Reuters - Le président américain George Bush a souhaité, mercredi, que tout soit fait pour mettre un terme au programme nucléaire iranien, et ainsi "éviter une Troisième guerre mondiale". La menace d’un conflit armé est autant destinée à Téhéran qu’à la Russie, au moment où la Russie de Vladimir Poutine réitère ses doutes sur les projets militaires de Téhéran. La guerre est d’abord diplomatique. L’avertissement de Bush s’adresse autant à la Russie qu’à l’Iran.
Lorsque Bernard Kouchner, il y a un mois, avait évoqué le risque de "guerre" contre l’Iran, soupçonné par les Occidentaux de chercher à se doter d’un arsenal atomique, Téhéran avait accusé le ministre français d’avoir revêtu une "peau américaine". La République islamique lui reprochait ainsi d’avoir usé d’une rhétorique et d’un lexique propres aux Américains. Si le chef de la diplomatie française avait tenté, dans les jours suivants, de minimiser la portée de ses propos en soulignant qu’il avait comparé la guerre à la "pire" des éventualités, il n’est pas seul à faire valoir publiquement cette menace. Et c’est bien des Etats-Unis qu’est venue, mercredi, la dernière charge.
Le président américain George Bush, théoricien de l’Axe du mal sur lequel l’Iran trouvait une bonne place, a en effet mis en garde la communauté internationale contre la menace d’une Troisième guerre mondiale. Rien de moins. "Nous avons un dirigeant en Iran qui a annoncé qu’il voulait détruire Israël", a affirmé Bush en référence aux multiples appels du président Mahmoud Ahmadinejad à "rayer Israël de la carte". "Donc j’ai dit aux gens que, s’ils voulaient éviter une Troisième guerre mondiale, il semble qu’ils devraient se demander comment les empêcher d’acquérir les connaissances nécessaires pour fabriquer une arme nucléaire", a-t-il poursuivi. Le poids des mots est énorme, car il brandit non la seule menace d’une guerre, mais d’une déclaration de guerre.
La Russie ne veut pas de nouvelles sanctions à l’ONU
Au moment où l’administration Bush concentre les efforts de sa dernière année de mandat sur la résolution du conflit israélo-palestinien, et que l’échec de la stratégie présidentielle en Irak pèse sur la Maison blanche, l’Iran apparaît à Washington comme un facteur déstabilisateur pour la région. Bush l’assume, qui s’est fait le pourfendeur en chef du programme nucléaire iranien. Téhéran revendique son libre accès au nucléaire civil comme source d’énergie, les Occidentaux le soupçonnent d’avoir des ambitions militaires. Des sanctions ont déjà été adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies. Les Etats-Unis et l’Europe souhaitent aller plus loin, mais se heurtent à la Russie.
Le président américain n’a que peu goûté la visite de son homologue Vladimir Poutine, mardi à Téhéran. A cette occasion, le maître du Kremlin a rappelé que les deux pays collaboraient dans le domaine du nucléaire civil, s’engageant notamment à ce que la centrale iranienne de Bushehr soit livrée dans les délais par les constructeurs russes. Surtout, Poutine a remis en question à plusieurs reprises les soupçons de ses partenaires diplomatiques. Au cours de ses rencontres avec Nicolas Sarkozy, puis Angela Merkel, ces derniers jours, il a déclaré ne pas avoir la preuve que l’Iran cherchait à se doter de l’arme nucléaire. Moscou "part du principe" que l’Iran n’a pas d’ambitions militaires. Mardi, il a répété qu’il n’accepterait aucune attaque contre la République islamique.
Gates demande "un front uni"
Bush s’inquiète de voir Poutine faire de l’Iran un partenaire lambda. Lors d’une conférence de presse à la Maison blanche, il a souhaité que le président russe lui fasse un compte-rendu de ses entretiens avec Ahmadinejad. "Ce qui m’intéresse, c’est de savoir s’il continue ou non d’avoir les mêmes inquiétudes que moi", a-t-il dit. En septembre, "il m’a redit qu’il estimait qu’il n’était pas dans l’intérêt du monde que l’Iran ait la capacité de fabriquer une arme nucléaire", a-t-il plaidé. Alors que le secrétaire à la Défense, Robert Gates, déclarait lundi que "seul un front uni sera capable d’exercer la pression suffisante" sur Téhéran, l’assouplissement de Poutine met un frein à la politique américaine. Mais l’obstination américaine à vouloir disposer d’un bouclier anti-missiles sur le sol européen - que le Kremlin considère comme une menace directe - n’oeuvre pas, non plus, pour l’unité. Les Etats-Unis seraient prêts à faire des concessions sur ce projet si l’Iran suspendait son programme d’enrichissement d’uranium, selon un représentant du Département d’Etat américain à Bruxelles. Renoncer, de part et d’autre, à des dispositifs militaires paraît en effet, la solution la plus cohérente pour éviter une guerre.
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