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FRANCOPHONIE- REMOUS DANS LA GESTION DE ABDOU DIOUF : Le Canada veut plus de « rigueur » et de « transparence »

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FRANCOPHONIE- REMOUS DANS LA GESTION DE ABDOU DIOUF : Le Canada veut plus de « rigueur » et de « transparence »
Le Devoir - L’adoption de « règles de rigueur et de transparence » à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) crée de sérieux remous à l’interne, a appris Le Devoir. Depuis plusieurs mois, les gouvernements du Canada et du Québec, entre autres, cherchent à imposer une modernisation des pratiques de cette « maison » fondée en 1970. « Ça équivaut à nettoyer les écuries d’Augias », dit avec ironie une source, en référence à l’un des 12 travaux d’Hercule.

« On a des sueurs froides en lisant certains rapports, monsieur », raconte une autre source, très bien informée.Le représentant personnel du premier ministre du Canada, Ferry de Kerckhove, a exprimé cet automne sa déception que les « choses n’aillent pas plus vite », surtout à l’approche du Sommet de la Francophonie, qui aura lieu du 17 au 19 octobre à Québec.

La question sera encore soulevée le 7 avril à Paris, lors de la prochaine réunion du Comité permanent de la Francophonie, composé des « sherpas » (selon le jargon d’usage), autrement dit les représentants personnels des chefs politiques. Un rapport qu’on dit explosif sur les « Unités hors siège », les bureaux de la Francophonie à l’étranger, y sera notamment discuté.

La pression est tellement forte que le secrétaire général, Abdou Diouf, ancien président du Sénégal, a accepté, depuis septembre, de prendre diverses mesures au sein même de son cabinet, dont le budget est passé de plus de 10 millions de dollars en 2006 (six millions d’euros) à moins de trois millions de dollars (1,75 million d’euros) en 2008. Trois personnes l’ont d’ailleurs quitté récemment. À son cabinet, on a indiqué que M. Diouf « ne touche même plus ses indemnités quotidiennes ».

Il y a deux ans, plusieurs pays avaient critiqué l’importante taille de son cabinet, d’une vingtaine de conseillers à l’époque. Depuis, le nombre de conseillers a été réduit. Un organigramme transmis par l’OIF hier comptait 10 noms de conseillers et 11 noms d’employés de soutien. Les questions du Devoir n’ont pas été bien accueillies par le directeur de cabinet, Pierre de Cocatrix : « Pourquoi souhaitez-vous ce genre d’information ? »

Rapport dévastateur

Un autre choc pour l’OIF a été le dépôt, le 31 octobre 2007, d’un rapport dévastateur de la Cour des comptes française (équivalent de notre vérificateur général), présidée par Philippe Séguin. Le rapport, dont Le Devoir a obtenu copie, porte sur la gestion de la Délégation à la paix, à la démocratie et aux droits de l’homme (DDHDP), un des bras de l’OIF. Alors qu’une des missions de la DDHDP est de promouvoir la bonne « gouvernance », le rapport concluait — avec force euphémismes — qu’il y avait d’énormes problèmes de gestion dans cet organisme et un « manque de culture de contrôle ». La Cour des comptes a souligné « l’urgence de la mise en place d’un véritable contrôle interne structuré ».

Le rapport fait état de plusieurs irrégularités, dont celles-ci :

- des employés qui avaient cessé de travailler touchaient encore leur salaire près d’un an plus tard ;

- le recours excessif aux avances. La cour souligne qu’une délégation de l’OIF est partie au Brésil en 2006 pour participer à une conférence des intellectuels d’Afrique et de la diaspora avec 48 000 euros (environ 72 000 $) en espèces. Le Brésil est pourtant un « pays qui dispose notoirement d’un système bancaire répondant aux standards internationaux », note la cour. Sur cette somme, 3942,99 euros ont été rendus au terme de la mission ;

- le versement d’honoraires « sur le compte en banque, non pas du bénéficiaire, mais d’un tiers à la demande de l’expert, dans un pays qui n’est pas celui de la résidence de l’expert. L’OIF devrait éviter ce type d’opérations financières, certes exceptionnel et même à la demande du bénéficiaire, qui comportent des risques juridiques ».

La cour s’attarde aussi au cas de l’ancienne patronne de la DDHDP, la déléguée Christine Desouches, fille de l’ancien directeur de cabinet de Jacques Chirac, Maurice Ulrich. Lui-même fut sherpa du président auprès de la Francophonie.

Mme Desouches, lorsqu’elle a atteint l’âge de la retraite, a assumé son propre intérim, explique le rapport. Période durant laquelle elle a reçu : un salaire mensuel, une prime de cabinet et une indemnité mensuelle de représentation. « Au total, la rémunération versée [...] est supérieure au salaire mensuel perçu précédemment par cette même personne en tant que statutaire », peut-on lire dans le rapport. Or, à la fin de l’intérim, Mme Desouches est devenue « conseiller spécial » aux affaires politiques et diplomatiques au cabinet de M. Diouf.

Le rapport de la Cour des comptes écorche le cabinet Diouf. Il lui reproche notamment l’absence d’une « réglementation concernant la prime de cabinet versée à certains membres » de ce même cabinet. Il recommande du reste de mettre en place une « réglementation concernant les indemnités de représentations versées aux membres du cabinet ».

Le même jour du dépôt du rapport (31 octobre), Abdou Diouf signait une note faisant de l’administrateur Clément Duhaime, à partir du 1er janvier 2008, « l’ordonnateur unique » des budgets de l’organisation. Autrement dit, il n’y a maintenant qu’à M. Duhaime (ancien délégué du Québec à Paris) qu’il « délègue ses pouvoirs ». Ce qui en a privé la direction de la DDHP et le directeur de cabinet du Secrétaire général. Hier (vendredi 28 mars 2008), M. de Cocatrix soutenait d’ailleurs qu’il ne « gérait strictement rien », sinon l’enveloppe dévolue au cabinet.

Depuis son arrivée en poste en 2006, plusieurs sources indiquent que M. Duhaime a effectué d’importants efforts de rationalisation, limitant par exemple le droit à la classe affaires aux employés voyageant plus de huit heures. Il a aussi diminué le nombre de voitures de fonction. Il y en a maintenant une dizaine.

Le ministère des Relations internationales du Québec annonçait en juin 2007 qu’il ajoutait deux millions à la contribution de 10 millions de dollars versée pour l’année 2007. Il consacrera 16 millions au Sommet de la Francophonie. Le fédéral, 57 millions.



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