Les autorités birmanes ont inculpé l'ex-dirigeante Aung San Suu Kyi, renversée lundi par un coup d'État, l'accusant d'avoir enfreint une règle commerciale, a déclaré mercredi un porte-parole de son parti.
Un tribunal "a ordonné sa détention provisoire pour une période de 14 jours, du 1er au 15 février, l'accusant d'avoir violé une loi sur les importations/exportations", a écrit sur Facebook Kyi Toe, porte-parole de la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
L'ex-président Win Myint est inculpé pour avoir violé la loi sur la gestion des catastrophes naturelles, selon lui
Elle va être accusée de trahison par l’armée
Les nouveaux dirigeants militaires du Myanmar prévoient d’accuser l’ancienne cheffe du gouvernement Aung San Suu Kyi de trahison, selon de nombreux articles parus sur les médias sociaux mercredi.
L’armée a pris brutalement le contrôle du pays lundi, en instaurant l’état d’urgence pour un an. Aung San Suu Kyi ainsi que d’autres responsables de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), ont été arrêtés et placés en résidence surveillée dans la capitale Naypyidaw.
Le chef de l’armée, le général Min Aung Hlaing, détient désormais les pouvoirs législatif, administratif et judiciaire. Les militaires ont annoncé mardi un nouveau cabinet composé de généraux, d’anciens officiers de haut rang et de politiciens d’un parti soutenu par l’armée.
Les appels à la désobéissance civile se multiplient
Deux jours après ce putsch, condamné par de nombreuses capitales étrangères, les premiers signes de résistance émergeaient.
Des médecins et des professionnels de santé, portant des rubans rouges en signe de protestation, ont annoncé refuser tout travail, sauf en cas d’urgence médicale. “Nous obéirons uniquement au gouvernement élu démocratiquement”, a déclaré à l’AFP Aung San Min, responsable d’un hôpital de 100 lits dans la région de Magway (centre).
Des membres du personnel médical de l’hôpital général de Yangon se sont réunis devant l’établissement, faisant le salut à trois doigts, un geste de résistance déjà adopté par les militants pro-démocrates à Hong Kong ou en Thaïlande.
Un groupe nommé “le mouvement de désobéissance civile” a aussi été lancé sur Facebook et comptait déjà quelque 150.000 abonnés. “Honte à l’armée”, “les militaires sont des voleurs”, pouvait-on lire sur cette page.
Mardi soir, dans le quartier commerçant de Rangoun, la capitale économique, des habitants ont klaxonné, tapé sur des casseroles, certains scandant: “Vive Mère Suu!” (Aung San Suu Kyi).
Pressentant les événements, cette dernière a exhorté la population à “ne pas accepter” le coup d’État dans une lettre écrite par anticipation avant son arrestation.
Avertissement des autorités birmanes
Mais la peur des représailles reste vive dans le pays qui a vécu, depuis son indépendance en 1948, sous le joug de la dictature militaire pendant près de 50 ans.
“La population sait très bien à quel point l’armée peut être violente et se soucie peu de sa réputation internationale, cela pourrait freiner la volonté de mobilisation”, estime Francis Wade, auteur d’ouvrages sur le pays.
Les autorités ont déjà publié un avertissement, mettant en garde contre tout discours ou message qui pourrait “encourager des émeutes ou une situation instable”.
Le coup d’État, “inévitable” selon le général Min Aung Hlaing qui concentre désormais l’essentiel des pouvoirs à la tête d’un cabinet composé de généraux, a déclenché un concert de condamnations à l’international.
La Chine opposée à toute condamnation
Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni en urgence mardi à huis clos à l’initiative du Royaume-Uni pour examiner les suites du coup d’État militaire, mais la Chine s’est opposée à toute condamnation, rapporte la BBC. Le Conseil de sécurité des Nations unies n’a donc pas encore adopté de position commune.
Les ministres des Affaires étrangères du G7 ont exprimé leur profonde inquiétude mercredi à la suite du coup d’État. Dans leur texte commun, les chefs des diplomaties britannique, américaine, française, allemande, italienne, japonaise et canadienne ont appelé les militaires à mettre immédiatement fin à l’état d’urgence, à restaurer le pouvoir du gouvernement démocratiquement élu, à relâcher tous ceux qui ont été injustement détenus et à respecter les droits humains et l’État de droit.
Les États-Unis et l’Union européenne ont menacé d’établir des sanctions contre la Birmanie. Nous sommes parvenus à la conclusion qu’Aung San Suu Kyi et l’ex-président de la République Win Myint, “avaient été déposés dans un coup d’État militaire”, a indiqué une responsable américaine. Cette décision juridique bloque l’aide directe de Washington à l’État birman.
Mais cet acte reste principalement symbolique: l’armée birmane est déjà sous le coup de sanctions depuis les exactions menées par ses soldats en 2017 contre la minorité musulmane rohingya, une crise qui vaut à la Birmanie d’être accusée de “génocide” par des enquêteurs de l’ONU.
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