"Les institutions n'ont pas su protéger", malgré de multiples alertes, Samuel Paty, l'enseignant assassiné mi-octobre à Conflans , en France, par un Tchétchène radicalisé, estime dans un entretien au Monde l'avocate de la famille Me Virginie Le Roy.
Ce professeur d'histoire-géographie de 47 ans avait montré à ses élèves des caricatures du prophète Mahomet, lors d'un cours sur la laïcité, qui avait créé la polémique auprès de certains parents. Dix jours plus tard, il a été assassiné par un Tchétchène radicalisé, à la veille des vacances.
L'avocate décrit toute une série de manquements: de la part de l'Éducation nationale, tout d'abord. Un rapport de l'inspection générale de l'Éducation publié début décembre a souligné la "réactivité" de la prise en charge de l'institution mais pointé un défaut de surveillance des réseaux sociaux. Le rapport évoque notamment "la maladresse que (Samuel Paty) avait pu commettre en croyant bien faire de proposer aux élèves musulmans de quitter la salle s'ils craignaient d'être choqués".
“Indécence”
L'avocate de la famille juge qu'"alimenter une telle polémique" est "indécent": "les récits sur le fameux cours sont divergents" mais ce rapport, critique-t-elle, "se permet de conclure aussi radicalement qu'il a désigné les élèves musulmans alors que ce n'est pas le cas".
Côté renseignements, Me Le Roy estime aussi qu'il "y a eu une erreur grave et manifeste d'appréciation de la situation" alors que "tous les marqueurs étaient au rouge".
L'avocate rappelle que l'une des vidéos diffusée par le père de l'élève qui a déclenché la polémique, accompagnée du militant islamiste radical Abdelhakim Sefrioui, était intitulée "L'islam et le prophète sont insultés dans un collège public." Pour elle, "ce sont des mots déterminants pour les suiveurs d'Al Qaida".
Manque de protection
Une note du renseignement territorial des Yvelines du 12 octobre "explique en outre qu'après la gradation de la première semaine, les choses se calment. Or c'est faux, il se passe des choses structurantes la deuxième semaine" avant l'assassinat, souligne-t-elle.
"Partir du postulat que cet attentat ne pouvait pas être prévu ferme des portes qui peuvent être très dérangeantes (...). Est-ce que Samuel Paty a été protégé? Non. Est-ce qu'il aurait dû l'être? Sans aucun doute, oui. Samuel Paty n'aurait pas dû mourir", insiste-t-elle.
Dans ce dossier, cinq hommes ont été placés en garde à vue lundi matin. Quatorze personnes font déjà l'objet de poursuites, dont six collégiens.
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