Emmanuel Macron a promis jeudi aux agriculteurs que l‘Etat se montrerait ferme avec les distributeurs qui ne respecteraient pas la charte de bonne conduite dans le cadre des négociations commerciales, afin qu‘ils soient rémunérés au juste prix. Le chef de l‘Etat, perçu par une majorité de l‘opinion comme le “président des riches”, était attendu de pied ferme pour ses voeux à un monde agricole éprouvé par quatre années de “guerre des prix” et plusieurs années de crise économique.
Trois mois après avoir tracé les grandes lignes de son projet de “transformation profonde” de la filière agricole, il a confirmé que ses engagements seraient inscrits dans le projet de loi qui sera présenté mercredi en conseil des ministres. “Ce que demande l‘agriculture française, ce ne sont pas des aides, c‘est de ne pas être le seul secteur où la vente à perte est devenue la règle. C‘est légitime et c‘est ce que nous allons faire”, a-t-il dit à Saint-Genès-Champanelle (Puy-de-Dôme).
“Dans le texte de loi, il y aura bien les engagements annoncés : renverser la construction du prix en partant des coûts de production, relever le seuil de revente à perte, encadrer les promotions pour permettre un juste retour du prix payé aux agriculteurs, lutter contre les prix abusivement bas, faciliter les recours en cas de litige et assurer plus de transparence dans la coopération agricole.”
Cette série d‘annonces avait été relativement bien accueillie en octobre par les agriculteurs qui ne décolèrent pas contre les grandes enseignes qu‘ils accusent de ne pas anticiper les principes de la future loi, en dépit de la charte signée en ce sens lors des états généraux de l‘alimentation. “NAME AND SHAME” “Les bruits que j‘entends ne sont pas encourageants”, a dit Emmanuel Macron, annonçant une réunion dès la semaine prochaine de l‘ensemble des acteurs avec les ministres de l‘Agriculture et de l‘Economie pour rappeler les règles à respecter.
A l‘issue de cette réunion, “s‘il n‘y a pas un changement dans ces dernières semaines de négociations, nous dirons aux consommateurs citoyens français qui fait quoi”, a-t-il prévenu. Des contrôles renforcés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) vont être conduits la semaine prochaine pour “voir les comportements qui sont en infraction”.
Dans un contexte socio-économique morose - en 2016 30% des agriculteurs ont eu un revenu inférieur à 350 euros par mois selon la sécurité sociale MSA -, le chef de l‘Etat a multiplié lors de son discours les gestes d‘apaisement et de soutien. Concernant l‘interdiction du glyphosate - un herbicide jugé dangereux par les défenseurs de l‘environnement mais que les agriculteurs veulent pouvoir continuer à utiliser -, il a ouvert la porte à une dérogation pour les 10% de cas où il n‘y aurait pas d‘alternatives. Au lendemain de la manifestation d‘un millier d‘agriculteurs à Montauban contre la carte des futures zones agricoles défavorisées éligibles à des aides européennes, il a assuré qu‘il allait défendre auprès de Bruxelles une période de transition de trois ans.
UNE PAC “AMBITIEUSE” MALGRÉ LE BREXIT
Concernant la conclusion de nouveaux accords commerciaux et l‘ouverture de nouveaux marchés, il s‘est efforcé d‘apaiser les inquiétudes des agriculteurs, soulignant que ces accords pouvaient “être favorables” aux filières. “Si nous savons nous organiser, l‘ouverture au monde n‘est pas un danger à condition que nous ayons des lignes rouges respectées et que ces accords commerciaux soient cohérents avec les règles que nous nous donnons et ne créent pas des désavantages sociaux, environnementaux qui seraient irrattrapables”, a-t-il dit.
Cette bataille de l‘ouverture “se gagnera par et avec l‘Europe”, a-t-il poursuivi, affirmant son attachement à la Politique agricole commune (PAC) qui reste toutefois à ses yeux “trop complexe” “illisible” et trop “bureaucratique”. “La sortie du Royaume-Uni pourrait conduire certains à vouloir réduire l‘ambition de cette politique, ce n‘est pas la volonté de la France”, a-t-il dit. “La mise en place d‘outils de gestion des nouveaux risques auxquels est confrontée notre agriculture sera donc un axe prioritaire de la prochaine PAC”, a-t-il ajouté à propos de la lutte contre la volatilité des prix et des cours mondiaux.
Marine Pennetier, édité par Yves Clarisse
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