pas l’apprentissage du français, mais en français.
Tout pays a des génies. S’ils sont bien encadrés, un d’entre eux peut faire une invention qui révolutionne le pays pour des siècles. Toutefois, notre système éducatif, tel qu’il est conçu en ce moment, est en train de les noyer. Combien de génies par an ? À côté de combien d’inventions sommes-nous passés ? Combien nous coûtent toutes ces inventions ratées ? Nos enfants doivent pouvoir apprendre avec nos langues maternelles.
Quel est votre point de vue sur le franc CFA ?
Le franc CFA n’est pas notre monnaie, c’est une subdivision fixe d’une autre qu’est l’euro. Le francs CFA est complètement déconnecté de nos réalités économiques et de nos besoins en politique monétaire. Par conséquent, nous, pays des zones franc CFA (UMOA et CEMAC), n’avons pas notre propre monnaie, ne menons pas notre propre politique monétaire, nous subissons. A défaut d’une monnaie unique mondiale qui serait l’idéal pour garantir une justice monétaire, nous devrions avoir notre propre monnaie. Toutefois, il s’agit d’un sujet sensible à aborder avec science et sans précipitation.
Après la publication de ce livre, quelle est la suite ?
La prochaine étape consiste à proposer un programme politique chiffré, réaliste et en conformité avec nos réalités. Pour cela, nous sommes en train de mettre en place un mouvement dédié.
17 Commentaires
Amsa
En Octobre, 2022 (12:52 PM)Karim$
En Octobre, 2022 (13:12 PM)Reply_author
En Octobre, 2022 (13:22 PM)Donc nous sommes toujours des colonies, des grands enfants.
J'ai honte!!
N'avez-vous pas honte?
Reply_author
En Octobre, 2022 (20:15 PM)Someone
En Octobre, 2022 (12:56 PM)Reply_author
En Octobre, 2022 (16:00 PM)Cayorman
En Octobre, 2022 (13:05 PM)Sama Rew
En Octobre, 2022 (13:17 PM)Jeune arrogant et prétentieux !
On ne t a pas attendu pour bâtir ce pays !
Le Cfa c est lui qui a financé tes études à perte et meme qui a financé ton baptême !
T ES EMBARQUE DANS UN COMBAT IDEOLOGIQUE A LA CON pilotée par ces merdiques de kémi séba et dembelé et dont tu n as ni les aboutissants et les tenants !
TOUCHE PAS A MON CFA
Sinon tu n as aucune valeur à nos yeux
Point barre ! Sinon tu ne vaudras pas plus d un sou à mes yeux !
Reply_author
En Janvier, 2023 (11:54 AM)Djibson
En Octobre, 2022 (13:28 PM)Très superficiel en fin de compte, même s'il y a peut-être une bonne volonté derrière.
Cana
En Octobre, 2022 (13:41 PM)Massamba
En Octobre, 2022 (19:08 PM)Vous voyez ce qui se passe au Liban actuellement, les consequences d'une mal gouvernance. Avec le genre de gouvernzment que nous avons, c'est ce qu'on risque si on avait notre propre monnaie.
Faut pas rêver éveiller
Pas sur qu'il soit bien recu.
Le président de la République du Mali a un salaire brut à l’engagement de 3.515.521 Franc CFA et une indemnité mensuelle forfaitaire de 2.636.640 FCA soit un salaire brut mensuel de 6.152.162 Franc CFA (6 millions…) 😄
Guilaye Diagne
En Octobre, 2022 (21:15 PM)À travers cet entretien, je comprends de mieux en mieux votre démarche intellectuelle basé sur la connaissance approfondie d'ici et d'ailleurs car ayant fréquenté des milieux différents sur tous les aspects évoqués dans votre livre.
Toutes nos félicitations pour cette approche constructive et participative au bon développement du pays.
Et nous souhaitons que vos suggestions et solutions ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd.
Diadieuf Mon Grand
Changement
En Juin, 2023 (22:37 PM)Président Babacar Ndiaye
En Octobre, 2023 (01:07 AM)Participer à la Discussion