1 – Et l’Homme créa le "subprime"
Ces prêts à taux variables, les fameux "subprimes", sont ensuite revendus à des fonds d’investissement. Les crédits sont ensuite disséqués par les financiers, et intégrés par "petits morceaux" dans des paquets financiers, qui incluent également d’autres actifs de crédits moins risqués.
Si l’on schématise, un paquet financier type ressemble à un carton d’emballage. Le contenu de ce carton, les actifs de crédits, est divisé en trois catégories. Les actifs à bas risques, qui rapportent peu mais sont très sûrs, occupent le gros du volume du carton. Viennent ensuite des crédits plus risqués, qui sont également financièrement plus intéressants. Enfin, dans le peu d’espace restant dans le carton, les ingénieurs financiers placent une petite portion de crédits à très haut risque, dont font partie les "subprimes". En fonction de la place accordée à ces produits financiers dans les paquets, les agences de notations les "étiquettent" par rapport au potentiel risque qu’ils contiennent.
A partir de fin 2006, les ménages qui avaient souscrits aux "subprimes" sont victimes de la brutale augmentation des taux d’emprunts et ne peuvent plus rembourser leurs banques.
Leurs maisons sont alors saisies pour être revendues. Mais le marché immobilier américain, rapidement inondé par la quantité de l’offre et face au peu de demandes, s’effondre.
Première conséquence : les fonds qui avaient massivement investit dans les "subprimes" se retrouvent pris au piège. En juillet 2007, deux fonds de la banque d’investissement Bear Stearns ferment.
C’est le début d’une réaction en chaîne qui va toucher des banques dans le monde entier. NorthernRock, établissement spécialisé dans le crédit immobilier au Royaume-Uni, sera nationalisé en février 2008, faute de repreneur, après que les images des longues files d’épargnants venus retirer leur argent en catastrophe aient fait le tour du monde.
En France, BNP-Paribas est obligé de fermer plusieurs de ses fonds. La Société Générale, en plein affaire Kerviel, annonce une dépréciation de 2 milliards d’euros suite à la crise des "subprimes".
Pour bien saisir l’effet domino qui se propage dans les places boursières, il faut comprendre que les sommes d’argent qui sont misées chaque jour par les banques sont plus importantes que la valeur réelle de leurs actifs. Le vieil adage "on ne prête qu’aux riches" prend ici toute sa signification. Une banque qui annonce de bons résultats inspire la confiance des investisseurs, et on lui confie de l’argent. Les banques se prêtent donc de l’argent entre elles, et remettent ces sommes en circulation sur les marchés financiers.
Avec le début de la crise immobilière aux Etats-Unis, les banques, qui possèdent toutes plus ou moins de titres impliquant des "subprimes", engagent une véritable partie de poker. Chacune sait combien de titres "chauds" elle possède, mais ignore le contenu du portfolio de sa voisine. Jouant la carte de la sécurité, elles évitent de prêter à leurs consœurs, ou alors à des taux très élevés. Nombre d’établissements qui dépendent de ces prêts interbancaires se retrouvent alors fragilisés.
En Asie, l’affolement d’une trentaine de banques, qui avaient prêté de l’argent à Lehman Brothers, s’est répercuté sur les marchés. Au Royaume-Uni, c’est HBOS, l’une des plus grande banque britannique, qui a été fusionnée de force jeudi avec sa concurrente, la Lloyds TSB, avec la bénédiction du gouvernement Brown.
Pour faire face à cette crise, les banques centrales des différents pays n’ont que deux mesures à leur disposition. Changer leur taux directeur et/ou injecter de l’argent dans les établissements en difficulté (nationalisation) ou aux banques qui rachètent leurs consœurs en faillite.
Mais pour éviter de sombrer dans un chaos total, la Fed a été obligée d’aller plus loin. En moins de deux semaines, le gouvernement américain a dû nationaliser pas moins de trois géants de la finance, un comble pour une économie qui prône l’ultralibéralisme.
Si les interventions des banques centrales américaine, européenne et japonaise à coup de milliards de dollars, ont permis une accalmie au moins momentanée des marchés, elles n’offrent pas de solution à long terme. Et nombre d’acteurs financiers plaident pour l’instauration de nouveaux garde-fous qui puissent assainir le système financier.
Le chômage ne menace pas seulement le monde de la finance. L’économiste Alessandro Giraudo, auteur de "Mythes et Légendes économiques", interrogé sur FRANCE 24, estime que la crise actuelle "va forcer les acteurs de l’économie à ralentir leur activité et à prendre moins de risques".
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