Les investigations se poursuivent. L'ancien ministre de l'Intérieur Claude Guéant est convoqué ce mardi 5 juin chez les juges d'instruction qui enquêtent sur les accusations de financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, une audition qui pourrait se solder par une nouvelle mise en examen, selon une source proche du dossier.
Celui qui fut aussi secrétaire général de l'Elysée sous la présidence Sarkozy est arrivé mardi matin au tribunal de Paris, a constaté une journaliste de l'AFP. Déjà mis en examen dans ce dossier en 2015 pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée et faux et usage de faux, il doit de nouveau s'expliquer dans la foulée de la mise en examen de Nicolas Sarkozy en mars et de l'ex-trésorier de campagne Eric Woerth la semaine dernière.
Où en est l'enquête?
Depuis la publication en mai 2012 par le site Mediapart d'un document libyen accréditant un financement d'environ 50 millions d'euros, pour permettre notamment à la Libye de sortir de son isolement diplomatique, les investigations ont considérablement avancé.
Plusieurs protagonistes, dont d'ex-responsables libyens, ont accrédité la thèse de versements illicites. Le sulfureux homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine a lui-même assuré avoir remis entre fin 2006 et début 2007 trois valises contenant 5 millions d'euros en provenance du régime de Kadhafi à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, et à son directeur de cabinet Claude Guéant.
Nicolas Sarkozy "est un vrai menteur et vous allez voir, il va passer son temps avec les juges d'instruction à dire 'non, non, non c'est pas vrai'. Tout ça pour gagner du temps, c'est sa méthode habituelle", avait accusé Ziad Takieddine sur BFMTV, assurant "dire la vérité".
D'autres dignitaires libyens ont démenti tout financement de la Libye de Mouammar Kadhafi, que Nicolas Sarkozy avait reçu en grande pompe à l'Élysée en 2007.
L'enquête élargie
Pendant sa garde à vue, Nicolas Sarkozy est susceptible d'avoir été interrogé sur les différents délits visés par l'enquête. Ouverte notamment pour "détournements de fonds publics" et "corruption active et passive", celle-ci a été élargie en janvier à des soupçons de "financement illégal de campagne électorale".
Cet élargissement fait suite à un rapport de l'office anticorruption, daté de septembre, qui pointe une circulation importante d'espèces dans l'entourage du candidat UMP durant la campagne 2007. "Tout le monde venait chercher son enveloppe", a relaté une ex-salariée, d'après ce rapport dont l'AFP a eu connaissance, doutant qu'une distribution aussi massive ait pu se faire sans que Nicolas Sarkozy ait été au courant.
Interrogés, Éric Woerth, trésorier de la campagne, et l'un de ses adjoints, Vincent Talvas, ont assuré que l'argent provenait de dons anonymes, une justification contestée par d'autres protagonistes de la campagne.
Les investigations ont aussi mis en lumière plusieurs opérations suspectes, notamment un virement de 500.000 euros perçu par Claude Guéant en mars 2008, en provenance d'une société d'un avocat malaisien. L'ex-secrétaire général de l'Élysée a affirmé qu'il s'agissait du fruit de la vente de deux tableaux, sans convaincre les juges qui l'ont mis en examen notamment pour "blanchiment de fraude fiscale en bande organisée".
Un rebondissement en janvier
Les juges s'interrogent également sur la vente suspecte en 2009 d'une villa à Mougins (Alpes-Maritimes) à un fonds libyen géré par Bachir Saleh, ancien argentier de Kadhafi. Ils soupçonnent l'homme d'affaires Alexandre Djouhri d'avoir été derrière plusieurs prête-noms le véritable propriétaire du bien et de l'avoir cédé pour 10 millions d'euros, soit plus du double du prix du marché. Une transaction qui aurait pu être effectuée pour dissimuler d'éventuels versements occultes.
L'enquête a connu un rebondissement important en janvier avec l'arrestation à Londres d'Alexandre Djouhri, qui devrait être fixé sur son éventuelle extradition en juillet. Quant à Bachir Saleh, il a été blessé par balles fin février en Afrique du Sud où il vivait en exil et a depuis quitté ce pays pour des raisons de sécurité, d'après une source proche du dossier. "Mon client a toujours affirmé, qu'à sa connaissance, il n'y avait pas eu de financement", avait déclaré à l'AFP son avocat, Eric Moutet
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