François de Rugy, poussé à la démission par des révélations sur ses dîners fastueux à l'Hôtel de Lassay et les travaux dans son logement de fonction, sera-t-il blanchi une semaine après? Les conclusions des enquêtes lancées par l'Assemblée et le gouvernement doivent être rendues publiques ce mardi. La petite dizaine de dîners épinglés par Mediapart, lorsque l'ex-ministre de la Transion écologique présidait l'Assemblée en 2017-2018, étaient tous d'ordre professionnel, avec journalistes et personnalités de la société civile, sait-on déjà de source proche de cette enquête demandée par l'intéressé lui-même.
Le montant des travaux à l'Hôtel de Roquelaure, 63.000 euros dont 17.000 pour un dressing , était lui aussi justifié, dans un bâtiment du XVIIIe siècle nécessitant des prestataires spécialisés, d'après Le Parisien. Commandes, devis, factures: rien ne serait irrégulier au vu de cette inspection commandée par le Premier ministre. Ces révélations par Mediapart, ainsi que sur l'utilisation de frais de mandat pour payer des cotisations à son parti en 2013-2014, ont conduit le numéro deux du gouvernement à démissionner mardi dernier, tout en continuant de clamer son innocence. “La clarté sera faite dans les prochains jours”, a promis Emmanuel Macron, interpellé samedi dans les rues de Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénées) sur le cas Rugy.
“On doit être attaché à la présomption d'innocence”, a aussi plaidé le chef de l'Etat, soucieux de contenir la polémique estivale sur homard et grands crus, un an après le déclenchement de l'affaire Benalla. “Retour aux faits. Je m'exprimerai le moment venu”, a tweeté François de Rugy en fin de semaine, après les premiers résultats de ces contrôles menés durant une dizaine de jours. “Un jour, il reviendra sur tout cela, sur cette folie médiatique”, a-t-on développé dans l'entourage de l'ex-ministre, qui va redevenir député en août et prépare d'arrache-pied sa contre-offensive avec son avocat.
Super indépendant
Pour sa part, le journaliste d'investigation de Mediapart Fabrice Arfi met en doute les vérifications menées par le secrétaire général de l'Assemblée, qui a procédé à des auditions, dont celle volontaire de M. de Rugy, et à l'examen de factures et listes d'invités. “Des dîners professionnels dont Mme Rugy a confirmé dans un entretien enregistré le caractère amical des invités, que François de Rugy qualifie d’informels et dont plusieurs convives ont réfuté l'aspect professionnel... La blague”, a tweeté le journaliste.
“Les enquêtes internes ne sont pas crédibles et ne voient jamais rien”, a fustigé lundi l'ex-ministre Delphine Batho sur Franceinfo. Trois autres dîners à Lassay, pour Noël et Saint-Valentin en particulier, pourraient eux être sujets à caution, selon le Journal du Dimanche. François de Rugy s'est engagé à rembourser chaque euro contesté. Certains politiques mettent aussi en cause l'impartialité de ces enquêtes internes. “Un peu comme si Bayer Monsanto disait que le glyphosate n'était pas nocif pour la santé. Super indépendant”, selon Manon Aubry (LFI) sur Twitter. Reste que si rien d'illégal n'a été commis, des élus se placent sur le plan de la moralité, dont François de Rugy se faisait le chantre, au diapason de la macronie.
“Un comportement modeste”
“Le mélange des genres entre caisse privée et caisse publique n'est plus toléré”, souligne l'ancienne magistrate et ex-élue EELV Eva Joly, selon qui “dans cette affaire, on ne parle pas de montants très importants mais c'est davantage une question de symbole”. “On ne peut en rester là, il y a des précautions à prendre désormais”, invite une source parlementaire LREM, alors que l'Assemblée a connu des avancées ces dernières années en matière de transparence, mais moins côté présidence.
Côté gouvernement, Edouard Philippe pourrait préciser sa circulaire de mai 2017 qui demandait l'exemplarité aux ministres et leur préconisant un “comportement modeste”. “Les dépenses à caractère personnel ou familial ne peuvent évidemment être mises à la charge de l'État”, était-il déjà inscrit. Le chef du gouvernement pourrait y ajouter des préconisations sur les travaux dans les logements de fonction. René Dosière, ex-député PS et actuel président de l'Observatoire de l'éthique publique, a préconisé dans Le Figaro un poste de déontologue au gouvernement. “Pas d’inquisition, mais l'État accorde des avantages et en contrepartie, ceux-ci doivent être connus”.
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