FERMETURE DES ESPACES AÉRIENS EUROPÉENS : Désagréments et inquiétudes à l’aéroport de Dakar

L’immense nuage de cendres crachées par le volcan islandais Eyjafjoll n’a pas encore touché l’espace aérien africain. Toutefois, comme dans beaucoup d’aéroports européens, Dakar a aussi enregistré son lot de malheureux passagers contraints de prolonger leur séjour ou de changer de compagnie.

Dimanche nuit, 23 heures. Ambiance inhabituelle à l’aéroport international de Dakar. L’info est bien passée. Du coup, les passagers ne déferlent pas avec leurs bagages. Certains comme Fred et Henriette trompent leur ennui. Sous la lumière crue des tubes de néon, ils vont et viennent. Henriette affiche une mine désappointée. Quelques minutes auparavant, elle était debout devant le grand panneau des départs sur lequel s’affichait à foison : « Annulé ».

« Depuis jeudi, nous sommes bloqués à Dakar. Pour la troisième fois en moins de deux jours, mon vol est annulé », lance, très fatiguée, Henriette. Ce soir aussi, le couple est contraint de passer la nuit à Dakar. L’avion de Brussels Airlines au bord duquel ils devaient embarquer est cloué au sol en raison des perturbations du trafic aérien. Mais ils sont décidés à ne pas faire le deuil du voyage annulé. « Brussels ou pas, demain, nous quitterons Dakar », soutient ce couple belge.

Au pied de cet avis de crise, Karl et Marie, accompagnés d’Evi, contrairement à Henriette et Fred, ce couple avait pris la précaution de changer de compagnie. « C’était impensable pour nous de continuer à attendre un avion de Brussels Airlines qui ne vient toujours pas », explique Marie. Et Karl de renchérir : « nous nous sommes finalement rabattus sur la compagnie portugaise Tap ». Prix à payer : escale forcée à Lisbonne. Mais Marie et Karl semblent accepter ce désagrément. « Nous savons que le trafic n’a pas encore repris entre Lisbonne et Bruxelles mais quitter Dakar ce soir, c’est déjà faire une bonne partie de notre voyage », soutiennent-ils, sérénité de mise.

South Africa dans un ciel vide Juste à côté de Marie, Karl et Evi, Mme Ndiaye est marquée par l’anxiété. Mine inquiète, elle est aveuglée par les affiches aux multiples couleurs annonçant que le trafic aérien reste fermé en Europe. Sa sœur, qui a quitté Dakar mercredi à destination de Paris, n’est toujours pas arrivée. Sacoche bleue sur l’épaule, Mme Ndiaye, qui a du mal à s’exprimer, cherche désespérément des renseignements. Aux dernières nouvelles, sa sœur était à l’aéroport de Lisbonne, devenu le passage obligé de tous les vols vers l’Europe. « Je suis là pour trouver quelqu’un qui pourrait me renseigner », murmure Mme Ndiaye, debout devant le guichet de la compagnie Tap. A un jet de pierre de la tourmentée Mme Ndiaye, des affiches attirent le regard. L’une d’elles donne une mauvaise nouvelle à Harouna Ka : « Suite à la fermeture des aéroports de la France, le vol CRL 991 est annulé jusqu’à nouvel ordre. Corsair s’excuse ».

 Si cette fermeture des espaces aériens européens a provoqué la colère des grandes compagnies aériennes comme Air Europa, Air Méditerranée ou encore Air France, telle n’est pas le cas pour la compagnie nationale portugaise Tap, qui profite bien des perturbations.

 « Tous les passagers, qui avaient l’habitude de prendre ces grandes compagnies, se sont rabattus sur Tap qui va certainement faire d’importantes recettes », soutient, sous le couvert de l’anonymat, une dame employée d’une agence de voyage. « C’est sûr que même après ces perturbations, beaucoup de passagers vont rester avec Tap », ajoute-t-elle. C’est également l’avis d’Abdoulaye Sy. Pour ce jeune employé de South Africa Airways, s’il y a une compagnie qui a profité de cette fermeture des espaces européens, c’est bien la sienne. « D’habitude, nos clients quittant Dakar à destination de Dallas ne dépassaient pas la trentaine. Depuis les perturbations, ce nombre est passé à 200 », soutient le jeune Sy qui ajoute : « si je suis à l’aéroport jusqu’à cette heure, c’est parce que nous avons beaucoup de boulot depuis jeudi ».

 Pour Abdoulaye et ses amis, le rythme de travail restera sans doute soutenu car l’ouverture totale de l’espace européen n’est pas envisagée d’ici mercredi.