Le projet de loi, qui prévoit une sortie de l'état d'urgence sanitaire à partir du 10 juillet, a été adopté mercredi en première lecture à l'Assemblée nationale, malgré les critiques de l'opposition le jugeant "liberticide". Il sera examiné au Sénat dès lundi.
"L'état d'urgence sanitaire va prendre fin mais notre vigilance, elle, doit demeurer intacte", a plaidé le ministre de la Santé Olivier Véran mercredi 17 juillet, avant l'adoption à l'Assemblée nationale du projet de loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire après le 10 juillet. Le texte, qui doit être examiné lundi au Sénat, prévoit une période de "vigilance" durant laquelle des restrictions resteront possibles. Cette sortie doit donc "être organisée", a-t-il ajouté, estimant que "ne pas conserver certaines mesures, ce serait faire comme si les risques de redémarrage (de l'épidémie) n'existaient pas", alors que la situation de rebond à Pékin "montre bien que personne n'est à l'abri".
Le texte a été adopté en première lecture, avec le soutien des élus LREM, MoDem et Agir, les oppositions de droite comme de gauche le jugeant "liberticide". Les oppositions s'alarment d'un état d'urgence "qui ne dit pas son nom".
Entré en vigueur le 24 mars face à l'épidémie de Covid-19, l'état d'urgence sanitaire, qui permet de restreindre certaines libertés publiques, avait été prolongé en mai jusqu'au 10 juillet.
Le gouvernement entend y mettre fin, mais a prévu deux exceptions: la Guyane et Mayotte où l'état d'urgence sera prolongé "jusqu'au 30 octobre inclus", car le virus y circule encore activement.
Pour le reste du pays, "le droit commun n'est pas suffisant pour faire face aux dimensions extraordinaires de cette crise", selon la rapporteure Marie Guévenoux (LREM), qui souligne la nécessité de pouvoir "réagir très rapidement" face aux "clusters".
Le texte permet donc des restrictions sur la circulation des personnes, l'accueil du public dans certains établissements ou les rassemblements, et ce jusqu'au 30 octobre.
Mais l'essentiel de l'état d'urgence sanitaire "disparaît", selon M. Véran, citant "le confinement", le fait de se rendre "aux funérailles en famille" ou encore d'aller au restaurant...
S'il fallait décider un nouveau confinement, tel que celui mis en place à partir du 17 mars, le gouvernement devrait de nouveau décréter un état d'urgence sanitaire.
Une volonté de "brider" les manifestations à venir
Mais les oppositions de droite comme de gauche ont dénoncé un texte qui revient en réalité à "l'état d'urgence qui ne dit pas son nom". Elles ont cherché point par point à supprimer ses dispositions, en particulier celles concernant le droit de manifester.
Le socialiste Hervé Saulignac, qui a défendu en vain une motion de rejet, a notamment fustigé un "numéro de bonneteau" avec le maintien de "l'essentiel" du régime d'exception, plaidant pour "un rétablissement plein et entier du droit commun".
L'élu LR Philippe Gosselin a aussi dénoncé un "double langage" du gouvernement avec un projet de loi qui organise une "vraie-fausse sortie" de l'état d'urgence, tandis que Christophe Naegelen (UDI) a raillé un "effet d'annonce" avec ce "régime hybride".
Même dénonciation d'une volonté du gouvernement "de nous leurrer" (groupe EDS), d'un texte "inutile" (Libertés et Territoires), d'un "déni de l'état de droit" (LFI) ou encore d'un maintien d'une "épée de Damoclès sur les libertés" (PCF), à l'unisson d'associations comme la Ligue des droits de l'Homme ou le Syndicat de la magistrature.
En face, les élus LREM, MoDem ou Agir ont défendu un régime transitoire "justifié et nécessaire" face au virus. Le "marcheur" Guillaume Vuilletet a jugé "le procès en intentions cachées" des oppositions "d'une inconséquence grave" car elles laissent entendre que "la crise est passée".
Pour tenter toutefois de "répondre aux inquiétudes", les députés de la majorité ont notamment encadré davantage en commission les restrictions aux rassemblements. Les manifestations feront l'objet d'un régime d'autorisation "au regard de la mise en oeuvre des mesures barrières".
Des modifications insuffisantes aux yeux des oppositions, qui ont dénoncé une volonté de "brider" les manifestations, alors que la rentrée risque d'être "un peu chaude" socialement.
Autre volet de ce texte qui a soulevé la "vive inquiétude" de l'Ordre des médecins, et des interrogations jusqu'au MoDem: la possibilité de prolonger la conservation de certaines données collectées par les systèmes d'information de santé, alors qu'elle devait être limitée à 3 mois.
Elle sera restreinte à la seule finalité de surveillance épidémiologique et de recherche, Olivier Véran défendant un "allongement cohérent" pour "mieux comprendre" le covid-19.
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