En vigueur dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, l'interdiction des rassemblements de plus de dix personnes a été révoquée samedi par le Conseil d'État. L'institution exige toutefois le respect des mesures barrières en cas de manifestation.
Le Conseil d'État a levé samedi 13 juin l'interdiction des rassemblements de plus de dix personnes, imposée dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, rétablissant la liberté de manifester, dans le respect des "mesures barrières".
Cette décision intervient alors que des milliers de personnes manifestaient samedi en France contre le racisme et les violences policières. À Paris, la marche, non autorisée - mais tolérée - par la préfecture, a été bloquée à son point de départ et des tensions ont éclaté, la foule huant la police.
Rappelant que "la liberté de manifester est une liberté fondamentale", le juge des référés du Conseil d'État "estime que l'interdiction de manifester n'est pas justifiée par la situation sanitaire actuelle lorsque les 'mesures barrières' peuvent être respectées".
Le juge administratif affirme donc qu'une interdiction ne pourrait être justifiée que "lorsque ces mesures barrières ne peuvent être respectées ou que l'événement risque de réunir plus de 5 000 personnes", un nombre fixé dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.
"C'est une très grande victoire. Le Conseil d'État garantit la liberté de manifester", a réagi auprès de l'AFP Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l'Homme (LDH), requérant au côté notamment de la CGT et du Syndicat de la magistrature.
Une mesure jugée tardive par la LDH
"Il n'y avait aucune raison pour que la liberté de manifester soit moins bien traitée que la liberté de cultes. On peut juste regretter que cela interviennent aussi tard", a-t-il ajouté, précisant que la LDH avait saisi le Conseil d'État en urgence "il y a quinze jours".
Pour la Ligue, les dispositions actuellement en vigueur réduisaient "à néant la liberté fondamentale de manifestation", qui constitue "l'une des garanties démocratiques les plus essentielles".
Elle avait défendu la possibilité de manifester "en toute sécurité" et dans le respect des gestes barrières, affirmant que si les autorités étaient "en situation de procéder à des verbalisations de personnes participant à des manifestations, (...) elles pourraient également procéder à des verbalisations si certains manifestants méconnaissent les gestes barrières".
Des manifestations tolérées auparavant
Mardi, en dépit de l'interdiction alors en vigueur, quelques milliers de personnes se sont rassemblées à Paris en mémoire de Georges Floyd, cet Afro-Américain tué par un policier blanc à Minneapolis. Mais quelques heures avant, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner avait expliqué que bien qu'interdite, cette manifestation serait tolérée et ne donnerait pas lieu à des "sanctions". "C'est une situation absurde", avait dénoncé Me Spinosi.
Le juge administratif a tenu à préciser que "conformément à la loi", toute manifestation sur la voie publique devait "faire l'objet d'une déclaration préalable" et pouvait être interdite par les autorités de police ou le préfet, "s'ils estiment qu'elle est de nature à troubler l'ordre public, y compris pour des motifs sanitaires, ou lorsque les circonstances locales l'exigent".
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